DIAGNOSTIC

Publié le 27/06/2014
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Le diagnostic d’une tendinopathie est clinique. Les examens paracliniques sont utiles pour le diagnostic différentiel ou étiologique, pour rechercher des lésions associées ou avant un traitement de deuxième intention ou invasif.

Diagnostic clinique

Le diagnostic clinique d’une tendinopathie est facile à condition de connaître l’anatomie descriptive et fonctionnelle. L’interrogatoire est un temps essentiel et permet souvent d’établir le diagnostic avant l’examen physique qui précisera le tendon en cause et son état fonctionnel.

› Les signes fonctionnels d’une tendinopathie sont la douleur et l’impotence fonctionnelle. Dans les tendinopathies superficielles s’ajoutera une tuméfaction sous-cutanée secondaire à une souffrance de l’environnement tendineux (épanchement bursal, d’une gaine synoviale, épaississement d’un rétinaculum) rarement accompagnée d’une rougeur ou d’une augmentation de la chaleur locale, signes inflammatoires locaux qui devront faire suspecter une pathologie infectieuse ou microcristalline. Ce sont habituellement la bursite ou la ténosynovite associée qui génèrent le plus de douleur et le soulagement de celle-ci par une infiltration dans la bourse ou la gaine synoviale ne doit pas faire négliger la lésion tendineuse sous-jacente.

› La douleur débute progressivement, après un effort physique plutôt que pendant. Il est rare que le patient consulte dès le début des symptômes. Une impotence fonctionnelle brutale secondaire à une rupture d’un tendon sera exceptionnellement le motif de consultation et de découverte de la tendinopathie. En revanche, l’exacerbation d’une douleur chronique, parfois au décours d’une infiltration, doit faire suspecter une rupture aiguë sur tendinose. La poursuite de l’activité fera que cette douleur surviendra de plus en plus tôt pendant l’effort pour finalement l’empêcher et pourra alors persister dans la vie courante.

L’interrogatoire précise le siège de la douleur, ses irradiations parfois trompeuses, l’horaire qui peut être mécanique, inflammatoire ou mixte, le mode et les circonstances de début, le retentissement fonctionnel, les causes ou mouvements déclenchants et des facteurs favorisants éventuels. Il apprécie le mode évolutif depuis les premiers symptômes et les traitements éventuels entrepris. Enfin, on note les antécédents, le mode de vie, et chez les sportifs, le niveau de pratique, les conditions d’entraînement, la qualité de l’échauffement, du matériel utilisé, de l’ancienneté de son renouvellement ou des modifications récentes. En milieu professionnel, on se renseigne sur le rythme et l’ergonomie du poste de travail.

L’examen physique comporte un temps d’inspection et de palpation et sera comparatif. L’inspection apprécie la morphologie générale, la qualité de la peau, la trophicité musculaire, la présence éventuelle d’une tuméfaction et la façon dont le patient utilise le membre concerné.

Certaines tendinopathies superficielles permettent de palper ou de percevoir un crépitement ou des signes inflammatoires péritendineux (paraténonite).

La palpation se limite dans un premier temps à percevoir une augmentation de la chaleur locale, un crépitement, un ressaut, un épaississement nodulaire (tendon calcanéen), un défect (rupture fasciculaire) dans les ténosynovites et tendinopathies superficielles, mais ne cherche pas à palper d’emblée le tendon suspecté pour ne pas parasiter les tests isométriques et de conflit en réveillant la douleur. Secondairement, on palpera l’enthèse et le corps du tendon, puis la jonction myotendineuse.

› Le diagnostic de tendinopathie peut être affirmé si l’examen parvient à reproduire la douleur du patient par trois manœuvres (triade tendineuse) : lors de la mise en tension du tendon par un étirement passif aussi sélectif que possible, lors de la contraction résistée (contre une résistance exercée par l’examinateur) et à la palpation du tendon. La contraction résistée sera au mieux testée en course externe, c’est-à-dire en position d’étirement infradouloureux. Il existe de nombreux tests décrits pour chaque tendon. On distinguera un test isométrique positif sur la douleur ou sur la faiblesse, ce déficit pouvant être dû à la douleur ou témoigner d’une rupture du tendon. À côté des tests isométriques existent des tests de conflit cherchant à reproduire la douleur par une manœuvre mettant le tendon en situation de coincement ou de conflit intrinsèque (coiffe des rotateurs, tendons du moyen et du petit glutéal).

› L’examen physique ne s’arrête pas là et doit s’assurer d’une mobilité normale des articulations du membre concerné (perte d’amplitude d’un ou plusieurs mouvements ou au contraire hypermobilité uni- ou multidirectionnelle), de l’intégrité des vaisseaux et des nerfs et rechercher une lésion associée.

Diagnostic paraclinique

Les examens complémentaires reposent sur l’imagerie et la biologie. L’imagerie est utile soit rapidement lorsque l’on suspecte une rupture tendineuse qui pourra nécessiter un traitement urgent (par exemple tendon calcanéen, long extenseur du pouce, tendon quadricipital, tibial antérieur) car cette rupture non réparée pourra être fonctionnellement pénalisante. Certaines ruptures tendineuses n’auront pas ou peu de conséquences fonctionnelles définitives (long biceps brachial, petit glutéal ou lame latérale du moyen glutéal).

La radiographie standard, inutile au diagnostic positif d’une tendinopathie, sert au diagnostic différentiel et à la recherche d’une calcification d’apatite.

L’échographie (fig. 1, 1 bis et 2a) est devenue indispensable à la prise en charge des tendinopathies. Si cet examen est de plus en plus souvent pratiqué par le clinicien qu’il soit urgentiste, médecin du sport, rhumatologue ou médecin rééducateur, il doit être couplé à la radiographie standard. Le couple radiographie-échographie est suffisant dans la très grande majorité des tendinopathies, mais cette imagerie n’est pas toujours utile avant un traitement de1re intention, si le diagnostic clinique est certain.
 

