«Mr Philippe N., 63 ans, se lève de plus en plus souvent la nuit pour aller aux toilettes et sa femme lui conseille de consulter. Mais il ne veut pas en entendre parler. C’est l’âge ! lui répond-il»
Recherche active des symptômes mictionnels
Phénomène fréquent chez les hommes après 50 ans, l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) concerne 20 % des hommes autour de 40 ans et 50 % après 70 ans. Mais les symptômes mictionnels d’une HBP - qu’ils soient irritatifs (pollakiurie, impériosité) et/ou obstructifs (dysurie, diminution du jet, gouttes retardataires) - sont rarement évoqués spontanément sauf s’ils deviennent très gênants au quotidien. De plus, de par l’évolution lente de l’affection, les patients ont tendance à s’adapter à ces troubles mictionnels et les acceptent avec fatalité.
Or les médecins se basent en priorité sur les plaintes du patient pour rechercher une HBP. Ils n’effectuent donc pas cette recherche face à un patient qui ne se plaint pas. C’est pourquoi il est utile de rechercher activement ces symptômes mictionnels chez tout patient d’âge mûr, en posant directement des questions comme « vous levez-vous la nuit pour aller aux toilettes ? », « combien de fois par nuit ? » ou « devez-vous pousser pour uriner ? ». On peut aussi utiliser le score I- PSS, qui est actuellement le questionnaire le plus utilisé pour l’évaluation initiale et le suivi des symptômes de l’HBP, avec ou sans traitement.
En revanche, si des réticences se manifestent nettement face à cette recherche active, il faut là aussi les respecter dans un premier temps pour laisser le temps à la réflexion et les lever peut-être dans un second temps.
Une menace à la masculinité
Chez l’homme, la prostate est souvent investie de représentations ayant trait à la masculinité, la fertilité et la virilité et toute pathologie la concernant constitue alors une menace. Certains préféreront faire l'autruche et ne pas consulter. Par ailleurs, « le genre du médecin, homme ou femme, semble aussi influer sur les réticences du patient, qui hésitera d’autant plus à en parler si son médecin est une femme » évoque le Dr Marie-Anne Puel, généraliste-enseignante et membre de la Société Médicale Balint.
Le problème du toucher rectal
Il est recommandé de faire le diagnostic positif d’HBP à partir du contexte clinique, de
l’interrogatoire, de l’absence d’autre cause, mais aussi du résultat du toucher rectal. Aborder ce dernier examen est délicat, tant pour le patient que pour le médecin. Pour le patient, le TR est souvent embarrassant car il transgresse les codes sociaux habituels. De son côté le médecin, homme ou femme, peut aussi, du fait de son éducation, de sa pudeur ou de sa religion, ressentir des réticences à réaliser cet examen. Des freins à repérer, à surmonter éventuellement ou à respecter en prenant soin de ne pas faire perdre son temps au patient. « C’est pourquoi, comme je suis réticente à réaliser des TR, je n’hésite pas adresser mes patients à un urologue qui a l'expérience de ce geste clinique » illustre le Dr Marie-Anne Puel.
Comment lever les réticences du patient au TR?
La première attitude à avoir est de garder la bonne distance thérapeutique en expliquant avec des mots médicaux ce qu’on va faire et pourquoi on va le faire, en utilisant le cas échéant des schémas explicatifs, et en évitant aussi les plaisanteries douteuses. Enfin si les réticences sont vraiment fortes au TR, mieux vaudra indiquer une consultation urologique avec une prescription de PSA/ECBU et une échographie transrectale que de différer encore la prise en charge des symptômes urinaires.
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