La cardiologie hospitalière réclame un « choc d'attractivité médicale »

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Publié le 28/11/2022

Crédit photo : Burger/Phanie

Malgré les fortes tensions sur les ressources humaines à l’hôpital, l’heure n’est pas à la résignation dans le secteur public. Dernier exemple en date, le Collège national des cardiologues des hôpitaux (CNDH, qui a vocation à valoriser et améliorer l’exercice de la cardiologie hospitalière) a dévoilé dans un livre blanc 25 « solutions » pour construire l’avenir de la spécialité. Coécrit par une centaine de cardiologues et de soignants, ce rapport de 250 pages « traduit une vitalité et une ambition de sauver l’hôpital et notre outil de travail », explique le Dr Franck Albert, président du CNCH.

Rémunérations « indécentes », concurrence du privé

Le cardiologue interventionnel de Chartres milite pour un véritable « choc d’attractivité médicale » permettant de faire face à la crise démographique qui frappe cette spécialité pourtant particulièrement innovante. Il s’agit notamment d'améliorer les conditions d'exercice et de rémunération du secteur public « pour tenir compte de la technicité des métiers et des responsabilités managériales », plaide le Dr Albert.

Côté rémunérations justement, il convient de « réduire l’écart sur le plan salarial avec le secteur libéral », y compris en revalorisant les gardes et astreintes « pour tenir compte de la pénibilité de cette activité », avance le livre blanc. Celles-ci sont « rémunérées de manière indécente » (250 euros la garde de nuit, 50 euros l’astreinte, NDLR), pointe le Dr Simon Cattan. Le cardiologue de Montfermeil confirme que l’hôpital public peine à fidéliser ses praticiens dans les techniques non interventionnelles « même si on arrive encore à être attractifs dans les techniques interventionnelles ».

Effectifs cibles

Autre priorité : adapter les effectifs de cardiologues hospitaliers à la charge de travail « réelle » des professionnels. Le CNDH appelle de ses vœux un « référentiel des effectifs médicaux cibles nécessaires au fonctionnement d’un service », en tenant compte du capacitaire et du plateau technique. Un référentiel qui existe déjà aux urgences mais aussi pour les anesthésistes ou les chirurgiens.

Le livre blanc souhaite aussi accélérer le virage ambulatoire « dans un objectif de 70 % d’actes interventionnels en ambulatoire sur les prises en charge programmées », à adapter en fonction des territoires.

Les jeunes en renfort

Côté formation, le CNDH collabore avec le Collège national des enseignants en cardiologie (CNEC) afin d'augmenter de « 30 places supplémentaires par an » le nombre de postes ouverts au DES de cardiologie (internat). « 220 cardiologues partent à la retraite chaque année et on forme aujourd’hui 185 internes, donc il y a chaque année un delta de 35 », déplore le Pr Christophe Leclercq, président de la Société française de cardiologie (SFC).

Il convient aussi de sauvegarder l'ensemble des diplômes inter-universitaires (DIU), notamment pour compléter la formation des médecins étrangers, « afin d’amortir le choc démographique prévu en cardiologie interventionnelle ».  

Passerelles, outils et équipes

Sur le plan des carrières, le CNDH réclame « plus de souplesse et de passerelles » pour que les praticiens puissent changer de voie plus facilement ou diversifier leur activité. Plusieurs mesures visent à décloisonner le système de santé comme la mise en place de temps partagés, de consultations avancées et d’équipes de territoire. 

Les voies de passage devront être facilitées à tous les étages du système de santé, ce qui suppose de renforcer les liens entre CH et CHU via la recherche mais aussi d’autoriser les hôpitaux à créer des maisons de santé pluridisciplinaires (MSP), à proximité des services d’accueil des urgences (SAU). Des outils juridiques pourraient permettre la « constitution d’équipes médicales cardiologiques de territoire » avec des missions intra et extra-hospitalières disposant d’une organisation commune.

Autre reco : généraliser le déploiement d’équipes mobiles coordonnant le suivi des patients insuffisants cardiaques entre la ville et l’hôpital en instaurant des protocoles de coopération (délégations de tâches). 

L'exemple de Bayonne 

La contrainte de permanence des soins devra, elle aussi, être beaucoup mieux partagée, voire mutualisée entre l’hôpital et le secteur libéral, dans un contexte où les PH « veulent faire moins de gardes », constate le Pr Christophe Leclercq.

Le CNDH salue l'exemple du CH de Bayonne. Là-bas, « le privé est installé dans l’hôpital : une équipe de 35 cardiologues travaillent aussi bien sur le plateau technique qu’en ville et ils participent aussi aux gardes », observe le Dr Cattan. Un exemple à étudier « pour créer des équipes de cardiologues avec une activité mixte ».


Source : lequotidiendumedecin.fr