RÉALISÉE pour la septième année consécutive, l’enquête ISA (1) sur les délais d’attente pour obtenir un examen IRM en France se traduit par des résultats toujours aussi médiocres et alarmants : non seulement le retard français persiste – délais d’attente, sous-équipement – sans aucune amélioration significative, non seulement les objectifs gouvernementaux (limités) du plan Cancer ne sont pas tenus, mais cette carence en matière d’accès à l’IRM entraîne une perte de chance pour les patients (cancer, AVC...).
• Délai d’attente moyen : 34,6 jours, à peine mieux qu’en... 2004
Indicateur reconnu de qualité des soins et de besoin en équipements, le délai d’attente IRM avait fait l’objet d’un objectif national – 10 jours maximum – inscrit dans le plan Cancer 2 (2009). On en est très loin. Avec un parc de 543 équipements IRM en janvier 2010, soit seulement 48 appareils de plus qu’en 2009 (10 % de hausse), il n’y a nulle « amélioration significative » des délais moyens d’obtention d’un rendez-vous (dans les 502 structures contactées). Ce délai d’attente s’établit à 34,6 jours – donc trois fois plus que les recommandations du plan Cancer –, un résultat équivalent à l’an passé (34,5 jours d’attente) et assez comparable au pire score enregistré en 2004 (36,1 jours). L’effort d’installation d’IRM tend à diminuer, note l’étude : il y a eu 37 installations d’IRM par an en moyenne de 2006 à 2010 contre 55 par an entre 2003 et 2006.
• Fortes inégalités régionales
Ce tableau national accablant masque des inégalités régionales fortes (voir carte), traduction d’une « médecine à deux vitesses ». Le délai d’attente culmine dans les Pays-de-la-Loire (58 jours), en Poitou-Charentes (57,5 jours) et en Alsace (55,7 jours). Il est le plus bas en Picardie (22,3 jours), en Ile-de-France et en Midi-Pyrénées. En tout état de cause, environ deux tiers des Français vivent dans des régions où il faut attendre plus d’un mois pour obtenir un rendez-vous IRM et « aucune région n’atteint l’objectif du plan Cancer 2 », c’est-à-dire le seuil des 10 jours d’attente. Plus grave, six régions parmi les dix à plus fort taux de mortalité par cancer (Asace, Haute-Normandie, Bretagne, Lorraine, Basse-Normandie et Bourgogne), soit près de 20 % de la population, affichent en moyenne un délai de 44 jours.
• Corrélation entre délais élevés et taux d’équipement faible
L’étude souligne le lien entre le taux d’équipement IRM et la durée de rendez-vous. La quasi-totalité des régions qui s’illustrent par un taux d’équipement plus bas que la moyenne nationale (c’est-à-dire en dessous de 8,7 IRM par million d’habitant) se caractérisent aussi par des délais d’attente supérieurs à la moyenne française (au dessus de 34 jours). L’enquête a étudié les régions où le délai de rendez-vous a fortement augmenté – plus de 10 jours – en deux ans (Auvergne, Haute-Normandie, PACA, Poitou-Charentes, Alsace). Il ressort que, dans ces régions, le parc IRM n’a que faiblement progressé – seulement 8 % entre 2008 et 2010. A l’inverse, toujours selon l’enquête, dans les régions qui « investissent de façon soutenue » sur les installations IRM, les progrès sont probants. Ainsi, dans le Nord-Pas-de-Calais et Rhône-Alpes « une augmentation du parc IRM de 30 % entraîne une diminution des délais d’attente de 22 % » en deux ans.
• Un rattrapage s’impose, avec les ARS aux manettes ?
La carence française en matière d’accès à l’IRM, insiste l’étude, « entraîne une perte de chance pour les patients », freine l’accès à l’innovation diagnostique et thérapeutique, et se révèle paradoxalement onéreuse. « Le retard accumulé depuis plusieurs années conduit à la prescription d’examens de substitution inadaptés, inefficaces et coûteux », peut-on lire. Afin de réduire visiblement les délais de rendez-vous, et de se rapprocher de la durée de 10 jours maximum pour les examens IRM en cancérologie, l’enquête plaide pour un effort « soutenu » en matière d’équipement à moyen terme (« il faudrait doubler le rythme annuel de croissance des équipements IRM pendant cinq ans »). En clair, il ne suffit plus de se contenter des objectifs nationaux – au demeurant insuffisants – inscrits dans les lois de santé publique (le plan Cancer prévoit un accroissement de 8 % par an des IRM à l’horizon 2013) mais il convient d’agir plus fortement à l’échelon des régions, à l’initiative directe des agences régionales de santé (ARS), pour organiser le rattrapage au regard des besoins locaux.
Car les besoins médicaux, eux, vont continuer de progresser. Les applications de l’IRM croissent de 14 % par an sous l’effet de l’incidence accrue de certaines pathologies (cancers, AVC, Alzheimer...), des indications des plans de santé publique et du vieillissement de la population. Autre raison de changer de braquet : le décalage avec nos voisins. Avec 8,7 IRM par million d’habitant, la France est deux fois moins équipée que le reste de l’Europe de l’Ouest (17 IRM par million d’habitant en moyenne, 20 en Allemagne, 25 en Norvège).
(1) Enquête annuelle IRM menée par Cemka-Eval pour Imagerie Santé Avenir (ISA) « Quels délais pour un rendez-vous ? ». L’enquête consiste à simuler la situation d’un patient pour lequel un médecin aurait prescrit un examen dans une indication précise (suspicion de métastases), et ayant à prendre rendez-vous pour la réalisation de cet examen.
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