En France, un peu plus d’un million de patients sont sous antivitamine K (AVK). Ces médicaments sont
la première cause d’effets indésirables graves : 17 000 hospitalisations et 5 000 décès/an (1).
› Des épidémiologistes canadiens ont mené une étude rétrospective sur bases de données pour isoler une éventuelle corrélation statistique entre fonction rénale et hémorragie grave sous antivitamine K (2). Pour cela, ils ont extrait de leurs bases de données un échantillon de 12 403 adultes âgés de plus de 65 ans atteints de fibrillation auriculaire ayant reçu une première prescription d’antivitamine K et disposant en même temps d’une mesure de leur fonction rénale. Ensuite, ils ont stratifié cet échantillon en 6 catégories de fonction rénale : ≥ 90, 60-89, 45-59, 30-44, 15-29 et 15 ml/mn/1,73 m2. Munis de ces informations, ils ont mené une analyse par régression de Poisson non ajustée, puis ajustée sur de très nombreux facteurs de confusion pertinents. Le critère de jugement était les hémorragies graves nécessitant une visite aux urgences ou une hospitalisation dans les 30 jours suivant la prescription, puis au cours d’un suivi médian de 2,1 ans.
› À 30 jours, le taux ajusté d’hémorragies graves pour 100 patients/année était de 6,1 (IC95 % = 1,9-19,4) pour les patients avec une fonction rénale ≥ 90 ml/mn, et de 63,4 (IC95 % = 24,9-161,6) chez ceux dont la fonction rénale était < 15 ml/mn, soit 10 fois plus. Il était au moins de 12,7 (IC95 % = 8,2-18,6) pour 100 patients/année en cas de clairance de la créatinine < 60 ml/mn. Pour chaque catégorie décroissante de fonction rénale, le taux d’hémorragies graves pour 100 patients/année avait une tendance significative à augmenter, même si les intervalles de confiance se recouvraient partiellement du fait d’un nombre hétérogène d’hémorragies dans les six catégories, lié à des effectifs et à une incidence des hémorragies très différents. Au cours des 2,1 années suivantes, les résultats étaient comparables, mais d’une amplitude moindre. 58,4 % des hémorragies étaient digestives (mortalité = 4,1%) et 5,4 % intracrâniennes (mortalité = 17,7 %).
› Cette étude intéressante a quelques faiblesses de par son design rétrospectif qui expose à ne pas disposer de toutes les données utiles. De plus, elle ne concerne que les patients âgés de plus de 65 ans atteints de fibrillation auriculaire inclus dans une base de donnée d’une province canadienne, ce qui altère discrètement sa validité externe.
› En pratique, en cas de première prescription d’anti-vitamine K chez un patient atteint de fibrillation auriculaire âgé de plus de 65 ans, il est judicieux de mesurer sa clairance de la créatinine en se souvenant que plus la fonction rénale est altérée plus le risque hémorragique est élevé, et qu’il survient principalement dans les trente premiers jours.
2. Jun M el al. BMJ 2015; 350:h246 doi: 10.1136/bmj.h246.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)