En grève, les internes déplorent des « centaines d’assignations abusives », les hôpitaux contraints d'adapter leur fonctionnement par manque de bras

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Publié le 31/10/2022

Crédit photo : Garo/Phhanie

En grève depuis jeudi soir pour protester contre l’allongement programmé de l’internat de médecine générale, en priorité dans les zones sous-denses, les internes font déjà face à la pression des directions hospitalières. Ce 31 octobre, la présidente de l’Intersyndicale nationale des internes (Isni), Olivia Fraigneau, comptabilisait déjà « des centaines d’assignations abusives » de juniors.

« C’est le cas dans les hôpitaux de la Réunion, de Brest, de Laval, de Vannes, de Rennes, de Toulouse, de Montpellier ou encore à Paris, à Necker ou à Mondor », explique-t-elle au « Quotidien ». Si certains établissements ont rectifié le tir, dans d’autres, des internes grévistes assignés ont dû retourner travailler.

Pour assurer le service minimum, notamment en cas de grève, les directions hospitalières peuvent assigner des médecins. Mais avec un ordre d’assignation précis : d’abord les médecins séniors volontaires, puis les séniors disponibles, enfin les internes non-grévistes. « Beaucoup d’hôpitaux n’ont pas respecté ces règles, des internes sont en train de saisir leur RCP et leur avocat, et vont probablement faire un recours collectif au tribunal administratif », met en garde la présidente de l’Isni.

Lignes de gardes fermées

En parallèle, et alors que la grève reste « bien suivie » par les internes, selon Olivia Fraigneau, certains centres hospitaliers ont dû adapter leur fonctionnement par manque de bras. Avec des communications qui frôlent parfois la « malveillance », déplore encore la présidente de l’Isni.

Dans un tweet publié samedi, le CH de Laval a expliqué à ses patients « qu’en raison de la participation des internes du CH à la grève nationale des internes, l’établissement est contraint de mettre en place la régulation de l’accès aux urgences pédiatriques ». Une formulation qui a provoqué une vive réaction des jeunes sur les réseaux sociaux. Le tweet a été depuis supprimé par le CH de Laval.

À l’ouest toujours, le CHRU de Brest dit fonctionner en mode « dégradé » et invite les patients à composer le 15 avant de se rendre aux urgences, « compte tenu du mouvement national de grève des internes et des absences programmées liées aux congés ». Sur huit lignes de garde d’internes à Brest, une seule était pourvue ce week-end, selon Olivia Fraigneau.

Des urgences filtrées

En Bretagne toujours, même refrain aux urgences de Ploërmel dans le Morbihan, qui a mis en place, dans la nuit du 29 octobre une régulation via le Samu 56. Dans un communiqué, le Centre hospitalier Bretagne Atlantique pointe directement le mouvement de grève des carabins et « la présence d’un seul médecin urgentiste, susceptible d’être mobilisé dans le cadre d’une sortie du service mobile d’urgences et de réanimation (Smur) ».

Au Centre hospitalier métropole Savoie, « des tensions sur les ressources humaines médicales, auxquelles s'ajoute la grève nationale des internes », selon la direction, ont également contraint l’établissement à réguler l'accès aux urgences de Chambéry et d'Aix-les-Bains par le centre 15.

À Saintes encore, ce sont les urgences pédiatriques qui sont affectées par la grève, selon la direction, qui indique que le mouvement des juniors « est très suivi en particulier dans le secteur de pédiatrie ». Ce week-end, deux lignes de gardes d’internes étaient vacantes, le CH a donc décidé de fermer ses urgences pédiatriques aux moins de 16 ans.

La présidente de l’Isni n’accepte pas les communications des hôpitaux qui veulent « faire porter aux internes la responsabilité de la fermeture des services ou de leur régulation ». Toutefois, Olivia Fraigneau ne cache pas qu’il est « intéressant de voir tant d’hôpitaux reconnaître publiquement que, sans nous, ils ne fonctionnent plus ». Alors que la grève se poursuit jusqu’à demain soir, « il va falloir songer enfin à rémunérer et reconnaître l’interne à sa juste valeur », espère-t-elle.


Source : lequotidiendumedecin.fr