Pr Christophe Hézode, hépatologue

« La bonne question du dépistage de l'hépatite C : avez-vous plus de 40 ans ? »

Par
Publié le 10/02/2020
Article réservé aux abonnés
Ancien chef du service d'hépatologie de l'hôpital Henri Mondor, le Pr Christophe Hézode est désormais directeur médical dans le laboratoire Gilead. Pour ce partisan du dépistage universel, tous les éléments sont réunis pour éliminer l'hépatite C dès 2025 en France.

Crédit photo : DR

LE QUOTIDIEN : Avec les moyens et stratégies actuelles, pensez-vous que l'objectif d'élimination du virus de l'hépatite C à l'horizon 2025 en France, est atteignable ?

Pr CHRISTOPHE HEZODE : Je pense que oui. Nous avons traité plus de 80 000 patients en France depuis l'arrivée du Sovaldi en 2014, mais il reste du travail dans le domaine du dépistage. Selon le baromètre de l'élimination de l'hépatite C, il reste environ 70 000 à 75 000 patients qui ne sont pas au courant de leur diagnostic.

En France, nous bénéficions à la fois d'une volonté politique en faveur de l'élimination de l'hépatite C et d'un engagement des sociétés savantes et des associations de patients. Pour arriver à cet objectif, plusieurs éléments sont nécessaires : un traitement remboursé et pouvant être prescrit par tous les médecins ainsi qu'un dépistage universel. Seule cette dernière condition n'est pas remplie, alors que la population générale représente un tiers de l'épidémie cachée.

Quelle forme pourrait prendre un dépistage de la population générale ?

Il faut cibler les plus de 40 ans. Selon une étude menée par l'association nationale des gastroentérologues des hôpitaux généraux, 90 % des patients adressés par un médecin généraliste, pour la prise en charge d'une hépatite C dans les hôpitaux généraux ont plus de 40 ans. Selon les dernières données épidémiologiques disponibles, la prévalence de l'infection par le VHC dans la population générale serait de 0,08 % chez les moins de 45 ans, et de 0,51 % chez les plus de 45 ans.

Les médecins généralistes n'ont pas forcément le temps de faire un questionnaire impliqué sur les facteurs de risque. La seule question simple à poser serait « avez-vous plus de 40 ans ? Si oui, sachez que vous pouvez vous faire dépister. » C'est la raison pour laquelle Gilead est partenaire de la campagne « Faites du bruit » de l'Association française pour l'étude du foie (AFEF) et de l'association SOS hépatite.

Gilead s'est associé à un certain nombre de programmes favorisant le dépistage et l'accès au soin. Quels sont les objectifs poursuivis par ces projets ?

Trois populations clés sont ciblées : les usagers de drogues, les patients traités dans les services psychiatriques et la population carcérale. La primoprescription des antiviraux à action directe par les non spécialistes est un levier essentiel.

La population psychiatrique n'est pas fréquemment citée dans les populations à risque. Pourtant la prévalence de l'hépatite C y est estimée à environ 5 %, soit du même ordre que dans la population carcérale et chez les usagers de drogues injectables. Un projet financé par Gilead vise à dépister systématiquement l'hépatite C chez les 2 000 à 3 000 patients vus chaque année dans les services d'addictologie et de psychiatrie de Nantes.

Il y a un réel challenge pour faire du dépistage et de l'accès au soin en prison. Notre laboratoire organise des formations pour les addictologues, les psychiatres et les médecins qui travaillent dans les prisons.

Propos recueillis par Damien Coulomb

Source : Le Quotidien du médecin