« Aujourd'hui, on reçoit plus de prélèvements que l'on ne peut en traiter, notamment avec le criblage », alerte François Blanchecotte, président du Syndicat des biologistes

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Publié le 07/01/2022
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Crédit photo : PHANIE

Les laboratoires de biologie médicale sont mis à rude épreuve par la flambée épidémique due au variant Omicron ces dernières semaines. Santé publique France a annoncé ce matin que, pour la seule journée de lundi dernier, 409 370 nouveaux cas positifs avaient été enregistrés, selon la plateforme SI-DEP qui rassemble les données remontant des laboratoires et des soignants. Un record absolu de nombre de cas positifs quotidiens. Par ailleurs, le coût des tests a atteint le milliard d'euros pour le seul mois de décembre. Dans ce contexte, le président du Syndicat des biologistes (SDB), le François Blanchecotte alerte sur les difficultés des laboratoires et anticipe de prochaines baisses de tarifs.

LE QUOTIDIEN : Face à l'explosion du nombre de tests, quelle est la situation dans les laboratoires de biologie médicale ?

FRANÇOIS BLANCHECOTTE : Nous avons réalisé un sondage auprès des biologistes, auquel ont répondu environ 50 % des structures du territoire. La première chose qui ressort, c'est que le nombre de prélèvements reçus dans les laboratoires est supérieur à leurs capacités techniques. Aujourd'hui on reçoit plus de prélèvements que l'on ne peut en traiter, notamment avec le criblage (qui permet de déterminer les variants, N.D.L.R.).

21 % des laboratoires criblent en première intention, 40 % sous-traitent ce criblage et les autres le réalisent en seconde intention. Cela a des conséquences sur les délais de rendu de résultats car des laboratoires qui criblent en seconde intention ou sous-traitent ont souvent des délais plus longs. Par ailleurs, 90 % des laboratoires interrogés estiment que le criblage quasi systématique des tests positifs n'a plus grand intérêt. Cela va dans le sens de l'arrêté paru hier au Journal officiel, qui indique de réaliser un criblage d’au moins 25 % des prélèvements RT-PCR positifs, contre 80 % précédemment.

Constatez-vous des pénuries de personnels ou de matériels ?

Oui, le problème le plus aigu pour les biologistes actuellement, c'est un problème de ressources humaines. Il y a besoin avant tout de techniciens, de préleveurs et de secrétaires, mais presque un laboratoire sur 5 (18 %) indique aussi manquer de biologistes. Il manque des bras, et c'est pour cela qu'un certain nombre d'étudiants en santé et en sciences peuvent éventuellement travailler dans les laboratoires, en tant que préleveurs, pour faire de la saisine administrative, voire pour certains d'entre eux sur la partie biologie moléculaire. Toutefois, le nombre de PCR devrait finir par retomber, d'autant que la doctrine du ministère a évolué et prévoit désormais de ne plus faire de RT-PCR après un test antigénique positif.

Par ailleurs, 17 % des labos ont des soucis d'approvisionnement pour ses machines et 43 % des problèmes de consommables. Cela fait plus d'un labo sur deux qui a des difficultés, principalement sur les cônes, les pipettes, les plastiques d'extractions, les microtubes, voire sur certains réactifs machines. Et devant la demande mondiale, il y a aussi une inflation des prix, notamment sur les gants. Cela augure des discussions tendues sur nos tarifs, qui doivent se tenir la semaine prochaine avec l'Assurance-maladie.

De nouvelles baisses tarifaires sont-elles à prévoir ?

Oui, des discussions vont s'ouvrir le 13 janvier avec la Cnam et des baisses sont dans les tuyaux. Nous sommes déjà passés de 54 à 27 euros (B100) pour le PCR, et de 5,40 euros à 2,70 euros pour remplir la déclaration sur SI-DEP. Il y aura certainement une baisse de 20 ou 30 % sur le tarif du PCR, pour arriver à B80 ou B70… Il va falloir trouver un chemin dans la négociation, car il faut une cohérence entre ce que veut le comité scientifique et les dépenses de l'État, et nous devons être conscients de ces arbitrages. Je sais que cela fait hurler de nombreux biologistes quand on parle de baisses de tarifs, mais on doit arriver à un arbitrage entre les services rendus et les finances que les générations futures auront à rembourser.

En revanche, je ne suis pas favorable à une nouvelle baisse de SI-DEP, car cela représente un sacré boulot administratif, ni à une diminution du bonus (B25) pour les tests rendus en moins de 24 heures, car les labos qui font l'effort d'installer des technologies et de rendre des résultats rapidement doivent être récompensés. Cela demande du personnel, de l'adaptabilité et des investissements.


Source : lequotidiendumedecin.fr