L’analyse de la relation hôte microbiote doit considérer : la flore, la défense intestinale et enfin la translocation des bactéries de l’intestin vers les tissus. Le microbiote joue un rôle aussi bien au niveau des facteurs de risque cardiovasculaire que des maladies cardiovasculaires elles-mêmes.
Un impact sur les facteurs de risque cardiovasculaire
Diabète et obésité
Le rôle du microbiote dans la survenue d’une obésité est établi (1) : des souris colonisés par des fèces de souris obèses gagnent plus de poids que s’il s’agit de fèces de souris non obèses.
Chez l’homme (2), le microbiote diffère lors de la présence d’un diabète. Le rôle de l’immunité intestinale a été mis en évidence (3) : la voie des lymphocytes TH17, dans la survenue de l’insulinorésistance. De plus, notre groupe a montré le rôle de la translocation des lipopolysaccharides (LPS) et des bactéries vivantes dans la survenue du diabète (4). Cette translocation régulée par l’alimentation (5) et l’immunité intestinale prédit la survenue d’un diabète (6).
L’hypertension artérielle (HTA)
Le microbiote intestinal diffère selon le statut tensionnel (7). Son rôle a été démontré : des souris colonisés par du microbiote de patients hypertendus ont une pression artérielle plus élevée qu’avec des fèces de normotendus. Chez la souris, l’administration de lactobacillus murinus prévient la survenue d’une HTA induite par le sel (8). Cette action est médiée par l’immunité intestinale, notamment la voie des lymphocytes TH17. Point de départ de notre recherche sur la translocation, il existe une corrélation entre la concentration dans le sang du récepteur CD14, le principal récepteur des LPS, et la rigidité aortique en population générale (9).
Un lien avec les maladies cardiovasculaires
Des différences de microbiote ont été mises en évidence lors de la présence d’une maladie athéroscléreuse (10). Concernant la barrière intestinale, il a été montré qu’une modification de la défense intestinale favorisait l’athérosclérose (11). Quant à la translocation, un métagénome très diversifié au sein de la plaque d’athérome a été observé chez l’homme (12). D’autre part, le trimethyl amine oxyde (TMAO), un dérivé bactérien de la choline (un acide aminé présent dans la viande rouge), exercerait une action pro athérogène (13). Chez l’homme, ce composé est présent dans le sang, à une concentration modulable par une antibiothérapie, et prédit le risque cardiovasculaire (14).
Quelles stratégies thérapeutiques adopter ?
L’antibiothérapie a échoué à prévenir les maladies cardiovasculaires. Les raisons de cet échec sont peut-être que la cible est un microbiote (et pas un pathogène isolé) et que le microbiote est capable de résilience. La diététique, un moyen efficace de sélectionner notre microbiote, a démontré un effet. La consommation de fruits, aliment riche en fibres digestibles par les bactéries (mais pas par l’homme), réduit la pression artérielle et l’incidence des maladies cardiovasculaires (15). De même, un régime méditerranéen riche notamment en fruits et légumes, réduit de 30 % le risque cardiovasculaire chez des patients traités (16).
Ainsi, la relation hôte microbiote réunit de façon causale les facteurs de risque, la diététique et le risque résiduel cardiovasculaire. Il reste à déterminer la cible et la stratégie adéquates.
CHU de Toulouse, Fédération de cardiologie, Service d’HTA – Centre d’excellence ESH
(1) Gordon et al Nature 2006
(2) Qin et al Nature 2012
(3) Wang et al Nature. 2014
(4) Cani PD, Amar et al Diabetes 2007
(5) Amar et al Am J Clin Nutr. 2008
(6) Amar et al Diabetologia 2011
(7) Li et al Microbiome 2017
(8) Wilck N et al, Nature. 2017
(9) Amar et al J Hypertens 2003
(10) Karlsson et al Nat Commun. 2012
(11) Sasaki et al Circulation 2009
(12) Mitra et al Microbiome 2015
(13) Wang et al Nature. 2011
(14) Tang W et al. N Engl J Med 2013
(15) Du et al N Engl J Med 2016
(16) Estruch et al N Engl J Med 2013
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