Broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO)

Si votre patient a une BPCO, dites le lui !

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Publié le 15/02/2018
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« Évitons les diagnostics périphériques (bronchite asthmatiforme, bronchite chronique, emphysème…) : si le patient a une BPCO, il faut le lui dire, lui expliquer la maladie et pourquoi on lui mesure le souffle. S’il fume encore ça peut le motiver pour s’arrêter » indique le Pr Nicolas Roche, pneumologue à l’hôpital Cochin, Paris et Président de la Société de pneumologie de langue française.

La BPCO atteint environ 3 millions de patients en France, impacte leur qualité de vie, génère des arrêts de travail même à un stade peu avancé. Mais elle est méconnue du grand public et sous diagnostiquée (et pas seulement les formes légères) : 20 % des diagnostics de BPCO sont posés à l’occasion d’une hospitalisation pour exacerbation.

« Toute consultation doit faire évoquer le tabac. Après 40 ans, chez un fumeur ou un ex-fumeur significatif ou en cas d’empoussiérage professionnel, rechercher d’éventuels symptômes respiratoires dans la vie courante (tousser, cracher, être plus essoufflé que ceux du même âge, avoir des « bronchites » à répétition). Ce repérage clinique en médecine générale des patients nécessitant une mesure du souffle est primordial » précise le Pr Roche.

La spirométrie de repérage

La BPCO est définie par une obstruction bronchique permanente et progressive. La spirométrie est le seul moyen d’en affirmer le diagnostic de certitude. « Le généraliste peut se former à la spirométrie de repérage ou adresser directement le patient en pneumologie, en ville ou à l’hôpital. L’essentiel est de mesurer le souffle » note le spécialiste. L’expérimentation de la CNAM en cours évalue la spirométrie en médecine générale les participants bénéficient d’une formation théorique en ligne et une formation pratique de 3 heures en présentiel, avec exercices, pour apprendre à utiliser le spiromètre et à faire correctement souffler le patient pour des examens fiables. Cette formation est indispensable car rien n’est instinctif.

La spirométrie de repérage est complétée (sans urgence, mais il faut le faire) par des épreuves fonctionnelles respiratoires complètes en pneumologie, afin de déterminer si l’obstruction bronchique est permanente, éliminer un asthme (test de réversibilité sous bronchodilatateurs) et explorer les conséquences sur la fonction respiratoire (distension pulmonaire, principal mécanisme de l’essoufflement, anomalie de diffusion…).

Asthme et BPCO, les traitements diffèrent

En 1re intension le traitement de fond de l’asthme relève de corticoïdes inhalés ; celui de la BPCO, de bronchodilatateurs. « La surprescription de corticoïdes inhalés doit régresser : 50 à 75 % des BPCO en reçoivent mais seuls 25 à 30 % en ont besoin ! Cette surprescription le plus souvent hors AMM et à forte dose expose de façon inutile et injustifiée aux effets secondaires potentiels des corticoïdes (dont l’ostéoporose) », précise le spécialiste.

La corticothérapie inhalée a toute sa place dans le traitement de fond de l’asthme. Dans la BPCO elle n’est bénéfique qu’aux patients peu symptomatiques au quotidien (essoufflement à l’effort de 0 ou 1 sur l’échelle mMRC) et avec au moins 2 exacerbations/an (1). Or la plupart des patients BPCO exacerbateurs sont significativement essoufflés. Le traitement doit être progressif (un bronchodilatateur, un 2e si cela ne suffit pas, ensuite seulement un corticoïde inhalé). 80 % des malades qui répondent bien à une association de 2 bronchodilatateurs répondent aussi bien à un seul bronchodilatateur ! Et 50 % ne prennent pas le traitement ! « Tout prescripteur doit montrer au patient comment utiliser l’inhalateur : ¾ des patients ne l’utilisent pas correctement et le taux d’hospitalisation pour exacerbation double chez ceux qui font des erreurs graves d’utilisation (2)».

(1) cf. recommandations et algorithmes SPLF 2017
(2) Molimard M. et al., European Respiratory Journal 2017; 49 (2)

Dr Sophie Parienté

Source : Le Quotidien du médecin: 9640