Les sujets souffrant d’immunodépression sont nombreux et véritablement concernés par le risque majeur de contracter la grippe A(H1N1) et de développer des formes graves. Ainsi, ils font partie des personnes à vacciner prioritairement. Pourtant, le déficit immunitaire pourrait limiter l’action de la vaccination et privilégier la survenue d’effets secondaires. Se pose alors une question : doit-on vacciner les personnes immunodéprimées ?
LES RAISONS D’UNE VACCINATION GÉNÉRALISÉE
Les arguments (1) évoqués pour une vaccination généralisée sont :
- il s’agit du moyen le plus efficace pour réduire la circulation virale responsable de la pandémie,
- elle permet une diminution mécanique du nombre de complications (décès) avec la diminution du nombre de cas,
- c’est le moyen essentiel pour limiter le risque de mutation.
QUELLE PRIORITÉ POUR LES PATIENTS IMMUNODÉPRIMÉS
On sait depuis longtemps que la vaccination contre la grippe saisonnière est moins efficace chez les personnes immunodéprimées. Mais parce que la grippe saisonnière est plus grave chez ce type de patient, cette vaccination leur est conseillée même s’ils y répondent moins bien qu’une personne n’ayant aucune immunodépression.
Pour la grippe A(H1N1), le raisonnement doit être le même. Il est donc recommandé de vacciner les sujets immunodéprimés (sous-entendus les sujets ayant une maladie dysimmunitaire ou sous traitement immunosuppresseur et non pas sous de petites doses de corticoïdes pour une pathologie bénigne) afin de leur assurer une protection aussi minime soit-elle.
La question a été posée de savoir si cette vaccination devait être réalisée avec un vaccin sans ou avec adjuvant. Initialement, il semblait cohérent de proposer à ces personnes immunodéprimées un vaccin avec adjuvant afin d’obtenir une réponse immunitaire maximale. Or il a été souligné que certaines immunodépressions étaient en rapport avec une maladie auto-immune touchant un organe central et pourraient être réactivées (lupus grave, périartérite noueuse sévère, sclérose en plaque, sclérodermie évolutive,...) De plus, il n’existe pas assez de recul des essais cliniques relatifs aux adjuvants utilisés chez ce type de personnes. Ainsi, il parait préférable dans certains cas d’immunosuppression (transplantation d’organes, …), comme pour les enfants de moins 2 ans, de vacciner avec un vaccin sans adjuvant.
LES RECOMMANDATIONS VACCINALES DE L’HCSP
Selon les dernières recommandations de l’HCSP (Haut Conseil de santé publique) (2), il existe des dispositions spécifiques aux personnes (adultes et enfants) atteintes de dysfonctionnement du système immunitaire inné ou acquis. Il est ainsi recommandé (3) :
Qui vacciner avec deux doses de vaccin avec adjuvant à 3 semaines d’intervalle ?
- Les adultes atteints de pathologies oncologiques et hématologiques (au moins 15 jours avant et au minimum 7 jours après une chimiothérapie).
- Les adultes ayant bénéficié d’une transplantation de cellules souches hématopoïétiques, dans un délai de 3 mois après la greffe si la circulation du virus est peu active mais dès la sortie de l’aplasie en cas de circulation intense.
- Les enfants atteints de pathologies oncologiques et hématologique à partir de 24 mois, si possible, au moins 15 jours avant et au minimum 7 jours après une cure de chimiothérapie.
- Les enfants ayant bénéficié d’une transplantation de cellules souches hématopoïétiques il y a plus de 3 mois et moins de 5 ans, âgé de 24 mois et plus.
- Les enfants âgés de plus de 24 mois et les adultes atteints de déficits immunitaires héréditaires (autres que déficit complet en lymphocyte B).
- Les patients sous traitements immunosuppresseurs, atteintes de rhumatisme inflammatoire, de maladies inflammatoires chroniques intestinales ou d’autres maladies auto-immunes, après avis de l’équipe médicale.
- Les patients présentant une infection par le VIH non contrôlée par le traitement antirétroviral,
- Les patients présentant une infection par le VIH bien contrôlée sous traitement antirétroviral, mais selon le même schéma que la population générale (le nombre d’injection pourrait éventuellement passer à 1 seule si la demande des laboratoires était acceptée).
Qui vacciner avec 2 doses de vaccin sans adjuvant à 3 semaines d’intervalle ?
- Les adultes transplantés d’organes présentant une pathologie auto-immune induite par la greffe d’organe (purpura thrombopénique, lupus).
- Les enfants atteints de pathologies oncologiques et hématologique de 6 à 23 mois, si possible, au moins 15 jours avant et au minimum 7 jours après une cure de chimiothérapie.
- Les enfants ayant bénéficié d’une transplantation de cellules souches hématopoïétiques il y a plus de 3 mois et moins de 5 ans, âgés de 6 à 23 mois.
- Les enfants âgés de 6 à 23 mois atteints de déficits immunitaires héréditaires (autre que déficit complet en lymphocyte B).
- Les patients ayant bénéficié d’une transplantation d’organe il y a plus de 3 mois, dans un délai de 6 mois après la greffe si la circulation du virus A(H1N1)v est peu active, diminué à 3 mois après la transplantation si la circulation est intense.
- Les patients atteints d’une maladie inflammatoire ou d’une maladie auto-immune systémique telle que listée dans l’ALD 21 et 25 (formes graves de vascularites systémiques, périartérite noueuse, lupus érythémateux aigu disséminé, sclérodermie généralisée évolutive, sclérose en plaques).
- Les enfants de moins de 2 ans ayant une infection par le VIH.
En cas d’indisponibilité du vaccin fragmenté sans adjuvant, les sujets concernés par cette recommandation ne sont pas vaccinés et il est conseillé à leur entourage de se faire vacciner.
L’indispensable cocooning
En raison des incertitudes sur l’efficacité de la vaccination des sujets immunodéprimés, le HCSP recommande fortement de vacciner l’entourage immédiat des personnes recevant un traitement immunosuppresseur (y compris les transplantés) ou une chimiothérapie ainsi que des personnes ayant un déficit immunitaire acquis ou héréditaire, que le sujet lui-même soit vacciné ou non. Même chose en cas d’allergie à l’un des constituants du vaccin (3).
Cas particuliers
- Le HCSP recommande la vaccination des enfants transplantés de cellules souches hématopoïétiques depuis au moins 3 mois, en raison de la faible immunogénicité du vaccin avant 3 mois. Il recommande la vaccination de l’entourage immédiat.
- Pour les greffes d’organe la vaccination est recommandée après trois mois du fait d’une insuffisance de réponse immune ou d’un risque de’éventuel déséquilibre de la tolérance du greffon en période immédiate post-greffe.
- Dans le cas de déficit immunitaire héréditaire complet en lymphocyte B le HCSP ne recommande pas la vaccination du fait de l’absence attendue de réponse immunitaire.
- Les personnes atteintes de dysfonctionnement du système immunitaire inné ou acquis sont vaccinées en centre de vaccination, un contact soit pris avec les équipes médicales qui les suivent. Ces personnes seraient idéalement vaccinées par ces équipes elles-mêmes au sein de l’hôpital où elles sont suivies.
CONCLUSION
Selon le Pr Autran, " il est impératif d’insister sur l’importance de cette vaccination pour protéger ces sujets à haut risque de formes graves et sur le fait que toute cette campagne vaccinale est très soigneusement et très régulièrement évaluée.
Le suivi de l’évolution de la maladie et des effets de la vaccination est ainsi sérieusement effectué afin d’élaborer les meilleures recommandations vaccinales."
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