Polyarthrite rhumatoïde

Une augmentation du risque de spondylolisthésis lombaire

Publié le 30/11/2018
lombalgie

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Crédit photo : Phanie

Le rachis lombaire dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) est considéré classiquement comme épargné. Toutefois, environ 25 % des patients ayant une PR souffrent de lombalgies chroniques. Et selon une étude récente, il existe une augmentation de la prévalence de lombalgies chroniques sévères chez les patients atteints d’une PR par rapport à la population générale. Or, les articulations postérieures du rachis lombaire possèdent une surface cartilagineuse courte recouverte d’une membrane synoviale et cet arc postérieur est source de stabilité rachidienne. Nous avons donc émis l’hypothèse qu’une synovite des articulations zygapophysaires secondaire à la PR pourrait entraîner une instabilité lombaire puis provoquer un spondylolisthésis (SPL). L’objectif principal est d’analyser la prévalence et les facteurs potentiels associés à un SPL lombaire chez les patients atteints de PR. 

Une étude cas-témoins sur la lombalgie chronique

Une étude cas-témoins monocentrique longitudinale a été réalisée. Tous les patients et témoins ont été inclus sur une période de six mois. Les patients satisfaisaient les critères de classification de la PR de 2010, établis par l’EULAR, et souffraient de lombalgie chronique. Le critère d’évaluation principal était la présence d’un SPL lombaire iconographique. Un groupe contrôle de patients lombalgiques sans PR a aussi été analysé et la prévalence du SPL a été comparée par une analyse Chi2. Les variables potentiellement associées à la présence d’un SPL chez les patients atteints de PR ont été étudiées par analyse de régression logistique multivariée.

Au total, 67 patients atteints de PR et 83 patients contrôles ont été analysés. L’âge médian du groupe PR (80,6 % de femmes) était de 60 ans. La durée moyenne de la maladie rhumatoïde était de 11,2 ± 8,7 ans. Des anticorps anti-peptides citrullinés et une positivité des facteurs rhumatoïdes étaient retrouvés chez 92,5 % et 83,6 % des patients PR, respectivement. Le caractère érosif était présent chez 77,6 % des patients. À l’inclusion de ces derniers, le score DAS28-VS moyen était de 3,5 ± 1,5. De plus, 86,6 % des patients prenaient un traitement à base de corticoïdes avec une posologie médiane de 6,0 mg/jour. Les cDMARDs et les agents biologiques ont été pris respectivement par 67,2 % et 62,7 % patients. Il n’y avait pas de différence significative entre le groupe « patients » et « témoins » concernant l’âge, l’IMC, et le statut tabagique. 

Davantage de SPL lombaire en cas de PR

Les analyses radiographiques ont mis en évidence un nombre significativement plus élevé de patients avec un SPL lombaire parmi ceux atteints de PR : 41,8 % contre 18,1 % (p = 0,001). Le SPL concernait majoritairement les deux derniers étages lombaires (92,8 %) et sa sévérité était principalement de grade 1 (85,7 %). Il existait une plus forte prévalence de lyse isthmique dans le groupe témoin que chez les patients ayant une PR (p = 0,047), ce qui suggérerait que l'articulation zygapophysaire pourrait être impliquée dans la physiopathologie du SPL. Après analyse multivariée, la présence d’un SPL chez les patients atteints de PR était corrélée à l’âge (OR : 1,06 [1,02-1,11], p = 0,004), témoignant d’un mécanisme progressif.

Ainsi, dans la population des patients lombalgiques chroniques, la prévalence du SPL lombaire est augmentée chez les sujets atteints de PR. Cela pourrait être dû à une atteinte rhumatoïde de la synoviale des articulations zygapophysaires aboutissant à une instabilité rachidienne. Des études prospectives avec imagerie standard, tomodensitométrique et magnétique sont nécessaires pour mieux caractériser ces lésions ainsi que leur mécanisme d’apparition. 

D'après la thèse de l'auteur soutenue en 2018
Hagege, B. et al. Increased rate of lumbar spondylolisthesis in rheumatoid arthritis: a case-control study. Eur. J. Clin. Invest. e12991 (2018). doi:10.1111/eci.12991

Benjamin Hagege

Source : lequotidiendumedecin.fr