À l’approche des élections européennes, beaucoup de médecins libéraux peuvent s’interroger : comment sont-ils représentés à l’échelle de l’UE ?
Une association méconnue existe pourtant, l'EANA. Derrière ce sigle allemand se cache le Groupement européen des médecins en pratique libre, fondé en 1974 pour représenter les intérêts des généralistes et spécialistes libéraux du vieux continent. Un des premiers combats a été de se positionner sur la définition des soins médicaux primaires dans les pays les plus industrialisés.
L'EANA est présidée depuis 2016 par le Dr Philippe Boutin, membre du bureau de la CSMF et président de la conférence nationale des Unions régionales des professionnels de santé – médecins libéraux (URPS-ML). « L’intérêt de l’EANA est double, explique le généraliste de Poitiers. Elle permet de faire un état des lieux dans les différents États de l’application des directives européennes. Nous travaillons aussi sur des sujets d’actualité communs comme la e-santé ou les contours de métiers ».
Recertification au programme
L’EANA organise deux réunions thématiques par an à l’issue desquelles des recommandations sont diffusées auprès des instances continentales et du Comité permanent des médecins européens (CPME), solide structure de lobbying. Le prochain séminaire de l’EANA aura lieu à Bratislava (Slovaquie) du 20 au 22 juin sur les thèmes de l’approche qualité et de la recertification. Un sujet qui tombe à pic pour les médecins français qui s'apprêtent à entrer dans un système de certification périodique.
Il y a un an, l'association a appelé à une harmonisation des processus de délégation de tâches dans les soins de santé privés européens – grâce à la formation professionnelle systématique, des processus clairs (permettant de limiter les événements indésirables) et une évaluation.
Plus récemment, en novembre 2018, l'EANA reconnaissait l’intelligence artificielle comme un « outil d’assistance technique » permettant aux médecins de dégager « le temps nécessaire pour travailler en collaboration et de manière individuelle avec leurs patients ». Elle recommandait l’adaptation « rapide » des formations (initiale et continue) des praticiens européens dans ce domaine, dès lors que l'IA participe au développement de l'activité médicale.
La ROSP, avatar du P4P britannique
En pratique, l’EANA est composée de représentants des organisations médicales des 28 pays membres. « La France y est représentée par la CSMF », explique le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la centrale polycatégorielle qui assure s’y rendre « avec intérêt, chaque fois que cela est possible ».
« Nos gouvernements regardent vers l’Europe pour penser leurs politiques, nous aurions tort de ne pas le faire nous aussi », développe le leader confédéral. « On n’a rien inventé en France ! rappelle-t-il. Quand on a fait la ROSP (rémunération sur objectifs de santé publique), on s’est inspiré du P4P britannique (paiement à la performance), quand on fait de l’épisode de soin, on s’inspire du modèle suédois ». Bref, « on voit que ce qu’on est en train d’expérimenter en France avec l’article 51 (sur l'innovation en santé) a déjà été développé dans un certain nombre de pays », poursuit le patron de la CSMF.
A l'heure où les contraintes financières pèsent sur tous les systèmes de santé, menaçant parfois l'indépendance médicale, l’EANA permet d’échanger entre médecins européens sur des réformes appliquées chez nos voisins (encadré), qui pourraient être traduites (ou pas) dans l’Hexagone...
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