> Une récente étude du NEJM (1) remet sur le devant de la scène la question de l’âge auquel il convient de diversifier l’alimentation des nouveau-nés bien portants nourris au sein afin de prévenir le risque d’allergie alimentaire. Cette étude, bien nommée EAT (Enquiring about Tolerance) a porté sur 1303 nourrissons âgés de 3 mois exclusivement nourris au sein randomisés en 2 groupes : poursuite de l’allaitement maternel exclusif jusqu’à 6 mois ou introduction précoce de 6 aliments (arachide, lait de vache, sésame, poisson, blé) et poursuite de l’allaitement au sein.
> À l’âge de 3 ans, la fréquence de l’AA à l’un ou l’autre des aliments introduits précocement n’était pas statistiquement différente dans les 2 groupes : 7,1 % (introduction précoce) vs. 5,6 % (allaitement au sein exclusif).
On notera que tous les nourrissons avaient eu des prick tests (PT) avant l’entrée dans l’étude : ceux dont le PT positif avait été suivi d’un test de provocation oral (TPO) également positif furent exclus. Surtout près de la moitié (42,8 %) des enfants du groupe « introduction précoce » avait eu des difficultés à suivre l’étude, contre 92,9 % dans le groupe « sein exclusif ». Une analyse per-protocole ne tenant compte que des nourrissons « qui n’avaient pas eu trop de difficultés à suivre l’étude » montrait une plus faible fréquence des AA à l’arachide (0 % vs 2,5 %, p=0,003) et à l’œuf (1 % vs 5,5 %, p=0,009).
Cette étude rigoureuse et prospective confirme donc que l’on peut introduire tous les aliments, y compris les plus allergisants, chez l’enfant sain toujours allaité dès 3-4 mois, sans pour autant réduire la fréquence des AA à ces aliments à l’âge de 3 ans, mis à part un effet préventif pour l’œuf et l’arachide si ces aliments sont consommés tôt et à dose suffisante.
> Auparavant, l'étude LEAP (2) a randomisé 640 nourrissons de 4 à 11 mois allergiques à l'œuf et/ou porteurs d’un eczéma sévère – mais à prick-test négatif à l’arachide - pour recevoir en double aveugle de l’arachide (cacahuète). Elle a montré que la prévalence de l’AA à l’arachide a été de 13,7 % dans le groupe qui avait évité de consommer de l’arachide vs 1,9 % dans celui qui en avait consommé précocement, soit une réduction du risque allergique de 6,2 fois. Une autre étude, LEAP-ON (3), a consisté à arrêter l’arachide chez tous les enfants pendant un an : l’AA à l’arachide fut moins fréquente dans le groupe qui avait consommé précocement cette protéine (4,6 % vs. 18,6 %).
> En conclusion, il est donc possible et souhaitable d’introduire, dès l’âge de 4 mois, chez l’enfant normal tous les aliments y compris ceux qui sont réputés les plus allergisants (lait, œuf, arachide, poisson, blé, etc.). Mais pour ceux qui ont une allergie précoce ou sont à risque d’en avoir une (atteints de dermatite atopique ou ayant des antécédents familiaux allergiques) c’est tout autre chose : pas question de les soumettre à une « induction de tolérance sauvage » sans bilan allergologique préalable, donc sans prise d’un avis d’expert
1- N Engl J Med 2016; 374:1733-1743.
2- New Engl J Med 2015; 372(9) : 803-13.
3- N Engl J Med. 2016 14 ; 374(15):1435-43.
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Mise au point
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