Protéger la santé et la sécurité des salariés sur leur lieu de travail relève d’une action pluridisciplinaire faisant intervenir aussi bien les employeurs que les salariés eux-mêmes. Le médecin du travail, comme salarié de l’établissement ou rattaché à un service de prévention et de santé au travail interentreprises (SPTSI), met en place l’ensemble des mesures nécessaires pour adapter les conditions de travail aux besoins de l’employé. Il est un élément essentiel qui protège le bien-être et la santé des salariés sur leur lieu de travail en identifiant les facteurs de risques et en conseillant les employeurs sur les problématiques liées aux conditions de travail.
« Notre activité comprend plusieurs types de missions, notamment une grande partie de consultations médicales à la demande des salariés ou à l’issue d’un arrêt de travail. Il s’agit de s’assurer de la compatibilité de l’état de santé du salarié avec le poste occupé et de mettre en place, si nécessaire, des aménagements de poste ou des restrictions sur certaines tâches », explique le Dr Thibault Blondin, qui exerce à la mairie d’Angers. Le médecin du travail participe alors au suivi individuel des salariés à travers les visites d’information et de prévention afin de s’assurer de leur état de santé et les prévenir sur les risques liés au poste de travail.
En cas d’arrêt de travail, les visites de pré-reprise et de reprise sont l’occasion d’accompagner les employés pour leur retour en entreprise
En cas d’arrêt de travail, les visites de pré-reprise et de reprise sont l’occasion pour les médecins du travail d’accompagner les salariés afin d’assurer leur retour dans l’entreprise. Avant le retour en poste, la visite de pré-reprise permet de prévoir, si nécessaire, des aménagements et des adaptations du poste, de faire des préconisations de reclassement ou encore de recommander des formations en vue d’une réorientation professionnelle. Au moment de la reprise, la visite médicale, obligatoire, permet de s’assurer de l’aptitude du salarié au poste de travail.
Prévenir les risques
Bien que cette pratique médicale ne soit pas une activité de soins, elle participe à la veille épidémiologique et à l’état de santé des travailleurs. Il s’agit en effet de prévenir les maladies professionnelles et les accidents du travail qui surviennent chaque année. En 2022 (dernier rapport annuel), l’Assurance-maladie a dénombré 564 189 accidents du travail ayant provoqué un arrêt de travail. Les causes principales de ces accidents relèvent notamment de la manipulation de charges (50 %) et des chutes (30 %), sans oublier les 89 483 accidents de trajet et, notamment, une augmentation régulière depuis 2017 des cas impliquant des vélos ou des trottinettes (8,5 % en 2022).
L’essentiel des 44 217 maladies professionnelles dénombrées en 2022 concernent les troubles musculosquelettiques provoqués notamment par certains gestes et postures de travail (79 %). Viennent ensuite les maladies professionnelles liées à l’amiante (5 %) ou d’autres affections comme les maladies respiratoires et certains cancers (5,6 %). Prendre en charge ces patients demande du temps aux médecins du travail mais aussi de se déplacer sur le terrain pour adapter la réponse aux besoins du patient.
Mais ce sont surtout les risques psychosociaux et les problématiques liées à la souffrance au travail qui occupent de plus en plus le temps des médecins du travail. « L’évolution du travail et de ses conditions demande de répondre à ces demandes qui ont fortement augmenté ces dix dernières années », explique le Dr Blondin. Il s’agit du stress lié au sentiment de ne pas répondre aux exigences, de violences internes ou encore du syndrome d’épuisement professionnel (burn-out). Ils pèsent sur la santé physique et mentale des salariés et perturbent le fonctionnement des différents lieux de travail. Absentéisme, turn-over, dégradation de l'ambiance de travail en sont des manifestations fréquentes.
Manque de visibilité de la discipline
Même si le médecin du travail est un acteur central en charge de la qualité de vie au travail, ses missions et son rôle restent encore mal identifiés par l’ensemble des salariés. Une enquête Ifop de septembre 2023, commandée par le Groupement santé au travail, révélait par ailleurs que près d’une entreprise sur cinq émettait des réserves sur la médecine du travail. Elles étaient même 29 % à se sentir mal accompagnées sur les risques professionnels.
Pourtant, une fois bien identifiés, les services de médecine du travail constituent un réel soutien pour les salariés. « En ce qui nous concerne, nous avons la chance d’avoir un périmètre d’action et des missions bien identifiés à la fois par les agents, nos services et nos directions », précise Thibault Blondin. Ce qui permet d’avoir une visibilité globale de l’environnement de travail et de voir les agents plus régulièrement. « Dans le privé, les médecins du travail suivent plusieurs entreprises et donc plus de salariés, ce qui rend cet exercice plus compliqué », conclut le médecin.
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