Le vieillissement ralenti par une voie de réponse à l'hypoxie

Une piste contre les maladies liées à l’âge

Publié le 16/04/2009
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DE NOTRE CORRESPONDANTE

« NOUS MONTRONS que l'induction de la réponse À l'hypoxie chez le ver C. elegans, dans des conditions normales d’oxygène, ralentit le vieillissement et protège contre les maladies liées à un mauvais pliage de protéines », explique au « Quotidien » le Pr Matt Kaeberlein de l'université de Washington à Seattle. « Cette voie agit par un mécanisme distinct de la restriction calorique et du signal insulin-like. 

Cela définit donc une nouvelle voie de longévité chez le ver C. elegans, voie qui est extrêmement bien conservée chez les humains. »

« Il y a plusieurs implications cliniques. La protéine HIF-1 (le plus actif des facteurs induits par l’hypoxie) et la réponse à l'hypoxie pourraient constituer des cibles thérapeutiques utiles pour traiter les maladies neurodégénératives telles que la maladie d'Alzheimer, la maladie d’Huntington ou la maladie de Parkinson. Lorsque nous comprendrons mieux les mécanismes moléculaires mis en jeu, cette voie pourrait également représenter une bonne cible pour traiter d'autres maladies liées à l'âge et, peut-être, ralentir le vieillissement. »

« Beaucoup de progrès ont été réalisés ces dernières années pour comprendre comment le vieillissement est contrôlé par des facteurs de l'environnement et des facteurs génétiques. Le grand potentiel de la recherche sur le vieillissement tient au fait que de nombreuses maladies sont influencées par le vieillissement, et les thérapies ciblant les voies de la longévité sont pleines de promesses pour traiter ces maladies liées à l'âge. Nous commençons déjà à observer le développement des premiers agents basés sur leur capacité à cibler des voies intervenant dans le vieillissement chez des modèles animaux, un processus qui s'accélérera dans les prochaines années. Je pense que cette approche conduira à des thérapies efficaces contre une variété de maladies liées à l'âge. »

Les agrégats de protéines toxiques.

Mehta, Steinkraus et coll. ont fait cette découverte alors qu'ils étudiaient le mécanisme par lequel la restriction calorique ralentit le vieillissement chez le ver nématode C. elegans. L'équipe de Kaeberlein avait constaté auparavant que la restriction calorique protégeait également contre les agrégats de protéines toxiques dans les modèles nématode des maladies de Huntington et d'Alzheimer.

Un mécanisme cellulaire majeur pour dégrader les protéines mal pliées ou endommagées est le système ubiquitine-protéasome, dans lequel l'ubiquitine fixe les protéines cibles afin de les marquer pour la dégradation.

Lorsque les chercheurs inactivaient (par ARNi) des composants du système protéasome chez le ver nématode, ils réduisaient la résistance du nématode à la toxicité de la polyglutamine (maladie d’Huntington) et de la bêta-amyloïde (Alzheimer) et accéléraient ainsi la paralysie induite par ces protéines toxiques. Toutefois, les chercheurs ont été surpris de découvrir que l'inactivation du VHL-1 (von Hippel-Lindau), une ligase ubiquitine, retarde la paralysie induite par les protéines toxiques.

Durée de vie allongée de 30 %.

La protéine tumeur-suppresseur VHL-1 est connue pour réguler négativement la réponse à l'hypoxie, en favorisant l'ubiquitination et la dégradation de la protéine HIF-1, le facteur de transcription de la réponse à l'hypoxie.

Les chercheurs ont constaté que les vers rendus incapables de produire le VHL-1 (entraînant la persistance du HIF-1 même en situation de normoxie) présentent une durée de vie allongée de 30 % et une résistance accrue à la toxicité de la polyglutamine (maladie d’Huntington) et de la bêta-amyloïde (maladie d'Alzheimer).

« Cela représente une voie complètement nouvelle pour le vieillissement et les maladies liées à l'âge. Si nous pouvons comprendre à un niveau très détaillé comment le HIF ralentit le vieillissement, nous pourrions peut-être être en mesure d'utiliser cette information pour développer des traitements efficaces pour traiter les maladies liées à l'âge », déclare le Pr Kaeberlein.

Toutefois, puisque la mutation du VHL-1 et l'activation inappropriée de la réponse à l'hypoxie peut favoriser le développement tumoral, « toute thérapie ciblée vers l'activation du HIF-1 devra probablement cibler spécifiquement les cellules ne se divisant pas rapidement, telles les cellules cérébrales », prévient le Pr Kaeberlein.

« Notre objectif, maintenant, est de déterminer comment la protéine HIF protège les animaux du vieillissement », confie le Dr Mehta. Chez les vers et les humains, HIF régule l'activité de plusieurs facteurs intervenant dans la croissance et la résistance au stress. « L'un de ces facteurs doit fournir la clé. »

Sciencexpress 16 avril 2009, Mehta et coll.

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : lequotidiendumedecin.fr