Un tiers des personnels de l’AP-HP estime que les dysfonctionnements au sein de leur service ne sont pas suffisamment analysés, que leurs idées ou avis ne sont pas suffisamment pris en compte, selon une enquête interne récente. « Nous avons donc cherché des voies pour mieux répondre aux attentes des professionnels, mieux réguler les dysfonctionnements auxquels ils se heurtent au quotidien », explique Piérelle Boursaly, responsable de la mission qualité de vie et conditions de travail à l’AP-HP. C’est dans ce contexte que le CHU a initié en 2020 cinq expérimentations des « espaces de dialogue sur le travail » (EDT). Une vingtaine de services sont concernés. À l’image du service de médecine intensive et réanimation de l’hôpital Louis-Mourier, dirigé par le Pr Jean-Damien Ricard. Selon le réanimateur médical, les EDT sont des moments d’échange inter-métiers (médecins, infirmiers, aides-soignants, cadres de santé, etc.), où l’on va « évoquer tout ce qui empêche les personnes de faire un travail de qualité, réfléchir pour trouver des solutions à ces difficultés ». La pénurie de personnel et les fermetures de lits « augmentent les tensions au sein d’un service, nous avions besoin d‘un temps sanctuarisé où tous les problèmes peuvent être abordés », plaide le Pr Ricard, persuadé que cette démarche participe à améliorer la qualité de vie au travail. C’est aussi, selon lui, une manière de « désamorcer une situation vécue individuellement ou collectivement, de ne pas attendre un mois à deux mois une réunion de service pour pouvoir en discuter ».
Si certains services ont privilégié les temps d’échange « à froid pour aborder plutôt des sujets de fond », d’autres ont choisi de « réguler les dysfonctionnements à chaud dans le cadre de temps d’échanges réguliers », précise Piérelle Boursaly. À l’hôpital de jour de Robert-Debré, la Dr Cécile Dumaine a opté pour des « formats courts » de 15 minutes par jour. De fil en aiguille, « les problèmes triviaux ont disparu », si bien que son équipe réfléchit à d’autres formats de réunion pour s’attaquer aux « problèmes de fond ». Quant au Pr Antoine Monse, responsable médical de l’unité de réanimation chirurgicale polyvalente Husson-Mourier à la Pitié-Salpêtrière, il a mis en place des sessions de deux heures, toutes les quatre à six semaines. Des séances qui ont débouché sur l’instauration d’un nouveau tableau pour les entrées-sorties ou la création d’un livre d’or de la réanimation pour les familles. Selon l’anesthésiste-réanimateur, les EDT sont « vecteurs de cohésion et de communication ». Depuis leur mise en place, le turn-over des infirmières se situe désormais « autour de 20 % » dans son service, alors qu’il avait atteint un pic de 40 % en 2019. Des résultats positifs qui ont convaincu l’AP-HP de tester les EDT à grande échelle. Objectif : accompagner dans cette nouvelle démarche 250 services volontaires, d’ici 2024.
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