Courrier des lecteurs

Ô mages, ô soignants

Publié le 18/09/2020

Je vous propose un hommage aux soignants en forme de conte moyenâgeux, histoire de sourire un peu en ces temps grisâtres.

- Dis maman, raconte-moi ta croisade contre le Coronavirus !

- C'était une guerre – comme l'a dit et redit notre roi.

- C'est quoi la différence ?

- La croisade, c'est quand tu vas chez quelqu'un, la guerre c'est lui qui vient…

s- Et où il habite le virus ?

- Ah ! Si on l'avait su, on aurait pu partir en croisade. Nos alchimistes le cherchaient partout. Les Américains disent qu'il vit en Chine, les Chinois qu'il voyage aux USA, et les Ukrainiens qu'il vient de Russie…

- Houu, c'est compliqué la viropolitique !

- Virologie. Et donc, tous les jours, dimanche et fériés inclus, je prenais mes gantelets chirurgicaux, mon heaume, ma lance-aiguille et mon épée-scalpel, et je partais dans mon destrier prioritaire pour combattre en ville, à l'hôpital ou dans les maisons de retraite encerclées. Le soir je rentrais fourbue, sous les clameurs des voisins (sauf quelques-uns qui craignaient que les infirmières soient démoniaques).

- C'est vrai que vous faisiez de grands gestes derrière des barrières, pour faire peur aux virus ?

- Oui, souvent !

- Vous aviez des canons ?

- Eh ! C'était nous les canons ! Mais avec seulement de la poudre de perlimpinpin…

- Et vous aviez des casques avec ou sans filtre, comme les cigarettes ?

- Oui, des super-masques FFP2 avec un philtre magique, mais y en avait pas pour tout le monde…

- Et t'avais un bouclier ?

- Mmm, presque : une surblouse, mais y en avait pas pour tout le monde.

- Et ça suffisait contre les virus ?

- Oui, ils sont très mous. Par contre, ils étaient vraiment très, très nombreux – des milliards ! - et très sournois.

- « Sur moi ? » ?

­- Sur nous : tellement petits qu'on ne pouvait les voir. Ils se cachaient partout !

­ - Wouaaah ! Comment vous avez fait pour gagner, alors ?

­ - On avait une potion magique…

­ - Comme celle de Panoramix ?

­ - Non : un gel hydroalcoolique fabriqué par le druide Farmacix : au lieu de le boire, on en mettait sur les mains, les portes et les ponts-levis. Mais y en avait pas pour tout le monde. On avait aussi des machines de guerre, de grosses machines compliquées appelées respirateurs artificiels, ou ventilateurs. Mais…

- Je sais ! Y en avait pas pour tout le monde !

- C'est bien, tu as compris le principe.

- J'en ai vu des ventilateurs, c'est pas compliqué : ça tourne et ça envoie de l'air !

- Exactement : ça envoie de l'air aux blessés. Mais c'était seulement dans les hôpitaux – euh… je veux dire dans les châteaux.

- Et les villageois ?

- Le Roi et ses seigneurs avaient ordonné qu'on les vire au logis, dans l'espoir que l'ennemi meure de faim dans la rue.

- Oh… (déçu) Alors y avait pas de combats, sur les champs de bataille ?

- Mmm, des champs stériles, oui, mais comment tu veux faire une grande bataille avec un ennemi minuscule ?

- Ben, y avait qu'à l'écraser avec le pied !

- Pas bête ! On y pensera s'il revient.

- Quand je serai grand, je serai virucide !

– Tu as raison, et…

- On en manque aussi ?

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Dr Michel Ausseil, Médecin généraliste Collioure (66)

Source : Le Quotidien du médecin