Enquête sur le malaise des PH

Médecins hospitaliers, les illusions perdues

Publié le 14/11/2011
Article réservé aux abonnés
1321261168298380_IMG_71400_HR.jpg

1321261168298380_IMG_71400_HR.jpg
Crédit photo : AFP

ÉDIFIANTS et alarmants. Tels sont les résultats de l’enquête sur le ressenti des PH effectuée par le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHAR-E) et qui a recueilli les réponses de quelque 3 000 médecins des hôpitaux publics (CH et CHU très majoritairement) dans toutes les spécialités. Ce questionnaire (1) portait en particulier sur les conséquences de la loi HPST, la nouvelle gouvernance, l’organisation administrative, les conditions de travail et la vision de l’avenir. S’agissant de choix multiples, chaque sondé avait la possibilité de cocher plusieurs réponses pour chaque question.

Même si les médecins hospitaliers qui s’expriment sont sans doute les plus critiques, les résultats ont de quoi inquiéter les pouvoirs publics, deux ans après la publication de la loi Bachelot réformant l’hôpital.

Premier enseignement : la perception d’un grand flou administratif. Plus de 4 PH sur 10 « ne savent pas ce qui se passe dans leur pôle » et seuls 36 % en connaissent les objectifs. « Par contre, à force de nous l’avoir répété, on sait parfaitement qui est le patron ! », ironise Nicole Smolski, présidente du SNPHAR-E. Pas tout à fait : 26 % des praticiens affirment ne pas connaître leur directeur ni être connu de lui. Le gigantisme de certains hôpitaux et le fossé entre la direction et le terrain se fait sentir : 63,5 % des praticiens interrogés pensent que « le directeur n’a qu’une connaissance indirecte de ce qui se passe sur le terrain ». Avec la réforme de la gouvernance, un médecin sur deux se dit inquiet de la perte de pouvoir décisionnaire des CME.

L’hôpital et la finance.

S’agissant de la reconnaissance professionnelle, le couperet tombe : moins de 20% des PH se sentent respectés par la direction de l’hôpital et un peu plus de 40% par leur chef de pôle. Surtout, deux tiers des PH estiment ne pas disposer de moyens suffisants pour atteindre leurs objectifs tandis que 82% trouvent que leur charge de travail est en augmentation. Enfin, 75 % d’entre eux considèrent que l’établissement ne les aide pas à améliorer la qualité de leur travail. « Comme je le dis souvent à ma directrice, je suis la brancardière la mieux payée de l’hôpital », raille Nicole Smolski.

Dès lors, le sentiment de désillusion est perceptible : quand on leur demande s’ils seraient heureux de finir leur carrière dans leur établissement actuel, 44 % sont sans opinion, 30 % répondent par l’affirmative et 26 % par la négative. Pis, pour 43 % d’entre eux, « il vaut mieux éviter d’être médecin ».

L’image que les praticiens ont de leur activité est surtout négative en comparaison de leur idéal. Pour eux hélas, le premier mot (sur une liste de cinq) qui qualifie aujourd’hui le métier de médecin hospitalier est « dégradation », devant « compétence » et « finances ». Le fatalisme est réel au regard des réponses sur l’hôpital du futur. Pour 66 % d’entre eux, c’est « l’économie et la finance » qui définiront l’hôpital de demain. Un coup de semonce ?

(1) Enquête en ligne de 38 questions (six semaines en septembre et octobre), 3612 réponses, 2997 réponses complètes analysées.

ANNE BAYLE-INIGUEZ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9040