30 % des médicaments présents en Afrique subsaharienne (et 10 % du marché mondial) sont désormais de faux médicaments. Jean-David Levitte, ambassadeur de France dignitaire, a révélé ces chiffres spectaculaires, lors d'une conférence organisée par le Comité national anti-contrefaçon (CNAC) et l'Institut international de recherche anti contrefaçon de médicaments (IRACM) sur les faux médicaments.
Le fléau, mondial, touche particulièrement les pays en développement mais n'épargne pas les pays « riches ». « La contrefaçon de médicaments est aujourd'hui une réalité quotidienne. Dans le cadre du fret aérien postal, 50 % des colis appréhendés concernent des médicaments tels que les antidépresseurs, les anti-inflammatoires, des anti-hypertenseurs… », explique Nicolas Monnier, responsable de la direction régionale des douanes de Roissy Fret.
Dans ce contexte, les intervenants ont rappelé les instruments législatifs qui encadrent la contrefaçon dont la directive « médicaments falsifiés » de 2011, transposée en France par un décret qui encadre notamment la vente de produits sur internet.
Le Conseil de l'Europe s'est aussi emparé du sujet, avec la convention Médicrime, entrée en vigueur début 2016. Cette convention internationale constitue pour la première fois un instrument juridique contraignant en droit pénal. Elle criminalise la contrefaçon, la fabrication et la distribution de produits médicaux mis sur le marché sans autorisation, ou violant des normes de sécurité.
Faire bouger les pays émergents
Un règlement a été publié par la Commission européenne, qui contraint les industriels à identifier certaines boîtes de médicaments avec un code Datamatrix et à les doter d'un dispositif antieffraction. Il devrait être applicable en France en 2019. « Cet outil permettra de suivre le médicament dans toute sa durée de vie, de voir s'il y a falsification et donc de le retirer du marché », précise Christelle Maréchal, responsable des affaires européennes au LEEM (Les entreprises du médicament, syndicat patronal de l'industrie pharmaceutique).
Corruption
Le phénomène est responsable de plus de 700 000 victimes par an. « Les faux médicaments rapportent 75 milliards de dollars par an, soit trois fois plus que le trafic d'êtres humains », rappelle Michèle Ramis, diplomate chargée de la lutte contre la criminalité organisée. Elle souligne le rôle catalyseur d'internet, où plus de 50 % des médicaments vendus seraient falsifiés, selon l'OMS. « Il faut faire bouger les choses au niveau politique, le G20 doit se saisir du sujet car de grands pays émergents comme la Chine et l'Inde, qui génèrent beaucoup de contrefaçons, en font partie », ajoute la diplomate.
Sur le continent africain, la situation est d'autant plus grave qu'un médicament sur trois serait donc faux. Distribuées dans les rues, les boîtes pallient l'absence de médecins et d'officines, selon Thierry Tuina (Interpol). Le phénomène reste difficile à contrôler avec la corruption qui règne parfois au sein des services douaniers.
En 2013, lors d'une opération douanière organisée par l'Organisation mondiale douanière (OMD) et l'IRACM dans 23 pays africains, 560 millions de faux médicaments avaient été interceptés.
En France, même si le circuit légal reste protégé, Isabelle Adenot, présidente du conseil national de l’Ordre des pharmaciens appelle à une vigilance accrue. Des sites criminels usurpent les adresses web d'officines françaises à des fins crapuleuses.
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