En clôture d’un colloque à l’Académie, les doyens de facultés de médecine ont proposé ce jeudi la création d'un « service médical national ». Ce contrat d'un an, à destination des jeunes médecins tout juste thésés, les enverrait exercer dans un territoire sous-doté en praticiens, a expliqué le Pr Benoît Veber, président de la Conférence des doyens de médecine. Sans préciser clairement si le dispositif serait uniquement basé sur le volontariat.
« Quand un jeune médecin a sa thèse en poche, il pourrait contractualiser un an, être rémunéré – et peut-être bien rémunéré ! – pour aller exercer dans la région qui l'a formé, par exemple dans un territoire sous-dense », a exposé le Pr Veber. Ce serait « une façon de rentrer dans la mission de médecin et de rendre à la Nation ce qu'elle lui a donné », a-t-il ajouté.
Ce n'est pas quelque chose qui a été déjà discuté avec le gouvernement, mais on va s'y atteler
Pr Benoît Veber
Co-construction avec les juniors
Pour autant, « ce n'est pas quelque chose qui a déjà été discuté avec le gouvernement, mais on va s'y atteler », a précisé le patron des doyens. Cette nouvelle proposition est une façon claire pour les universitaires de marquer le terrain sur un dossier extrêmement sensible, celui du juste dosage entre incitation et contrainte à l’installation pour combattre les déserts médicaux. Les doyens ont décidé de sortir du bois notamment pour éviter d'éventuelles mesures contraignantes sur l'installation des jeunes médecins, que certains députés, dans tous les groupes politiques, voudraient instaurer face à la désertification médicale dans certains territoires.
« Les jeunes ont très bien compris que cette coercition dont on entend parler va finir par leur être imposée, à cause d'un système (le numerus clausus) qui a été créé quand ils n’étaient pas nés », a expliqué le Pr Patrice Diot, doyen honoraire de la faculté de médecine de Tours. « Ils sont par nature généreux, ils sont à mon avis ouverts » à ce service médical national, mais « il faut le co-construire avec eux », a-t-il estimé.
Pas si simple… Parmi les intervenants, le Dr Raphaël Dachicourt, président du Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (Reagjir), émet déjà quelques bémols. « Ce n’est pas la première fois que l’Académie pousse vers ce service national. Mais nous n’avions pas été associés à cette annonce », recadre -t-il, sans rejeter l’idée par principe… tant qu’elle repose sur le volontariat. « Nous resterons vigilants quant à un éventuel glissement vers la contrainte », prévient-il. Pour autant, le jeune généraliste estime que ce service national ne résoudrait pas le fond du problème. « Ce n’est pas un turn-over de médecins chaque année dans les zones sous-dotées qui permettra à la population d’avoir un médecin de famille installé de façon pérenne », analyse le Dr Dachicourt.
À noter que ce « service médical national » d’un an préconisé par les doyens diffère du « programme Hippocrate » mis en avant début octobre par le Premier ministre Michel Barnier. Le projet des doyens cible en effet les jeunes médecins diplômés et non les internes français ou étrangers, qui sont au cœur du programme d'engagement volontaire évoqué par le Premier ministre.
Mis devant le fait accompli, les internes grincent des dents
« Nous sommes assez énervés face à l’annonce des doyens présentant les internes comme étant déjà favorables à la création d’un service médical national », s’agace le président de l’Isni, Killian L’helgouarc'h, pris de court par cette annonce, qui s’interroge sur les modalités du dispositif. « Ce n’était vraiment pas très clair hier. Reposera-t-il véritablement sur la base du volontariat ? Quels en seront concrètement les propositions incitatives ? », relève-t-il.
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