À l’heure de s’installer en cabinet, un jeune généraliste fait face à une question incontournable : est-il préférable de reprendre un cabinet ou d’en créer un ex-nihilo ? La réponse conditionnera les premières années de sa pratique et comprend des considérations financières, mais aussi en termes de patientèle. Chaque option a ses inconvénients et ses avantages.
La reprise peut apparaître rassurante et sécurisante : elle garantie une patientèle fidélisée et donc une activité et des revenus dès le départ. « En général, lors d’une reprise, seuls 10 à 15 % des patients changent de praticien : c’est très rassurant », estime le Dr Barbara Trailin, généraliste et vice-présidente du syndicat Reagjir (Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants). La reprise d’un cabinet permet également de réduire l’investissement financier et le temps consacré à l’achat des équipements et du matériel médical et informatique nécessaires à la pratique. Quelques points doivent pourtant faire l’objet d’une vigilance particulière. « Un problème majeur peut venir de l’ancienneté des locaux. Ils peuvent ne pas être aux normes d’accueil des personnes handicapées par exemple. Occupés de longue date, ils ne sont pas toujours adaptés. Le même problème se pose avec les logiciels », avertit Barbara Trailin. L'attention doit par ailleurs se porter sur le passif du cabinet : des dettes sont-elles en cours ? Le cabinet emploie-t-il des salariés ? Quels sont leurs niveaux de rémunération ? Le défi d’une reprise relève par ailleurs d’une part d’incertitude. « Il faut être dans un bon créneau entre le départ du confrère et l’arrivée du repreneur. Ce n’est pas toujours évident », constate le Dr Trailin.
À l’inverse de l’aspect rassurant d’une reprise, la création d’un cabinet constitue un risque financier important qu’il faudra supporter malgré une faible activité au départ. « Tout est à faire et à acheter. C’est très stressant », témoigne la vice-présidente de Reagjir qui a créé son cabinet avec un confrère en février dernier. Un effort de communication en amont est par ailleurs nécessaire pour se faire connaître dans la zone d’implantation choisie. « Rencontrer l’équipe municipale, visiter les Ehpad du secteur, etc. sont des démarches indispensables pour se faire connaître », assure Barbara Trailin. « La création offre une certaine liberté dans l’organisation du temps, mais elle amène de nouvelles contraintes. Dans mon secteur d’implantation, les médecins ne réalisent pas de visites à domicile : je les accepte donc pour développer l’activité du cabinet », poursuit-elle.
Reprendre une patientèle, c’est s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur
Au-delà de ces considérations, le choix entre reprise et création doit prendre en compte la patientèle que le praticien souhaite prendre en charge. En reprenant un cabinet, le jeune généraliste reprend également une patientèle forgée par son prédécesseur. « Dans le cas d’une reprise, les patients s’attendent à une continuité dans la prise en charge. Ils ont tendance à penser que leur médecin a formé son successeur et transmis les dossiers dans le détail. Ils sont ainsi moins enclins à accepter un changement de traitement par exemple. Dans le cas d’une création, ils sont plus ouverts », observe le Dr Trailin. De même, un jeune médecin reprenant un cabinet peut s’attendre à trouver des dossiers bien tenus. Or, ce n’est pas forcément le cas. « Il faut parfois reprendre et recoder tous les dossiers existants. Cela constitue une énorme masse de travail au départ », alerte le Dr Barbara Trailin. « En créant un cabinet, on part de zéro. Tous les dossiers sont à créer, mais le nombre de patients étant faible, on peut prendre le temps de réaliser de longues premières consultations pour connaître le patient et établir son dossier ».
Pour explorer les différentes possibilités, effectuer des remplacements peut se révéler utile. Hésitante au départ, la vice-présidente de Reagjir a mis à profit ses trois années de remplacement pour affiner son choix. « C’est en étant confrontée à des pratiques et des prises en charge différentes que j’ai réalisé que je ne pouvais pas reprendre n’importe quelle patientèle », raconte la jeune généraliste qui poursuit les remplacements à mi-temps pour s’assurer des revenus, payer ses charges et permettre une transition douce vers son mode d’exercice en cabinet. « La priorité doit être de se projeter dans le quotidien du cabinet que l’on reprend ou que l’on crée. Il faut vouloir vivre dans le secteur choisi, d’autant que même les territoires qui ne sont pas considérés comme des déserts médicaux et ont une couverture médicale correcte offrent des opportunités d’installation », conclut-elle.
E. B.
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