Chez vos libraires

En quête de la consultation idéale

Par
Publié le 09/03/2018
Article réservé aux abonnés
Avec ses 40 histoires extraordinaires, le Pr Philippe Humbert, dermatologue au CHU de Besançon, énumère les règles d’or à respecter pour ne plus « passer à côté du bon diagnostic ».
Couverture livre

Couverture livre
Crédit photo : DR

« Le bon médecin est celui qui guérit la maladie, le grand médecin est celui qui guérit le malade. » Le Pr Philippe Humbert (service de dermatologie, CHU Besançon) a fait sien cet aphorisme en exposant 40 histoires « extraordinaires » de patients, et autant d’énigmes singulières à résoudre, dans son livre « Avez-vous un bon médecin ? »*. En filigrane se dessine la « consultation idéale ».

Humilité, persévérance

« J’ai compris l’épuisement de certains malades à revenir sans cesse exprimer les mêmes plaintes, l’énervement de certains médecins leur renvoyant la responsabilité des troubles : c’est dans votre tête, vous êtes stressé. » Le Pr Humbert a petit à petit intégré que dilater les bronches d’un malade asthmatique ne suffit pas. Appris à détecter les « facteurs déclenchants ». Un eczéma peut ainsi provenir d’un problème digestif, et une constipation d’un cancer du côlon.

Depuis plusieurs mois, les doigts d’un patient deviennent blancs lors d’une exposition au froid. C’est le syndrome de Raynaud, qui concerne 5 % de la population. Souvent bénin, il témoigne parfois d’une maladie auto-immune comme un lupus érythémateux. Compliqué à détecter, celui-ci apporte une rougeur fixe au visage l’été, des douleurs articulaires les autres saisons, et parfois de l’albumine dans les urines. Cette collagénose reste généralement dans la même famille. Chaque membre peut la développer à sa façon, et seul le médecin pourra faire des rapprochements.

Alors, quelle recette pour être un Dr House ? Aller « derrière » les symptômes immédiatement décrits et défier des apparences. « Mon médecin ne se contente pas de regarder là où ça fait mal », expose Patrick Humbert. Une approche globale donc, pour aller à la source : voilà de quoi renforcer une spécificité du généraliste, “chef d’orchestre” du parcours de santé qui appréhende le contexte, récolte un maximum de données, les hiérarchise et les relie. Il est curieux de tout symptôme. Il échange avec les confrères, se remet en question et persévère.

Gagner du temps

L’interrogatoire rime avec une écoute de qualité. Une entrave de taille à cela : les patients cachent des informations, souvent non consciemment : données embarrassantes, symptômes « négligeables » d’après eux. D’où l’impératif de nombreuses questions, et de ne laisser aucune hypothèse de côté. C’est là qu’advient le facteur temps. Avec le C à 25 euros, les caisses ont privilégié des consultations courtes, mais d’après l’auteur, cela représente des pertes de chance pour le patient. Si du temps lui est consacré, il sort avec un diagnostic précis et, au bout du compte, un gain de temps, d’argent et d’efficacité pour le système de soins.

Dans cette approche holistique, quel rôle du Big Data ? Les données en santé se massifient et les outils pour les traiter s’affinent. Dr Clic surpassera-t-il Dr House ?

Pr Philippe Humbert. « Avez-vous un bon médecin ? 40 histoires extraordinaires pour ne plus passer à côté du bon diagnostic ». Éditions Fayard, 2018, 384 p., 19,50 euros.

Sabrina Moreau

Source : lequotidiendumedecin.fr