CHAPITRE 4 : LES THROMBOSES VEINEUSES SUPERFICIELLES

Publié le 29/05/2015
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Les thromboses veineuses superficielles (TVS) des membres inférieurs ont longtemps été considérées comme une pathologie banale sans gravité, ainsi que les anciennes dénominations de péri- ou paraphlébites, qui doivent être abandonnées, le laissaient entendre. L’incidence annuelle exacte, mal connue, serait de 0,6 % (environ 250 000 cas chaque année en France) soit moitié moins que les TVP.

› Les facteurs de risque sont communs avec la maladie veineuse thrombo-embolique: immobilisation, obésité, cancer, âge entre 40 et 60 ans, sexe féminin, grossesse et post-partum, antécédents thrombo-emboliques, thrombophilie...

› Les signes cliniques sont souvent évocateurs : typiquement, un placard sous-cutané inflammatoire très douloureux, circonscrit ou prolongé par un cordon veineux induré (parfois de plusieurs dizaines de centimètres), sensible et violacé. La forme habituelle survient sur un terrain variqueux, car l'association "altération pariétale, stase veineuse et hypercoagulabilité" (triade de Virchow) est particulièrement favorable à la thrombogénèse. Cependant, il existe aussi des TVS sur des veines saines. La veine la plus concernée est la grande saphène.

› Quelle est la gravité des thromboses veineuses superficielles ? Une TVP asymptomatique est découverte chez 20 voire 30 % des patients porteurs d’une TVS et une EP asymptomatique chez 5-10% d’entre eux, d’où la potentielle gravité de la situation. Dans quelques cas, il existe une continuité entre la TVS et la TVP au travers d’une crosse saphène ou d’une veine perforante ; parfois, la TVP est à distance voire controlatérale.

Les TVS survenant sur veines « saines » seraient le plus souvent symptomatiques d’une affection sous-jacente, d’autant plus qu’elles sont récidivantes ou migratrices : cancer, maladie de Behçet ou de Buerger, thrombophilie. Les TVS sur veines variqueuses constituent le plus souvent une complication évolutive, mais il n’est pas exceptionnel qu’elles soient révélatrices d’une néoplasie sous-jacente, en particulier les thromboses extensives, non limitées à une ampoule variqueuse.

› La récidive thrombotique après TVS survient chez 3 à 20 % des patients. Elles peuvent prendre la forme d’une nouvelle TVS, mais également d’une TVP ou d’une EP. Une TVS n'est donc pas un événement anodin.

› Devant une suspicion clinique de TVS, la réalisation d’un écho-Doppler en urgence est indispensable afin :

– d’affirmer le diagnostic de TVS ;

– définir la localisation précise et l’extension de la TVS, souvent très sous-estimée par l’examen clinique. Les TVS courtes (≤ 5 cm), survenant sur une ampoule ou un cordon variqueux n'affectant pas le tronc saphène, sont « à bas risque », tandis que les TVS extensives (›5 cm), les thromboses massives de varices saphènes, ou situées à trois cm ou moins de la jonction saphéno-fémorale, sont « à haut risque », avec une prise en charge différente.

– et, surtout, rechercher une éventuelle TVP associée.

› Jusqu’à récemment, les anticoagulants étaient utilisés de façon hétérogène dans les TVS: HBPM à doses préventives de durées variables, à doses curatives, avec ou sans relais par AVK, etc. L'utilisation d'anticoagulants pendant 10 à 30j, à doses préventives comme curatives, expose à un phénomène de rebond. En 2010, l'étude CALISTO a montré le bénéfice du fondaparinux à doses prophylactiques pendant 45 jours face au placebo. Suite à ce travail, le fondaparinux 2,5 mg/j a obtenu l'AMM dans le traitement des TVS symptomatiques isolées des membres inférieurs, de plus de 5 cm sans atteinte de la jonction saphéno-fémorale. Cependant pour la Commission de Transparence de la HAS, ce traitement n’améliore pas le service médical rendu, compte-tenu de l'hétérogénéité de la population concernée par la TVS isolée.

Dans le cas particulier des TVS étendues à la jonction saphéno-fémorale ou saphéno-poplitée, un anticoagulant à dose curative pendant 3 mois est recommandé (avis d’experts).

› La compression élastique reste un pilier important de la prise en charge. La marche doit être promue. Les AINS, par voie orale ou percutanée, permettent une diminution des signes locaux mais n’ont pas d’action sur le processus thrombotique.

› Une fois la phase aiguë résolue, la peau en regard de la thrombose peut prendre une pigmentation brun sale (qui disparaît en général au bout d’un an, tandis que la veine thrombosée subit une involution fibreuse.



Source : Le Généraliste: 2723