C'est pour connaître les opinions et représentations des patients sur la prévention et les modes de vie que le réseau européen pour la Prévention et la Promotion de la santé en médecine générale, Europrev, a initié l'étude Europreview (1). Cette étude multicentrique a été menée dans 22 pays européens entre septembre 2008 et septembre 2009, la partie française ayant été confiée à la SFMG (Société française de médecine générale). "Il est en effet plus facile d'établir un partenariat avec nos patients sur les questions de santé si l'on a déjà une idée de ce qu'ils pensent. C'est pourquoi cette étude a intéressé la SFMG", explique le Dr Duhot.
Dix cabinets par pays ont été recrutés, chacun devant inclure 10 hommes et 10 femmes de 30 à 49 ans, et 10 hommes et 10 femmes de 50 à 70 ans. Au total, 7947 patients ont été analysés. L'autoquestionnaire comportait des items sur les données cliniques et démographiques, le style de vie du patient, ses représentations à propos de la promotion de la santé et de la prévention des maladies, ainsi que des questions sur les soins délivrés par le médecin généraliste (ou l’équipe de soins selon les pays).
UNE APPÉTENCE POUR LES EXAMENS DE DÉPISTAGE
Le premier résultat marquant concerne le rythme des examens de dépistage, tel que les patients envisagent qu’il est nécessaire de les réaliser (hors pathologie). Deux tiers d'entre eux pensent que le dosage de la glycémie (66 %) et du cholestérol (62,6 %) devrait être effectué tous les ans. Même tendance en ce qui concerne la fréquence de réalisation du frottis cervico-utérin, puisqu’environ 2 femmes sur 3 estiment qu'un rythme annuel serait approprié. S'agissant de la mammographie, 4 femmes sur 10 pensent qu'un contrôle annuel est nécessaire, y compris dans la tranche d'âge 30-49 ans. "Ces réponses témoignent d'une appétence des patients pour les examens de dépistage qui va bien au-delà de ce que préconisent les recommandations actuelles, et qui pose la question des limites du dépistage individuel non organisé".
MODES DE VIE : LE PROBLÈME DE L'ALCOOL
-› S'agissant de la perception et des attitudes vis-à-vis des risques individuels (tabac, alcool, alimentation, activité physique), les réponses sont homogènes dans tous les pays. "Mais deux types d'attitudes sont mis en évidence. Dans les domaines de la consommation de tabac (1/4 des femmes et 1/3 des hommes fument), des habitudes alimentaires et de l'activité physique, l'intérêt des patients est évident et leurs réponses sont proches pour ces trois champs de la santé : ils en ont parlé avec leur médecin, ont envie de changer leurs habitudes, et demandent à ce que leur médecin leur prodigue des conseils et les aide à modifier leur comportement. On observe des résultats inverses pour l'alcool (9 % des femmes et 24 % des hommes sont des buveur(se)s à risque) : globalement, les patients ne souhaitent pas en parler, n'ont pas envie de recevoir de conseils de la part de leur médecin et n'éprouvent pas le besoin de changer, ni que leur médecin les aide à ce propos. Les médecins de leur côté n'abordent pas non plus le sujet !"
-› Les résultats de l'échantillon français (327 patients) sont conformes aux résultats européens. A noter que notre pays arrive en tête des pays "bons élèves" en terme d'alimentation, 7 % des répondants indiquant avoir une alimentation très saine et 78 % une alimentation saine. La Grèce quant à elle est classée à cet égard parmi les "mauvais élèves", "ce qui est sans doute en rapport avec les changements de modes de vie observés ces dernières années, le traditionnel régime crétois étant nettement moins suivi que par le passé".
Et l'alcool ? Sur les 327 patients, 88 % répondent qu'il est important ou très important de boire modérément ou de ne pas boire du tout de boissons alcoolisées. Mais parmi les consommateurs d'alcool, seuls 10 % pensent avoir besoin de réduire leur consommation, tandis que 5,6 % seulement aimeraient recevoir un soutien ou des conseils de la part de leur médecin. Ces chiffres contrastent avec ceux obtenus chez les fumeurs, dont les 2/3 admettent avoir besoin de diminuer leur consommation et dont la moitié souhaite recevoir des conseils du médecin. Si parmi les consommateurs d'alcool on sépare les sujets DETA 1 (score de 0 ou 1 au test DETA, traduction française du test CAGE, correspondant à une consommation occasionnelle ou modérée) et DETA 2 (buveurs excessifs), le risque est partiellement identifié chez les DETA 2, dont 39 % admettent avoir besoin de réduire leur consommation et sont d'accord pour que leur médecin les prenne en charge. Du côté des médecins, seulement 47,8 % d'entre eux auraient au cours des 12 derniers mois abordé avec leurs patients la question de leur consommation d'alcool, ce pourcentage étant de 12 % chez les DETA 1.
DES CONSEILS OU DES BROCHURES ?
Sur l'ensemble de l'échantillon européen, la remise de brochures d'information est plébiscitée par les patients souhaitant recevoir une aide de la part de leur médecin, suivie immédiatement par la délivrance de conseils individuels. Le conseil en groupe et la consultation spécialisée sont demandés par une minorité de patients.
En France en revanche, le conseil individuel arrive en tête, suivi par les brochures d'information, puis par l'avis spécialisé (plus accessible en France que dans d'autres pays) et bon dernier, le conseil en groupe.
Mise au point
Troubles psychiatriques : quand évoquer une maladie neurodégénérative ?
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
Recommandations
Antibiothérapies dans les infections pédiatriques courantes (2/2)