Pour 2011, l'InVS estime à 53 041 le nombre de nouveaux cas de cancers du sein et à 11 358 le nombre de décès (le taux de mortalité est en baisse depuis près de 15 ans) (1). L’incidence du cancer du sein augmentant de façon importante depuis 25 ans, avec un taux d’incidence multiplié par deux entre 1980 (56,8/100000) et 2005 (101,5/100000) (2), la question des facteurs de risque se pose avec acuité.
LES FACTEURS DE RISQUE MAJEURS
L'âge
C'est le premier des facteurs de risque (âge moyen au diagnostic : 61 ans). Le risque augmente aussi nettement avec l'année de naissance : la probabilité de développer un cancer du sein avant 75 ans étant de 4,9 % pour les femmes nées en 1910 et de 12,1 % pour les femmes nées en 1950 (2). "Cette élévation du risque avec l'année de naissance est sans doute polyfactorielle, précise le Dr Espié, s'expliquant par les modifications des conditions de vie : parité, âge à la première grossesse, allaitement, risques environnementaux…". Enfin, le pays de naissance est également un facteur de risque majeur, l’incidence la plus élevée étant notée en Amérique du Nord et en Europe du Nord, la plus basse dans les pays en voie de développement et en Asie (3).
La famille
-› En dehors de l'âge, les facteurs de risque les plus importants sont les mutations génétiques et les antécédents familiaux de cancer du sein. Environ 10 % des cancers du sein sont en rapport avec une mutation des gènes BRCA 1 ou BRCA 2. Une mutation sur BRCA 1 est associée à un risque de cancer du sein avant 70 ans de 60 à 70 %, les cancers survenant plutôt précocement (< 40 ans). Une anomalie sur BRCA 2 est associée à un risque d'environ 45 %, et ces cancers sont généralement plus tardifs (› 45 ans).
Un autre gène identifié est le gène P53, lié au syndrome de Li et Fraumeni (associant cancer du sein, sarcome, tumeur cérébrale…) (3).
Les antécédents familiaux de cancer du sein en l'absence de mutation génétique doivent être pris en compte, qu'il s'agisse de la branche paternelle ou maternelle. Les situations où une consultation d'oncogénétique est recommandée, pour une même branche parentale, sont les suivantes (4) :
• Trois cas ou plus de cancers du sein
• Un ou deux cas de cancer du sein associé à un cas de cancer ovarien, un cas de cancer du sein chez l'homme, un cas de cancer du sein bilatéral ou précoce (< 40 ans).
-› Les antécédents personnels de cancers du sein constituent un facteur de risque de récidive ou de survenue d'un cancer controlatéral.
Les mastopathies bénignes
Parmi les mastopathies bénignes, les plus à risque sont les proliférantes, à savoir les hyperplasies épithéliales canalaires ou lobulaires, atypiques ou non. "Une hyperplasie épithéliale atypique multiplie ainsi par 4 à 5 le risque de développer un cancer du sein. Ces lésions sont fréquemment découvertes lors de biopsies réalisées du fait de la présence de microcalcifications à la mammographie". Pour les autres mastopathies bénignes - adénofibromes complexes, adénose sclérosante, papillome solitaire, nodule d’Aschoff (cicatrice radiaire) – le risque est multiplié par 1,5 à 2 (5). "Quant aux mastodynies, cycliques ou non, les données sont contradictoires".
LES AUTRES FACTEURS DE RISQUE
"En dehors des facteurs de risque majeurs, les autres éléments augmentent faiblement le risque (risque relatif d'environ 1,2), mais il faut en tenir compte car ils peuvent s'additionner ou se multiplier".
Les périodes de la vie génitale
-› Concernant la contraception, l'IARC (International Agency for Research on Cancer) conclut dans une récente monographie (2011, réf 6) à une augmentation du risque de cancer du sein chez les jeunes utilisatrices, actuelles et récentes, de contraceptifs œstro-progestatifs. "Il s'agit d'un petit excès de risque, sans que l'on puisse exclure un biais de dépistage et de surveillance. Les données disponibles ne permettent pas de conclure non plus quant au type d'association œstro-progestative. En revanche, le risque lié à la prise d'un contraceptif oral durant la période de fertilité diminue après la ménopause". Quant à la contraception progestative seule, les résultats des études ne permettent pas de conclure.
-› Les travaux de ces dernières années ont modifié la donne par rapport au traitement hormonal de la ménopause (THM). En effet, selon la méta-analyse d'Oxford (Lancet 1997) et l'étude WHI (JAMA 2003), le THM combiné induit un sur risque de cancer de sein, avec un risque relatif de 1,35 pour la première et 1,24 pour la seconde, le risque disparaissant à l'arrêt du THM. Mais dans l'étude française de l'Inserm E3N (7), le risque varie selon le type de progestatif utilisé (acétate de médroxyprogestérone dans l'étude WHI). Ainsi, le risque relatif est de 1 avec la progestérone naturelle, 1,16 avec la dydrogestérone et 1,69 avec les autres progestatifs. Une autre étude française, MISSION (8), conclut de façon similaire à l'absence de sur risque avec les schémas de THM tels sont menés dans notre pays. Aucune différence n'est retrouvée en fonction du mode d'administration, oral ou transcutané, ou de la durée de traitement.
Par ailleurs, l'analyse des résultats concernant le sous-groupe des femmes hystérectomisées de l'étude WHI (9), ayant reçu des estrogènes conjugués équins seuls, montre une réduction du risque sénologique (RR = 0,80) au bout de 7,1 ans de suivi, ce bénéfice persistant après 10,7 ans (RR = 0,77) (10).
"In fine, le THM ne crée probablement pas de cancer du sein, mais peut accélérer la vitesse de croissance de cellules cancéreuses préexistantes. Le risque est très réduit si l'on opte pour la progestérone naturelle ou des molécules proches (dydrogestérone), en association avec l'estradiol".
-› Des premières règles précoces, un âge avancé à la ménopause, la nulliparité ou la primiparité, une première grossesse tardive, l'absence d'allaitement élèvent également le risque.
La morphologie
-› Un poids de naissance élevé pourrait constituer un facteur de risque, de même qu'une grande taille (vie entière).
-› Les petites filles "rondes" avant la puberté développent ensuite moins de cancers du sein que les enfants maigres, mais l'accroissement rapide de taille à la puberté élève le risque.
-› Le surpoids et l'obésité (gynoïde) sont plutôt protecteurs avant la ménopause tandis qu'ils élèvent le risque une fois la femme ménopausée. L'obésité androïde (adiposité abdominale) augmente le risque avant et après la ménopause.
L'environnement
-› Une alimentation grasse et sucrée est un facteur de risque (attention aux graisses hydrogénées incluses dans les plats industriels), de même que l'abus d'alcool.
-› Selon l'étude française E3N (11), la vitamine D exerce des effets protecteurs, ce que ne retrouve pas une méta-analyse allemande (12).
-› Si le nombre de mammographies n'influence pas le risque de cancer du sein – "on admet un seuil maximum de 50 mammographies dans une vie" -, il n'en va pas de même en cas d'irradiation du thorax dans la maladie de Hodgkin (3).
-› Les xéno-estrogènes organochlorés ont aussi été mis en cause, de même que le travail de nuit (décalage horaire).
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