Conflits sur la redevance et les dépassements, CME en souffrance

Cliniques et praticiens libéraux : frictions sur la ligne

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Publié le 11/09/2017
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Crédit photo : SEBASTIEN TOUBON

Malaise dans le secteur privé. Parmi les 36 000 médecins qui exercent une activité libérale en clinique, de nombreuses voix déplorent la dégradation des liens qui unissent les professionnels aux 1 000 établissements privés lucratifs.

Avec 57 % des interventions chirurgicales et 68 % de la chirurgie ambulatoire, le secteur privé lucratif assure une part significative de l'offre de soins. Pour autant, les cliniques composent de plus en plus difficilement avec les baisses tarifaires imposées par le gouvernement. Près d'une clinique sur trois est dans le rouge, rappelle la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP). « Les tarifs ont baissé de 8 % en cinq ans, ces contraintes budgétaires ont évidemment un impact sur nos relations avec les médecins, même si la majorité d'entre eux conserve le sens du collectif », a expliqué le patron du groupe Elsan Jérôme Nouzarède, lors des Rencontres URPS de la Baule. 

La forte concentration du parc hospitalier privé et la montée en puissance de supergroupes sous la houlette de managers et actionnaires non-médecins contribuent à la création d'un climat anxiogène dans la communauté médicale qui, parfois, se replie sur elle-même. De plus en plus souvent, les praticiens libéraux désertent les commissions médicales d'établissement (CME), n'opposant plus de contre-pouvoir médical aux directions par ailleurs décriées. « Avant, les médecins étaient propriétaires des cliniques, qui appartiennent aujourd'hui à des groupes capitalistiques. La question de la place du médecin dans la structure se pose », analyse le Dr Jean-Paul Ortiz, patron de la CSMF. 

Conflit sur les prestations de service au bloc

La redevance est l'un des points majeurs de crispation entre médecins et cliniques. En toute logique, les libéraux doivent reverser aux établissements une partie de leurs honoraires pour la mise à disposition de prestations et services (hors soins médicaux). Le pourcentage moyen et la nature de la redevance sont négociés dans le cadre d'un contrat qui lie les deux parties. Or, des chirurgiens de l'UCDF reprochent aux cliniques d'intégrer dans cette redevance la mobilisation d'infirmiers de blocs qui, selon eux, relèvent de la facturation classique (GHS). « On nous demande de payer les aides opératoires et, en parallèle, ça nous est difficile d'augmenter nos honoraires en compensation », témoigne le Dr Pierre Devallet, chirurgien orthopédique en bisbille avec la clinique du Pont-de-Chaume (Elsan), à Montauban. Pour Thierry Béchu, délégué général de la FHP-MCO, « il n'y a pas de débat » : facturer le coût des aides opératoires à la charge des chirurgiens est légitime.

L'offensive du gouvernement précédent pour réguler les dépassements d'honoraires a également laissé des traces dans la relation médecins/cliniques. Depuis deux ans, la FHP s'est emparé du sujet en se piquant d'afficher un « reste à charge zéro » en milieu hospitalier (sur la chambre individuelle, les dépassements et le forfait journalier), grâce à une solvabilisation de l'assurance-maladie et des complémentaires santé. « Cette communication n'est pas de nature à froisser les libéraux, puisque l'idée est de solvabiliser les dépassements par les complémentaires santé, analyse le Dr Jean-Luc Baron, chirurgien plasticien, à la tête de la conférence des présidents de CME de l'hospitalisation privée. En revanche, sur le terrain, des directeurs en profitent pour pousser à pratiquer des tarifs opposables pour faire de l'activité. Clairement, le conflit est là. »

 

 

 

 

Anne Bayle-Iniguez

Source : Le Quotidien du médecin: 9600