Repères patient

Du bon usage des laxatifs

Publié le 19/06/2015
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La constipation est souvent un trouble anodin, et plus de 150 spécialités sont disponibles sans ordonnance. Cependant, les patients doivent connaître les signes d’alerte, les indispensables règles hygiéno-diététiques et les laxatifs à utiliser préférentiellement.

J’EXPLIQUE

• On parle de constipation lorsqu’il y a moins de 3 selles/semaine, mais aussi en cas de difficulté à exonérer (efforts de poussée, sensation de gêne au passage de la selle, évacuation incomplète, selles dures, temps d’exonération anormalement prolongé, nécessité de manœuvres digitales), ou les deux.

• La constipation peut être passagère ou chronique (≥ 6 mois). La constipation passagère survient dans un contexte particulier : voyage, changement alimentaire, alitement, grossesse…

• Lorsque la constipation ne relève pas d’une maladie particulière, les règles hygiéno-diététiques (RHD) sont toujours prescrites. Dans les constipations secondaires, le traitement est d’abord celui de la cause.
 

J’INFORME

• De nombreux médicaments peuvent provoquer ou aggraver une constipation : « pansements » gastriques à base d’aluminium, certains traitements de l’HTA comme les diurétiques, dérivés de l’opium (antalgiques, antitussifs), certains antidépresseurs, le fer et beaucoup d’autres

• Chez certaines personnes, l’habitude de « se retenir » entraîne une perte du réflexe normal d’évacuation des selles.

• Les RHD sont primordiales. Les fibres végétales, non digérées, se gonflent d’eau, augmentent le volume des selles et accélèrent le transit. On les trouve dans les céréales complètes (son), les légumineuses, les légumes et fruits secs. Leur délai d’action est plus long que celui des laxatifs.

• Boire suffisamment, pratiquer une activité physique, se présenter à heure fixe à la selle, utiliser un marchepied sont peut-être utiles.

• Ce n’est qu’en cas d’échec de ces mesures que l’on envisage éventuellement un traitement médicamenteux.

• Les laxatifs osmotiques (PEG et macrogol ; lactulose, lactitol, mannitol, sorbitol) ramollissent les selles en attirant de l'eau dans l'intestin. Ils agissent après 1 ou 2 jours. Ils peuvent causer des douleurs et ballonnements, moindres avec le PEG et le macrogol. En automédication, ils ne représentent que 2 laxatifs sur 10.

• Les laxatifs de lest (mucilages : psyllium, ispaghul, gomme de sterculia, son de blé) forment un ballast qui retient l’eau dans la lumière intestinale. Ils nécessitent de boire suffisamment pour être actifs. Il faut 1 à 3 jours pour qu’ils agissent. Ils ont peu d’effets indésirables.

• Les laxatifs lubrifiants ou émollients (paraffine, vaseline) lubrifient le bol fécal en moins de 3 jours mais peuvent être responsables de suintements/irritations anaux. Leur usage prolongé peut réduire l'absorption des vitamines liposolubles.

• Les laxatifs stimulants (anthracéniques, bisacodyl, docusate et picosulfate de sodium, ricin, sels de magnésium, séné, bourdaine, cascara…) augmentent la motricité intestinale et provoquent une purge parfois suivie de plusieurs jours sans selles. Ils ne doivent être prescrits que sur une courte durée et dans des cas particuliers (sujet âgé, constipation réfractaire). Leur usage à plus long terme expose au risque d’hypokaliémie, d’accoutumance, d’ostéoarthropathies, de colites hémorragiques (séné) ou d’insuffisance cardiaque à l’arrêt du traitement.

• Les laxatifs par voie rectale (suppositoires et lavements) sont utiles en cas de troubles de l’évacuation, chez les sujets âgés ou atteints de pathologie neurologique. Ils agissent en 5-60 minutes.

• Certains compléments alimentaires ou tisanes contiennent plusieurs laxatifs associés, ce qui augmente le risque d’effets indésirables. « Phytothérapie » n’est pas garante d’innocuité.


JE PRESCRIS

• L’apport de fibres dans l’alimentation doit être majoré progressivement (en raison du risque de ballonnements) lpour atteindre 15 à 40 g/j en 2 prises quotidiennes au bout de 8 à 10 jours.

• En cas de constipation occasionnelle gênante : les laxatifs osmotiques permettent de rétablir un rythme des selles.

• En cas de constipation persistante : en première intention, un laxatif de lest ou osmotique.

• En cas de défécation difficile passagère : la glycérine par voie rectale permet de déclencher le réflexe de défécation.

• Un calendrier des selles sur 15 jours.
 

J’ALERTE

• Il est nécessaire de consulter d’emblée en cas de constipation survenant chez un patient de plus de 50 ans ou évoluant depuis plus de 6 mois; en cas d’antécédent familial de maladie digestive; de sang dans les selles, d’amaigrissement, d’anémie ; s’il y a moins d’une selle par semaine, des fuites fécales (encoprésie) ; s’il est suspecté que la constipation soit un effet secondaire médicamenteux ; en cas de maladie chronique (insuffisance rénale, diabète, Parkinson…), ou de grossesse et allaitement

• il sera nécessaire de consulter en cas de non-amélioration malgré les RHD et le laxatif de première intention

• En cas de fièvre et/ou douleurs abdominales, la consultation du médecin traitant doit avoir lieu le jour même. En cas de vomissements, douleurs abdominales, arrêt des gaz, il faut solliciter les services d’urgence.
 

JE RENVOIE SUR LE WEB

 

Synthèse bibliographique du Dr Jule Van den Broucke (Paris)

Source : lequotidiendumedecin.fr