[[asset:image:1496 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["Echographie en mode B coupe axiale de deux cas de t\u00e9nosynovite de De Quervain montrant l\u0027\u00e9paississement du r\u00e9tinaculum du premier compartiment des extenseurs (fl\u00e8che) avec les deux formes anatomiques.\r\nType I, les deux tendons (court extenseur et long adbucteur du pouce) cheminent ensemble dans ce compartiment."]}]][[asset:image:1501 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["Type II, un septum (t\u00eate de fl\u00e8che) s\u00e9pare les deux tendons avec une atteinte pr\u00e9dominant sur le court extenseur (*). \r\nCette forme anatomique est plus r\u00e9sistante au traitement m\u00e9dical et plus fr\u00e9quemment chirurgicale."]}]][[asset:image:1506 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["Echographie mode b d\u0027une tendinopathie du biceps brachial au coude chez une femme de 61 ans, montrant l\u0027\u00e9paississement hypo\u00e9chog\u00e8ne du tendon qui \u00e9tait entour\u00e9 d\u0027une bursite; tendinopathie peu fr\u00e9quente et pouvant \u00e9voluer vers une rupture tendineuse sous-estim\u00e9e cliniquement et r\u00e9parable chirurgicalement."]}]]


› L’échographie nécessite un matériel d’excellente qualité avec une sonde de haute fréquence pour les tendons superficiels et un opérateur expérimenté en pathologie musculo-squelettique. Cet examen non irradiant, peu coûteux, sans danger et facile d’accès apporte à la fois des renseignements sur l’état du tendon et ses structures adjacentes (bourses, gaine synoviale, rétinaculums) et sur les parties molles environnantes, la corticale osseuse et l’articulation voisine (épanchement, synovite, corps étranger, calcifications). Il permet aussi une étude dynamique très intéressante et impossible avec les autres techniques, notamment pour mettre en évidence un conflit, une rupture ou une instabilité tendineuse. Elle peut être utile dans le suivi évolutif, mais il n’y a pas toujours de corrélation entre les lésions échographiques et la clinique. L’échographie n’est pas fiable pour juger de la reprise sportive.

 

L’IRM est aussi un excellent examen, mais sa résolution spatiale est très inférieure à celle de l’échographie et la structure même du tendon ne peut être appréciée comme en échographie. L’IRM est surtout utile en cas de résistance au traitement médical avant une décision chirurgicale, appréciant mieux que l’échographie la qualité musculaire dans les tendons profonds (hanche). En revanche, elle ne visualise pas bien les calcifications, et en l’absence de radiographie ou d’échographie, un faux diagnostic de rupture tendineuse peut être porté en cas de rhumatisme à apatite.

[[asset:image:1511 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["IRM du coude de la m\u00eame patiente en T2 avec saturation de la graisse, montrant la bursite p\u00e9ritendineuse (t\u00eate de fl\u00e8che) et un aspect bifasciculaire du tendon (fl\u00e8che).\r\nCoupe particuli\u00e8re dite en position FABS."]}]][[asset:image:1516 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["IRM du coude en coupe sagittale."]}]][[asset:image:1521 {"mode":"small","align":"center","field_asset_image_copyright":[],"field_asset_image_description":["IRM du coude en coupe axiale."]}]]


› Un examen biologique n’est prescrit qu’en cas de suspicion d’une cause non mécanique. En première intention, on demande un hémogramme, une vitesse de sédimentation globulaire, une protéine C réactive, et dans les enthésopathies inflammatoires des membres inférieures, selon l’âge et le contexte clinique une uricémie et une recherche de l’antigène HLA B27.

Diagnostic étiologique

La principale étiologie des tendinopathies est mécanique ou dégénérative. Les tendinopathies inflammatoires ou rhumatismales se voient surtout dans la polyarthrite rhumatoïde (ténosynovites) et les spondylarthropathies inflammatoires (enthésites et enthésopathies ossifiantes). Les tendinopathies métaboliques sont principalement microcristallines et s’observent aussi bien dans la goutte, dans le rhumatisme apatitique que dans la chondrocalcinose.

› Les tendinopathies de surcharge se résument à la xanthomatose et à l’amylose. Les tendinopathies infectieuses sont rares, les ténosynovites d’inoculation (phlegmon des gaines) et le rhumatisme gonococcique étant les principales étiologies. La pathologie tumorale des tendons est très rare, presque toujours bénigne (synovite villonodulaire, fibrome, hémangiome, lipome, chondromatose), la pathologie maligne étant exceptionnelle (sarcome synovial, sarcome à cellules claires des tendons). Des ténosynovites à corps étrangers ont été décrites. Enfin des tendinopathies iatrogènes peuvent être provoquées par une corticothérapie générale ou locale, par les fluoroquinolones et les statines.

 

› Diverses maladies, sans être cause directe de tendinopathies, peuvent être fragilisantes pour le tendon. Il s’agit du diabète, des maladies de l’axe corticosurrénalien, de l’hyperparathyroïdie, de l’hypothyroïdie, de l’insuffisance rénale chronique, de l’amylose, des rhumatismes inflammatoires et des maladies auto-immunes (maladie lupique) et des rhumatismes microcristallins. Des affections héréditaires sont aussi à rechercher en cas de pathologie tendineuse multiple. Citons principalement les maladies où l’hyperlaxité ligamentaire généralisée est habituelle ou fréquente (syndromes d’Ehlers-Danlos, de Marfan, ostéogenèse imparfaite) et les maladies de surcharge.



Source : Le Généraliste: 2689