C’EST AU DÉBUT des années 1980 que le Pr Etienne-Emile Beaulieu a mis au point le RU 34 486, une molécule antiprogestérone aux propriétés abortives, qui deviendra le RU 486 ou mifépristone, rappelle le Dr Raha Shojai. Les essais cliniques menés par la suite ont permis de définir la dose efficace qui, couplée à un traitement par prostaglandine (misoprostol per os ou géméprost par voie vaginale), assure une interruption de grossesse dans plus de 95 % des cas. Dès 1988, le RU 486 est autorisé en France exclusivement dans des centres agréés. Dix ans plus tard, son utilisation est étendue aux établissements de santé, publics ou privés, qui ont une activité gynécologique.
En 2004, l’IVG médicamenteuse est autorisée en ville ; puis, en 2009, les médecins des centres de planification et d’éducation familiale sont également autorisés à la pratiquer. Aujourd’hui, plus d’une IVG sur dix est une IVG médicamenteuse et une IVG médicamenteuse sur 5 est réalisée en cabinet libéral, précise le Dr Shojai.
Le choix de la patiente.
L’IVG médicamenteuse présente un certain nombre d’avantages : c’est une méthode simple et efficace, peu iatrogène, qui évite une anesthésie et réduit les délais d’attente. Elle préserve la confidentialité lorsque l’expulsion a lieu à domicile et permet d’impliquer le partenaire, note le Dr Shojai. Pour la collectivité et l’assurance-maladie, son coût est faible et, pour l’organisation des soins, elle doit aussi être privilégiée car elle libère de la place au bloc, permettant de réduire les délais d’attente pour la chirurgie dans les hôpitaux ajoute-t-il.
L’IVG chirurgicale a aussi ses atouts : elle permet une évacuation rapide et la durée de saignements est plus courte, généralement inférieure à dix jours. Mais elle constitue un geste invasif réalisé sous anesthésie et susceptible d’entraîner des complications. Outre le risque de déchirures ou de fausses routes, les complications sévères sont cependant rares.
Le choix de la méthode doit rester d’abord celle de la patiente permettant d’obtenir une bonne acceptabilité. La majorité des femmes préfèrent la méthode médicamenteuse, surtout par peur de l’anesthésie, comme le montre une étude menée par Robson et al. (Health technology Assessment 2009). La procédure leur semble également « plus naturelle », « moins barbare » et à moindre risque. Celles qui optent pour la chirurgie évoquent au contraire le souhait d’être endormies et de « ne rien voir ni entendre ». Le choix de la méthode médicamenteuse est d’ailleurs confirmé par les patientes ayant expérimenté les deux procédures (Rorbye et al. ESHRE 2004).
Antiprogestérone et prostaglandine.
L’IVG médicamenteuse associe deux produits, une antiprogestérone, la mifépristone (per os) préparant le col et l’utérus, suivie d’une prostaglandine, le misoprostol (per os) ou le géméprost (par voie vaginale), administrée 36 à 48 heures plus tard, entraînant l’expulsion de l’œuf. La prostaglandine peut être administrée au cabinet du médecin ou à domicile, sous certaines conditions, comme le précisent les recommandations de la HAS** :
- distance entre le domicile de la patiente et le centre hospitalier référent limitée à moins d’une heure et la possibilité de s’y rendre 24 heures sur 24.
- délivrance d’informations sur la conduite à tenir en cas de survenue d’effets indésirables, notamment hémorragies et douleur,
- remise d’une fiche de liaison contenant les éléments essentiels du dossier médical (groupe sanguin, Rhésus),
- prise en charge anticipée de la douleur par la prescription d’antalgiques de palier 1 ou 2,
- limitation à 7 SA de cette méthode ambulatoire.
Le succès de la méthode médicamenteuse est estimé entre 95 et 98 %, les complications sont rares, à condition de respecter les procédures, notamment une visite de contrôle au maximum deux à trois semaines après l’IVG, conclut le Dr Shojai.
Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Nordic Pharma
* Centre de Gynécologie Sociale, Hôpital Nord, AP-HM, Marseille
** Recommandations de bonne pratique « Interruption volontaire de grossesse par méthode médicamenteuse » HAS, décembre 2010
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