Pour les 10 ans de ses Rencontres nationales de ReAGJIR, le syndicat des remplaçants et jeunes généralistes a décidé de revenir à Orléans pour la deuxième année consécutive sur le thème : les soins primaires par delà les frontières.
Dans une ville particulièrement impactée par les problèmes de démographie médicale, la municipalité est particulièrement ravie d'accueillir sur son territoire des jeunes généralistes. « Je suis très intéressé », a plaisanté le maire de la ville Serge Grouard ajoutant : « vous êtes à Orléans et vous allez y rester ».
Surenchère financière inutile
Dans une région qui arrive avant-dernière pour ce qui est de la démographie médicale, juste devant l’Île-de-France, et un département où 150 000 patients sont sans médecin traitant, forcément la question de l’installation des jeunes praticiens sur les territoires est au cœur des débats. « Je suis un élu en colère », a fait savoir Florent Montillot adjoint à la santé à la mairie d’Orléans lors d’une session organisée avec les collectivités. « L’ensemble des autorités, y compris régionales, porte une responsabilité lourde dans la situation démographique actuelle. Il y a eu une imprévision la plus totale », a-t-il assené. « Les statistiques étaient là, nous avions tout sous les yeux. Il y a une défaillance de l’État tout entier depuis des années », a abondé Serge Grouard.
Alors que la ville va pouvoir accueillir dès la rentrée prochaine des étudiants en médecine de première année, Florent Montillot a rappelé que Centre-Val-de-Loire était la seule région de France à n’avoir qu’une seule faculté de médecine, à Tours. « Nous sommes une capitale de région, nous avons 430 000 habitants, mais nous n’avions pas de CHU et pas de faculté de médecine. C’est juste aberrant », s’est indigné le maire d’Orléans. Une manière aussi de justifier le projet controversé d’école privé de médecine en partenariat avec la faculté de médecine de Zagreb.
Car si la région et la métropole veulent mettre l’accent « sur la capacité pour les jeunes adultes à continuer de faire leurs études sur le territoire », ce n’est pas par hasard.
Car comme l’a rappelé la présidente de ReAGJIR, le Dr Agathe Lechevalier, dans son intervention en citant notamment les études de la Drees, l’attachement à un territoire, où l’on a fait ses études, où l’on a grandi… est un déterminant important à l’installation. À l’inverse, et contrairement aux idées reçues, d’après l’enquête de l’Ordre de 2019, les incitations financières pèsent finalement peu dans la décision du médecin (sans influence pour 69 % des médecins installés). La présidente de ReAGJIR incite donc les collectivités à « éviter la surenchère ».
Faire sans médecin
Mais si ce conseil s’applique pour faire venir les médecins sur son territoire, le Dr Lechevalier explique que pour les années difficiles à venir, il faudra aussi « apprendre à se passer des médecins ».
Comment faire ? « Le médecin n’est pas forcément la réponse à toute demande de soins », a expliqué le Dr Lechevalier. Un message qui passe par une éducation de la population à la santé « qui est possible mais demande de la volonté, notamment politique », souligne-t-elle. Se passer du médecin, c’est aussi miser sur la prévention et réduire le médico-légal, autrement dit les nombreux certificats demandés aux médecins. C’est également s’appuyer sur les compétences des autres professionnels ou déléguer les tâches administratives, la généraliste citant notamment le dispositif des assistants médicaux.
Des cabinets clés en mains
Message a priori bien reçu et en ligne avec celui de l’Assurance maladie. Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée de l’Assurance maladie, a rappelé que l’objectif pour passer les années à venir était « d’identifier avec vous tout ce qui peut vous soulager d’une manière ou d’une autre ».
Alors qu’Agathe Lechevalier a souligné dans son discours d’ouverture « le fossé qui se creuse entre les propositions de régulation à l’installation et des jeunes médecins effrayés par le début d’exercice », Marguerite Cazeneuve a également évoqué « l’effet repoussoir » à l’installation de « tout ce qui fait qu’un médecin est un peu un petit chef d’entreprise ». « Il faut le prendre en considération et travailler avec les agences régionales de santé (ARS) et les collectivités pour vous proposer des cabinets clés en mains et que l’installation soit la plus facile possible », a ajouté la directrice déléguée de l'Assurance maladie.
Si elle se réjouit également que la jeune génération soit orientée vers le pluripro, la directrice déléguée estime aussi qu’il faut travailler pour qu’il permette d’avoir « une vraie vision globale sur le patient, sans perte de qualité, et avoir une organisation qui vous soulage mais ne laisse pas à votre charge que les choses les plus compliquées ».
Consciente que les jeunes médecins sont aussi très sensibles à la question de la santé publique, là encore elle estime que le travail est conséquent : « sur la promotion de la santé on est nul, sur la prévention médicalisée nous sommes loin des chiffres européens, sur la santé de l’enfant on est défaillant… », a-t-elle listé.
Autant de sujets qui seront notamment au programme des discussions de la future convention médicale. Si les remplaçants ne sont pas conviés, malgré les demandes de conventionnement rappelées pendant la cérémonie d’ouverture, Marguerite Cazeneuve a dit son intention de travailler avec les remplaçants et jeunes médecins d’une façon ou d’une autre, « car ce sont des discussions qui vont concerner votre avenir ».
Suspension de l’interne de Tours condamné pour agressions sexuelles : décision fin novembre
À Clermont-Ferrand, un internat où « tout part en ruine »
« Pour la coupe du monde, un ami a proposé quatre fois le prix » : le petit business de la revente de gardes
Temps de travail des internes : le gouvernement rappelle à l’ordre les CHU