Grève totale des biologistes libéraux : « On est à l'os ! », alerte le Dr Claude Cohen (SNMB)

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Publié le 22/10/2019

Crédit photo : DR

À compter de ce mardi 22 octobre, les laboratoires de biologie médicale seront fermés jusqu'au jeudi 24 octobre inclus. Les biologistes médicaux protestent contre les économies réclamées au secteur en 2020, alors que leurs syndicats représentatifs sont en pleine négociation d'un protocole d'accord avec l'Assurance-maladie. Pour le Dr Claude Cohen, à la tête du Syndicat national des médecins biologistes (SNMB), les propositions de la CNAM sont irréalistes, et la profession est exsangue.

LE QUOTIDIEN : Les laboratoires de biologie médicale ferment aujourd'hui, pour trois jours. Concrètement, comment cela va-t-il se passer ?

Dr CLAUDE COHEN : Les laboratoires seront fermés mais on travaille avec les cliniques et les urgences sont dirigées vers l'hôpital. Si des patients sont adressés par leur médecin traitant pour des actes importants, qui concernent la procréation médicalement assistée (PMA), des chimiothérapies ou des problèmes rénaux par exemple, nous les prendrons. Les grilles des laboratoires seront fermées mais les biologistes seront présents sur les sites, pour qu'il n'y ait pas de problèmes de santé publique.

La précédente grève, fin septembre, a mobilisé 95 % de la profession ! Nous pointons région par région les laboratoires grévistes, et ceux qui ne le sont pas pour essayer de les convaincre.

Pourquoi les biologistes sont-ils si mobilisés depuis septembre ?

On nous impose une économie de 170 millions d'euros rien que pour 2020. C'est notre troisième protocole d'accord avec l'Assurance-maladie mais, là, on n'y arrive plus. On ne peut pas, jusqu'à la fin de nos jours, continuer sur ce rythme, on a fait toutes les économies d'échelle possibles, désormais, on est à l'os ! Le risque est que les biologistes ferment des sites non rentables, des sites en campagne, ce qui ne fera que dégrader la proximité et rallonger les rendus de résultats.

Nous sommes pour un renouvellement du protocole d'accord, mais pas à ces conditions. Nous avons donc décidé de trouver des moyens de pression progressifs : cela a commencé par une grève l'après-midi, pour voir comment ça prenait. Hélas, le 17 octobre, nous ne sommes pas arrivés à un accord avec la CNAM, nous avons donc relancé ce mouvement. Le dernier rendez-vous avec l'Assurance-maladie est le 6 novembre.

Pourquoi les propositions de la CNAM ne satisfont pas les biologistes ?

En gros, la négociation financière porte sur deux points : le chiffre de départ des dépenses de biologie pour 2020 et la progression annuelle ensuite. Le directeur général de l'Assurance-maladie s'est rapproché de nos positions, mais ce n'est pas encore suffisant. Le chiffre proposé en dépense autorisée pour 2022 est, à trois ou quatre millions d'euros près, le chiffre qui a été réellement fait en 2019 ! Cela n'est pas possible. On ne peut pas, quand l'évolution naturelle des dépenses de santé est de 4,4 % et que l'ONDAM est à 2,3 %, être à 0,5 % ou 0,25 % par an pour la biologie...

De plus, tous les ans, de nouveaux actes sont introduits au remboursement, comme le dépistage prénatal non invasif (DPNI) récemment. 45 à 50 actes devraient entrer dans la nomenclature de biologie prochainement. Mais ceux-là seront dans une enveloppe étanche, l'Assurance-maladie nous l'a assuré.

Que va-t-il se passer si vous ne parvenez pas à un accord ?

Je ne sais pas si on pourra aller au-delà du 6 novembre en termes de négociation. S'il n'y a pas de protocole d'accord, ce sera la bagarre ! C'est l'Assurance-maladie qui prendra les décisions toute seule : si elle veut baisser des tarifs des actes de la nomenclature elle le fera, mais sans nous. C'est ce qui se passait avant que l'on décide de mettre en place les protocoles d'accord en 2014…


Source : lequotidiendumedecin.fr