Padhue : le nouveau statut ne convainc pas tous les syndicats, grève annoncée le 14 mai

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Publié le 10/05/2024
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Plusieurs syndicats et collectifs de défense des Padhue ont déposé un préavis de grève pour le 14 mai. Une manifestation est prévue le même jour devant le ministère de la Santé. Les mécontents dénoncent la création d’un nouveau contrat de praticien associé à caractère temporaire, dit Pact, que le ministère de la Santé doit présenter le 13 mai au conseil supérieur des personnels médicaux.

Crédit photo : BURGER/ PHANIE

« Rien n’a changé, ça ne bouge pas. Le Pact, c’est une connerie comme le statut de praticien associé. Il n’y a rien qui suit, ni le statut, toujours aussi précaire, ni le salaire », tempête le Dr Abdelhalim Bensaidi, vice-président de l’association IPADECC.

La régularisation des Padhue, ces médecins diplômés en dehors de l’Union européenne et exerçant en France depuis plusieurs années, est un dossier brûlant. Maintenus dans une précarité financière et statutaire depuis plusieurs années, ces milliers de praticiens attendaient beaucoup du travail en cours au ministère de la Santé, poussé par Emmanuel Macron lui-même, au début de l’année, à trouver une solution pour « régulariser » la situation.

Las. Les premiers éléments que le ministère a communiqués cette semaine aux syndicats de Padhue n’ont pas convaincu l’ensemble du secteur. L’enjeu principal porte sur l’avenir des 4 165 médecins qui n’ont pas été diplômés en 2023 des épreuves de vérification de connaissances (EVC), la seule procédure qui les autorise pleinement à travailler dans l’Hexagone.

Les autres Padhue lauréats de cet examen disposent quant à eux du statut de praticien associé (PA), en vue de réaliser leur parcours de consolidation des compétences (PCC).

Un décret au Conseil d’État attendu

Dans ce contexte et au regard de l’importance majeure des Padhue dans le fonctionnement des établissements de santé, le ministre délégué à la Santé Frédéric Valletoux a proposé fin 2023 (lorsqu’il était député et dans la loi qui porte son nom) un nouveau statut : le contrat de praticien associé à caractère temporaire (Pact). Ce sont les premiers éléments de ce contrat que le ministère a communiqués cette semaine, en vue de présenter le 13 mai au conseil supérieur des personnels médicaux un texte réglementaire (décret en Conseil d’État) en bonne et due forme.

La note de présentation de la DGOS (ministère de la Santé) qui accompagne le projet de décret que le Quotidien a pu consulter confirme les éléments connus dans la loi Valletoux. Les Padhue non diplômés vont bénéficier d’une attestation temporaire d’exercice dans l’attente de repasser les EVC (et de basculer une fois lauréat vers le statut de praticien associé). Cette dérogation de 13 mois maximum sera renouvelable une fois.

Le statut Pact est attendu dans le projet de décret en Conseil d’État « pour permettre le recrutement de ces praticiens titulaires d’une attestation d’exercice provisoire », lit-on dans la note d’accompagnement.

Est ouvert en parallèle pour les praticiens associés et a priori pour les Pact un droit à congés de formation, d’une durée de huit jours, avec possibilité de cumul au titre des deux années de PCC.

Côté rémunération enfin, les Pact « devront bénéficier d’une rémunération plus importante que celle prévue pour les faisant-fonction d’internes (FFI) et stagiaires associés, étudiants stagiaires en cours de formation complémentaire en France, mais inférieure à celle fixée pour les praticiens associés, justifiée par l’absence de réussite au concours des EVC ».

Les FFI perçoivent une rémunération brute annuelle de 23 000 euros et les praticiens associés (à échelon 1) 36 600 euros. Avec 29 300 euros brut annuels (hors primes et indemnités), les Pact devraient se situer entre les deux.

Division syndicale

En l’état, plusieurs dispositions chiffonnent les syndicats de Padhue. Pour le Dr Paul Robel, représentant du collectif de médecins de la CGT, le Pact est certes un « progrès » qui permet « d’en finir avec les pseudo-statuts d’étudiants », mais le compte n’y est pas. Les droits à formation de huit jours sont jugés insuffisants, de même que le salaire proposé. « On se demande pourquoi les Padhue sont moins bien payés avec le même poste et les mêmes responsabilités », s’interroge le Dr Robel. D’autant que ce statut de 26 mois maximum reste précaire et laisse toujours planer « la menace d’être expulsé en cas d’échec aux EVC ».

C’est d’ailleurs la revendication principale de l’ensemble des syndicats : sortir enfin de la précarité par un statut pérenne. Tous souhaitent pour les Padhue la fin de la précarité administrative avant les EVC, l’ouverture de discussions pour l’évolution de ces examens jugés injustes et la reconnaissance des diplômes initiaux. L’association IPADECC pousse même jusqu’à réclamer une sélection par dossier avec prise en compte des services rendus dans les hôpitaux.

Une chose toutefois impensable pour SOS Padhue. « On ne veut pas casser le travail que l’on fait depuis des années avec la tutelle. Le fait que des médecins étrangers puissent travailler dans la légalité, c’est déjà un pas en avant », explique Kahina Hireche Ziani, secrétaire générale et porte-parole du syndicat. Pour SOS Padhue, ce nouveau statut « permettra d’uniformiser la situation des Padhue », même s’il faut « améliorer ce texte pour toucher plus de monde ». « Pour différentes raisons, certains médecins n’ont pas pu s’inscrire aux EVC et ne peuvent donc pas donner l’attestation de non-réussite aux EVC, ni bénéficier du statut Pact », déplore la médecin, praticienne associée en psychiatrie.

Le 14 mai, lendemain de la présentation du projet de décret, 200 manifestants, padhue et non-padhue, sont attendus avenue Duquesne. L’association IPADECC a déjà prévenu : si le ministère de la Santé fait la sourde oreille, la grève pourrait être reconduite pendant les JO.


Source : lequotidiendumedecin.fr