« Est-ce grave Docteur ? ». Informer ses patients est une obligation. Le Code de la santé publique stipule que « Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé ». Ce même article rappelle aux médecins que : « Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables ».
La loi Kouchner du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, confirme le droit du patient à l’information. En 1998, à l’occasion des premiers États généraux des malades organisés par la Ligue nationale contre le cancer, l’idée de créer une « consultation d’annonce » voit le jour. Il s'agit alors d'une demande forte des patients. Ces derniers veulent une annonce d’entrée dans la maladie plus humaine, mieux encadrée et mieux organisée.
Depuis le 1er novembre 2017, deux consultations « très complexes » d'annonce de maladies graves sont entrées en vigueur pour les généralistes. Il s'agit de deux nouvelles cotations valorisées à 55 euros (G à 25 euros + majoration de 30 euros). Tout d'abord, la MIS, qui valorise la consultation initiale d’annonce de certaines maladies à potentiel évolutif ou à caractère chronique (cancer et pathologies neurodégénératives) et la PIV, la consultation d’annonce du VIH. Ces deux nouvelles majorations sont cotées MTX auprès de la caisse.
Préparer l'annonce
Il existe de multiples recommandations à destination du personnel soignant pour ce type de consultation. Malgré cela, l’annonce d’une grave maladie dont le pronostic est défavorable au patient et pour laquelle les traitements curatifs sont inexistants ou incertains, engage la relation médecin-patient. De nombreux ouvrages ont été publiés (1) à ce sujet, mais il n’est pas au programme des études universitaires. Aucune formation officielle enseigne aux médecins le processus d’annonce d’une grave maladie. Pour pallier ce manque, la Haute autorité de santé (HAS) a publié un guide (2) en 2014.
Souvent proche de son patient qu’il suit depuis des années, le médecin traitant devient alors porteur d’une mauvaise nouvelle. Une position difficile à assumer pour le praticien et une étape de la carrière vécue souvent comme une épreuve. Comment s’y préparer ? La première étape consiste à rassembler l’ensemble des connaissances que l’on a de son patient. Cela permet d’adapter l’annonce à son auditeur. Qui est-il, quelle est sa situation familiale, sociale, professionnelle ? Que sait-on de son état de santé, de son évolution, ses handicaps ?
Se renseigner sur la pathologie permet aussi d’apporter une réponse aux questions que le patient posera : quels sont les options thérapeutiques, les effets des traitements, leurs contraintes. En quoi la vie quotidienne du patient va-t-elle être affectée, quelles seront les atteintes fonctionnelles et quel est le pronostic à court et moyen terme de la maladie ?
Il est également nécessaire de se renseigner sur les filières de prise en charge en équipe pluriprofessionnelle et de conseiller au patient de se rapprocher des associations de malades qui offrent de précieux conseils et participent à rompre l’isolement face à la maladie.
Adopter la bonne attitude
En quelques secondes, avec une poignée de mots, le médecin va radicalement bouleverser le cours de la vie de son patient. Si maîtriser son sujet est important, savoir comment l'annoncer ne l’est pas moins. Prendre son temps pour ne pas bâcler l’annonce, signifie bien entendu bannir toute information par téléphone.
L’annonce se fait au cabinet en veillant à ne pas être dérangé pendant la consultation par le téléphone ou le secrétariat. Pour conserver une relation de confiance avec le patient, la vérité est à dire avec des mots simples et la maladie doit être nommée. Un vocabulaire ou un jargon trop technique risquent d’être mal compris.
Le langage du corps a son importance. Certaines attitudes ou postures physiques traduisent un malaise et une gêne. Elles peuvent être apparentées à de la froideur et de l’indifférence. Annoncer une mauvaise nouvelle requiert d’être dans l’empathie, le respect, l’écoute et la communication. De son côté, le patient aura besoin de temps pour digérer la mauvaise nouvelle. Si l’annonce est correctement effectuée, son impact pourra être atténué mais elle sera tout de même vécue comme un choc et les réactions pourront varier d’une personne à l’autre.
V.A.
(1) Cancer du sein, un médecin à l’épreuve de l’annonce, du Dr Laurent Puyuelo, ed. Erès, K. Histoires de crabe. Journal, de Marie-Dominique Arrighi, Ed. Bleu autour. L’Annonce. Dire la maladie grave, de Gil Rabier et Martine Ruszniewski, Ed. Dunod.
(2) Parcours de soins- Maladie chronique. Annonce et accompagnement du diagnostic d’un patient ayant une maladie chronique, HAS, février 2014.
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