Le profil lipidique chez le diabétique de type 2 associe une augmentation des triglycérides plasmatiques et une diminution du taux de HDL-cholestérol, le taux de LDL-cholestérol étant quant à lui normal ou légèrement augmenté. Outre ces anomalies quantitatives, il existe des anomalies qualitatives des lipoprotéines, à caractère très athérogène, avec notamment des VLDL de grande taille et des LDL petites et denses (voir encadré E2).
Cette dyslipidémie est retrouvée chez 65 à 80 % des diabétiques de type 2 (10) et précède souvent le diabète de plusieurs années. Cependant, selon la dernière étude Entred (2), le profil lipidique de ces patients s'est amélioré depuis 2001, avec un taux de LDL-cholestérol moyen égal à 1,06 g/l (soit - 0,18 g/l par rapport à 2001), un HDL-C à 0,52 g/l et des triglycérides à 1,52 g/l.
L'interprétation du bilan lipidique
› La recherche (ou le contrôle) d'une anomalie lipidique doit être effectuée chaque année (9). En pratique, on dose le cholestérol total, les triglycérides et le HDL-cholestérol, et l'on déduit le taux de LDL-cholestérol grâce à la formule de Friedewald. Celle-ci ne peut s’appliquer que lorsque le taux de triglycérides est inférieur à 4 g/l, seuil au-delà duquel il est possible de procéder au dosage direct du LDL-cholestérol (11).
› Lorsqu'une anomalie lipidique est mise en évidence, il faut préciser s'il s'agit d'une hyperlipidémie familiale associée au diabète, d'une dyslipidémie diabétique typique ou d'une dyslipidémie secondaire. La 1re se présente généralement sous forme d'hypercholestérolémie avec augmentation du LDL-C ou de dyslipidémie mixte. La deuxième réunit les critères déjà cités : hypertriglycéridémie, hypo-HDL-cholestérolémie. La troisième nécessite d'éliminer une hypothyroïdie, une cholestase, une insuffisance rénale ou un syndrome néphrotique, ou encore une origine médicamenteuse.
Les valeurs cibles
Les valeurs cibles des différents paramètres lipidiques présentent quelques nuances selon les sources.
› En 2007, le consensus européen ESC-EASD (12) recommande pour les diabétiques en prévention secondaire de prescrire une statine quel que soit le taux initial de LDL-cholestérol afin de l'abaisser en dessous de 0,70-0,77 g/l ; et en dehors des situations de prévention secondaire, d'introduire une statine lorsque le cholestérol total dépasse 1,35 g/l, le but étant de réduire de 30 à 40 % le taux de LDL-cholestérol. S'agissant des triglycérides, l'objectif est de les abaisser en dessous de 1,77 g/l.
› En 2011, les recos européennes sur la prise en charge des dyslipidémies (11) fixent à 0,70 g/l le seuil de LDL-cholestérol à ne pas dépasser pour les diabétiques de type 2 en prévention secondaire ainsi que pour les diabétiques en prévention primaire de plus de 40 ans ayant au moins un facteur de risque cardiovasculaire additionnel ou une atteinte des organes cibles. Si l'objectif ne peut être atteint, on admet une réduction de 50 % du taux initial avant traitement. Chez les autres patients, la valeur cible du LDL-cholestérol est de 1 g/l. S'agissant des triglycérides, les auteurs ne se prononcent pas fermement sur la valeur à atteindre, mais indiquent qu'une valeur inférieure à 1,50 g/l est souhaitable. Cependant, l'introduction d'un traitement pharmacologique n'est envisagée que chez les sujets à haut risque cardiovasculaire ayant une triglycéridémie supérieure à 2 g/l après échec des mesures hygiéno-diététiques.
› En 2013, les guidelines américains sur la prise en charge du diabète (8) fixent elles aussi le seuil de LDL-cholestérol à 0,70 g/l pour les patients diabétiques en prévention secondaire. Dans les autres cas, la valeur cible est de 1,00 g/l. Si l'objectif ne peut être atteint malgré la dose maximale de statine tolérée, on peut se contenter d'une réduction de 30 à 40 % du taux initial. Pour les triglycérides, il est recommandé d'abaisser leur taux en dessous de 1,50 g/l. Le HDL-cholestérol quant à lui doit être supérieur à 0,40 g/l chez l'homme et supérieur à 0,50 g/l chez la femme.
Stratégie thérapeutique
› Les mesures hygiéno-diététiques font partie intégrante de la prise en charge de tous les diabétiques, qu'ils reçoivent ou non un traitement pharmacologique. « Une perte de poids modérée, de 5 à 10 %, chez les diabétiques de type 2 très souvent en excès pondéral, contribue en effet fortement à améliorer le profil lipidique. »
› Dans tous les cas, l'amélioration de l'équilibre glycémique doit être recherchée car elle permet souvent de réduire l'hypertriglycéridémie et d’améliorer le taux du HDL-cholestérol (voir encadré sur « Les objectifs glycémiques » sur legeneraliste.fr).
› Toutes les recommandations donnent la priorité à la baisse du LDL-cholestérol, sauf en cas d'hypertriglycéridémie majeure exposant au risque de pancréatite aiguë.
› Lorsqu'un traitement médicamenteux est envisagé, il convient d'abord de déterminer de combien l'on souhaite réduire le LDL-C (11) en prenant comme objectifs les valeurs cibles recommandées. Une fois déterminée cette réduction, le choix de la statine dépend de la puissance respective de chaque molécule. On peut se référer pour cela à la fiche de bon usage du médicament publiée par la HAS, relative au choix de la statine la plus efficiente dans chaque situation (13).
› Si l'objectif n'est pas atteint sous statine, il est possible de lui associer un autre hypolipémiant (ézétimibe, fibrate, acide nicotinique), cette option n'étant cependant pas retenue par les derniers guidelines américains (8). Attention à l'association statine-fibrate, qui nécessite une surveillance hépatique, rénale et musculaire.
› La dyslipidémie typique du diabétique (hypertriglycéridémie + hypo-HDL-cholestérolémie) correspond au profil d'action des fibrates. L'étude FIELD (14), menée chez près de 10 000 diabétiques de type 2 avec le fénofibrate, s'est montrée décevante à cet égard, en ne réduisant pas de façon significative le risque d'événements coronariens. Mais l’étude ACCORD (15) a montré que chez les diabétiques de type 2 dont le LDL-cholestérol a été amené à 1 g/l en moyenne sous simvastatine, l’addition du fénofibrate a permis de réduire les événements cardio-vasculaires chez les patients qui conservaient le profil triglycérides élevés-HDL cholestérol bas (profil dit de « dyslipidémie athérogène »).
« En pratique, lorsque l’objectif de LDL-cholestérol est atteint spontanément ou sous statine, la persistance d’un profil athérogène doit conduire à renforcer les mesures hygiéno-diétététiques et à améliorer le contrôle glycémique. Le recours au diabétologue peut être utile, et cela surtout si une association à un fibrate est envisagée. Il faut noter que dans l’étude ACCORD, l’association simvastatine-fénofibrate n’a pas généré d’effets indésirables significatifs. »
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