Chiropractie, étiopathie : des remboursements d’une caisse primaire ulcèrent les médecins, la Cnam s’explique

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Publié le 14/02/2024

Crédit photo : BURGER/PHANIE

Mardi 13 février, plusieurs médecins ont été interpellés par une notification publiée sur le compte X (ex-Twitter) de la CPAM de Seine-et-Marne (77) (supprimée le lendemain) au sujet d’une participation de leur part au remboursement des frais de séances d’ostéopathie, de chiropractie, d’ergothérapie, d’hypnothérapie, d’acupuncture, de sophrologie ou encore d’étiopathie. Ces pratiques dites « alternatives » se font en dehors du cadre de soin conventionnel et n’ont (pour certaines) pas fait l’objet d’études scientifiques ou cliniques reconnues, démontrant leur efficacité ainsi que leur innocuité.

Sur X (ex- Twitter), nombreux sont les praticiens à s’en être indignés.

Expérimentation pendant un an

Face à cette vague de colère, la CPAM 77 a tenté tant bien que mal de se justifier. « L’Assurance-maladie rembourse uniquement les soins de la médecine conventionnelle, c’est-à-dire ceux qui s’appuient sur des traitements qui ont obtenu une validation scientifique, dont l’efficacité est prouvée. Lors de la sortie de la crise sanitaire, la CPAM de Seine-et-Marne a pris en charge, dans le cadre de l’action sanitaire et sociale et de manière individuelle et exceptionnelle, des pratiques alternatives pour les assurés ayant des ressources limitées », lit-on sur son compte X.

Ces aides extra-légales, prévues dans le cadre du fonds d’action sanitaire et sociale* et votées par le Conseil, « ont été expérimentées pendant un an et ont finalement été suspendues à la demande de la Cnam, pour celles dont l’efficacité n’est pas reconnue par les autorités sanitaires », est-il encore précisé.

Contactée par Le Quotidien, la Cnam a tenté à son tour de calmer le jeu. « En sortie de crise sanitaire, ce fonds a été sous-utilisé, l’idée a donc été de l’optimiser davantage, assure la caisse nationale. Aujourd’hui, 99 % de cette enveloppe est destinée à la prise en charge de soins dentaires, à de l’optique, de l’audioprothèse ou encore de l’aide à l’acquisition d’une mutuelle pour les plus démunis. Effectivement, il y a 1 % de ce fonds prévu pour la prise en charge de pratiques non conventionnelles (diététique, ergothérapie, psychomotricité, ostéopathie etc. ). Ces pratiques concernent par exemple des enfants en situation de handicap qui n’ont pas de place en instituts médico-éducatifs. Nous sommes en revanche attachés au principe de prendre en charge uniquement des pratiques qui ont fait la preuve de leur efficacité et qui sont validées scientifiquement. Seules les pratiques non conventionnelles réalisées au sein d’établissements médico-sociaux ou hospitaliers sont remboursées. »

Quid alors de la chiropractie et de l’étiopathie parfois considérées comme étant à l’origine de dérives sectaires ? « Ces deux pratiques n’auraient en effet pas dû faire l’objet de remboursement car elles sortent du cadre national », reconnaît la Cnam. L’organisme en charge des dépenses de santé souhaite toutefois relativiser : « En Seine-et-Marne, l’étiopathie n’a fait l’objet d’aucun remboursement. En ce qui concerne la chiropractie, 200 euros (4 séances de 50 euros) ont été déboursés par la CPAM. Cela reste très minoritaire ». Pour qualifier cette bourde, l’Assurance-maladie préfère parler de « maladresse de communication » de la part de la CPAM 77.

Malgré une hausse importante du nombre de signalements à la Miviludes concernant la santé ces dernières années – passant de 214 en 2015 à 892 en 2021 – l’Assemblée nationale a voté hier contre l’instauration d’un délit visant à punir les dérives thérapeutiques dans le cadre de l’examen du projet de loi de lutte contre les dérives sectaires. La mesure était vivement soutenue par l’Ordre des médecins.

*Le fonds d’action sanitaire et sociale est une dotation nationale répartie entre les différentes caisses. Cette enveloppe est destinée à faciliter l’accès aux soins des personnes en situation difficile. Le fonds finance des aides ponctuelles à titre individuel ou en faveur d’associations. Chaque conseil d’une CPAM en a la responsabilité. En ce qui concerne la CPAM 77, cette dotation s’élève à 1 million d’euros par an.


Source : lequotidiendumedecin.fr