À Lyon, la téléradiologie épaule les urgences

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Publié le 05/12/2023
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Créée en 2008 par des médecins lyonnais, la société Imadis propose aux hôpitaux des services de téléradiologie 24heures/24 et 7 jours sur 7. Ce qui permet de désengorger les urgences hospitalières et soulager les équipes en interne. Reportage.

Crédit photo : Imadis

En entrant dans le hall de cet immeuble banal du 2e arrondissement de Lyon, personne ne soupçonnerait qu’au 4e étage, des médecins examinent des cas de patients parfois gravissimes. Pourtant, en poussant la porte de la société Imadis, on découvre des locaux spacieux et modernes, pouvant accueillir jusqu’à 16 radiologues, jour et nuit. Treize chambres et trois salles de bains ont été aménagées pour les praticiens de garde.

Ici, ni machines de radiologie, ni patients dans les couloirs, ni médecins en blouse. L’ambiance est feutrée, studieuse. L’urgence s’affiche en rouge sur les écrans, mais ne se traduit pas par une frénésie d’activité. Imadis est en effet une société qui propose aux hôpitaux ses services de radiologie à distance. Les médecins urgentistes l’appellent lorsqu’ils souhaitent réaliser un examen radiologique. Un téléradiologue détermine s’il est indiqué et fournit un protocole pour le réaliser. Il reçoit ensuite les images, les analyse, les interprète, puis fournit son compte rendu.

Diagnostic en 17 minutes

Le Dr Pierre Chaillot, radiologue à la clinique du Parc à Lyon et téléradiologue chez Imadis depuis 2013, est de garde ce mercredi de 15 heures à 18 heures. Il est en train d’examiner des radios de crâne d’un patient grièvement blessé. Les images sont affichées sur son écran de droite, tandis que le gauche arbore un empilement de lignes de couleurs. « Il s’agit de tous les dossiers que nous avons reçus ce jour. Les rouges sont extrêmement urgents, avec un potentiel risque vital pour le patient. Les bleus sont à examiner dans la journée mais sans caractère d’urgence », explique le Dr Chaillot. « Dans la liste, on choisit en priorité le patient le plus ancien ou le plus grave. Le chronomètre démarre quand l’examen arrive », souligne-t-il.

En moyenne, il met 17 minutes entre l’arrivée de la première image et l’interprétation. « Nous pouvons aussi avoir des examens beaucoup plus longs, de l’ordre d’une heure trente à deux heures, lorsque le niveau de difficulté est élevé », poursuit-il. Un téléradiologue effectue trois à cinq examens par heure, en fonction de la complexité.

Imadis a été créée en 2008 par cinq radiologues des hospices civils de Lyon (HCL). « Nous étions spectateurs de la difficulté de l’hôpital à assurer les services de radiologie 24 heures sur 24 », raconte le Dr Vivien Thomson, radiologue et cofondateur d’Imadis. « Nous nous sommes dit que la téléradiologie était une partie de notre avenir de radiologue et qu’il fallait en être acteurs et non spectateurs. Nous voulions proposer des services qualitatifs, sans faire de concessions. »

Ne pas perdre de vue le terrain

Les fondateurs ont décidé de poser des règles précises, comme interdire l’exercice à domicile et proposer plutôt des locaux professionnels avec une plateforme sécurisée, ou ne recruter que des praticiens ayant une activité extérieure dans des établissements. « C’est facile d’être radiologue quand on n’est pas en contact avec la patientèle. C’est un exercice aseptisé. Mais il ne faut pas perdre de vue le terrain », insiste le Dr Pierre Chaillot. Enfin, le paiement de l’acte prévoit la possibilité de refuser un examen si la balance est défavorable, par rapport au risque d’irradiation. Imadis refuse environ 3 % des actes demandés.

La société dispose de huit centres en France et en ouvre bientôt un neuvième à Strasbourg. Elle compte 360 radiologues, dont 130 associés, qui se relaient pour traiter les demandes de leurs 107 établissements de santé partenaires. 389 000 examens ont été réalisés en 2022 dont 30 % en nuit profonde et plus de 1065 dossiers de patients sont examinés chaque jour. « Il n’y a plus de discussions pour démontrer que la téléradiologie n’est pas dangereuse. Désormais, certains services font appel à nous pour pouvoir créer de nouveaux projets dans l’établissement. C’est le cas à Annecy, où ils veulent développer la neuroradiologie interventionnelle pour la gestion des thrombectomies. Nous participons à l’équilibre du service qui permet de le mettre en place », conclut le Dr Thomson.

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin