Repères patient

Comprendre et traiter la constipation

Publié le 27/05/2016
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Le traitement du trouble repose sur l’identification du mécanisme responsable en fonction duquel un traitement adapté sera prescrit.

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J'EXPLIQUE

> Le transit intestinal s’effectue par la progression colique des fèces et leur évacuation rectale. Au niveau du côlon, la propagation de contractions d’amplitude et de fréquence différentes permet la progression des fèces jusqu’au rectum.

> La défécation est initiée par un besoin exonérateur déclenché par l’arrivée des matières dans l’ampoule rectale. La distension rectale occasionnée stimule des mécanorécepteurs locaux. Le réflexe recto-anal inhibiteur s’active et permet le relâchement du sphincter interne (SI) au contraire du réflexe recto-anal excitateur contractant le sphincter externe (SE) réalisant ainsi la continence volontaire. Au-delà d’un certain volume et par manœuvre de Valsalva, la pression intra-rectale augmente, le muscle pubo-rectal ainsi que le SE se relâchent permettant le passage des selles vers l’anus.

> On définit la constipation par l’émission de selles peu fréquentes (< 3 par semaine) depuis au moins six mois.

> En cas de réduction de l’activité motrice colique, le transit se ralentit et définit la constipation de transit.

> Les troubles de l’évacuation rectale, dyschésie, définissent la constipation terminale. On les rencontre en cas de troubles sphinctériens (contraction du SE à l’effort de poussée, relaxation insuffisante du SI dite hypertonie anale instable), d’hyposensibilité rectale par mégarectum acquis ou congénital (maladie de Hirschsprung), d’hypocontractilité rectale (syndrome de la queue-de-cheval) ou en cas de troubles de la statique pelvienne qui modifient l’anatomie du plancher pelvien.

> Dans la constipation terminale (13 à 20 %), le patient ressent une sensation d’évacuation incomplète le contraignant souvent à des manœuvres digitales d’évacuation. Le toucher rectal systématique retrouve alors des selles dans l’ampoule et apprécie le tonus sphinctérien.

JE PRESCRIS

> Des règles d’hygiène défécatoire : la répression volontaire répétée du besoin exonérateur entraîne la désensibilisation rectale et la modification du comportement défécatoire favorisant la constipation chronique. Il faut donc encourager à respecter les sensations de besoin. En parallèle, une position adéquate aide à l’action propulsive des muscles abdominaux pelviens : flexion des jambes sur l’abdomen, toilettes à la turque et marchepied. Hydratation, activité physique et fibres n’ont pas prouvé leur efficacité (recommandations de grade C).

> Un laxatif osmotique (lactulose, sorbitol, macrogol) et un laxatif de lest (mucilage) ramollissant les selles s’emploient dans la constipation de transit avec une augmentation progressive des doses. Les laxatifs par voie rectale stimulant le réflexe de défécation et les laxatifs lubrifiants (paraffine liquide) s’emploient dans la constipation terminale.

> L’utilisation en seconde ligne de laxatif stimulant (anthraquinonique, polyphénolique) est recommandée sous surveillance médicale (risque de maladie des laxatifs).

> Ce n’est qu’en cas de constipation réfractaire (échec des laxatifs, <1 selle/semaine, altération de la qualité de vie), qu’il est utile de pousser les investigations par un temps de transit aux marqueurs radio-opaque, une manométrie ano-rectale et une défécographie ou déféco-IRM (si trouble de la statique pelvienne).

> En cas d’anisme (contraction paradoxale du SE lors de l’effort de poussée), le biofeedback de relâchement, efficace dans 70 % des cas, sera proposé en deuxième intention après un traitement par laxatif.

> Le prucalopride (Resolor®), agoniste sélectif des récepteurs sérotoninergiques 5-HT4, est indiqué en cas de constipation sévère. Il stimule le péristaltisme avec une efficacité de 50 % des cas.

J'ALERTE

> La fausse diarrhée du constipé (alternance diarrhée-constipation) peut révéler une constipation et s’améliore avec les mucilages.

> Les efforts de poussée répétés favorisent l’affaissement du plancher pelvien et contribuent au développement de l’incontinence fécale (soiling).

> Attention aux signes d’alerte imposant des examens complémentaires : antécédent personnel de cancer gynécologique ou colique, rectorragies, anémie, amaigrissement, constipation sévère ne répondant pas au traitement, aggravation d’une constipation chronique sans cause évidente.

> Éliminer la constipation symptôme d’une cause organique (obstruction colique), endocrinienne (hypothyroïdie, insuffisance rénale, hypercalcémie, diabète…), neurologique (dysautonomie, maladie de Parkinson…) ou iatrogène.
 

JE RENVOIE SUR LE NET

http://www.proktos.com

 

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Dr Charlotte Mouly avec le Pr Benoit Coffin, chef du Service d'Hépato-Gastroentérologie, Hôpital Louis Mourier, Colombes

Source : Le Généraliste: 2761