Rhumatologie

PENSER A L’OSTÉOPOROSE CORTISONIQUE

Publié le 19/06/2009
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La cortisone est la cause la plus fréquente d'ostéoporose induite par les médicaments (1). Les femmes et les hommes de tous âges et toutes origines ethniques perdent de la masse osseuse pendant une corticothérapie générale. Les fractures vertébrales incidentes sont, en l'absence de prévention, très fréquentes chez ces patients (30 à 50%).

Crédit photo : ©THOMAS E

?Christiane R., 63 ans, consulte pour des rachialgies diffuses. Pour des antécédents d’asthme sévère, elle a reçu de façon intermittente de nombreuses cures de Solupred® à des doses oscillant entre 40 et 60 mg/j. Actuellement, elle n'en prend plus que 10 mg/j. Christiane a été ménopausée à 50 ans et n'a pas pris de THS. Elle n'a pas d'antécédent personnel ou familial de fracture. A l'examen, il existe des signes modérés d'hypercorticisme, la taille est stable, il n'y a pas d'impotence fonctionnelle ni de syndrome fracturaire vertébral. Elle présente une cyphoscoliose dorso-lombaire connue de longue date et une insuffisance musculaire globale qui peuvent expliquer les rachialgies. Les radiographies n'objectivent aucune déformation vertébrale. Une rééducation douce de l'ensemble du rachis lui est conseillée. Compte-tenu de la corticothérapie, vous prescrivez une ostéodensitométrie de l'extrémité supérieure du fémur (le rachis risquant d'être difficilement interprétable vu la cyphoscoliose).

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Le remboursement d'une ostéodensitométrie ?

› Selon les recommandations (2) de la HAS concernant l'ostéodensitométrie, la corticothérapie constitue une des indications remboursées de l'examen (encadré E1). Il existe une nuance importante entre la population générale et la femme ménopausée. Dans le premier cas, il faut une prise actuelle de corticoïdes par voie générale à une posologie supérieure ou égale à 7,5 mg/j de prednisone pendant une durée minimum de trois mois. Dans le cas de la femme ménopausée, il suffit d'un antécédent de corticothérapie générale, prise dans les mêmes conditions.

Faut-il prescrire un traitement ?

› Il faut proposer systématiquement une supplémentation vitamino-calcique. Les doses prescrites dépendent de l'apport alimentaire en calcium, et notamment de la consommation de produits laitiers et d'eaux minérales calciques. Cette supplémentation vitamino-calcique n'est ici qu'un traitement adjuvant et il faut y associer un traitement anti-ostéoporotique. Deux médicaments sont nommément remboursés dans l'indication ostéoporose cortisonique (3). On peut proposer l'étidronate en prise séquentielle de 400 mg/j pendant 14 jours tous les trois mois. Il est également possible d'utiliser le risédronate mais le dosage admis au remboursement dans cette indication est uniquement le 5 mg en prise quotidienne.

Le fragment 1-34 de l'hormone parathyroïdienne de synthèse, le tériparatide, a l'AMM pour l'ostéoporose cortisonique mais n'est remboursé que s'il y a au moins deux fractures vertébrales prévalentes. L'alendronate, en prise quotidienne de 10 mg, a également l'AMM mais n'est pas remboursé spécifiquement pour la prévention de l'ostéoporose cortisonique.

› Cependant, si l'on se réfère au texte de l'HAS pour le traitement médicamenteux de l'ostéoporose en l'absence de fracture, on peut lire que le traitement peut être proposé si le T-Score à l'ostéodensitométrie est ≤ -2,5 avec des facteurs de risque ou en cas de T-Score ≤ -3 (ce qui est le cas de Christiane). Or, dans les facteurs de risque, figure la corticothérapie générale. On pourrait donc proposer d'autres médicaments, sans déroger aux conditions de remboursement, comme, l'alendronate (en prise quotidienne ou hebdomadaire, seul ou associé à la vitamine D), le zolédronate annuel (5 mg IV), le dosage 35 mg hebdomadaire du risédronate ou le ranélate de strontium. L'ibandronate et le raloxifène paraissent un peu moins indiqués chez cette patiente qui a une déminéralisation majeure de la hanche et un risque fracturaire important à ce niveau.

Dr Eric Thomas (PH, service de Rhumatologie. Hôpital Lapeyronie, 34295 Montpellier cedex 5. Courriel : e-thomas@chu-montpellier.fr).

Source : Le Généraliste: 2493