Covid-19 : l'arrêt de travail en ligne « immédiat » fait tiquer les généralistes et inquiète les entreprises

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Publié le 11/01/2021
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Crédit photo : S.Toubon

Lors des dernières annonces du gouvernement sur la situation sanitaire, le premier ministre a annoncé la possibilité – afin d'optimiser les mesures d'isolement – de s'inscrire sur le site de l'Assurance-maladie pour obtenir un arrêt de travail « immédiat » à partir du 10 janvier et jusqu'au 31 mars 2021. Cet arrêt de travail sera « indemnisé et sans jour de carence » pour les personnes avec des symptômes ou qui sont cas contact, a précisé Jean Castex. « L'Assurance-maladie procédera à un suivi systématique avec deux à trois appels téléphoniques sur sept jours. Chaque personne déclarée positive se verra proposer à compter du 20 janvier une visite à domicile par un infirmier », a ajouté le chef du gouvernement.

Un test dans les deux jours

Désormais, une personne ayant des symptômes ou cas contact pourra ainsi se signaler elle-même et son arrêt de travail commencera dans la foulée. Les personnes concernées peuvent se déclarer sur ameli (ou la MSA) et reçoivent un récépissé leur permettant de justifier leur absence auprès de leur employeur, précise le ministère. Elles s'engagent à réaliser un test antigénique ou RT-PCR dans les deux jours suivants (et doivent indiquer la date et le lieu de leur test de dépistage). Si le résultat est négatif, elles peuvent reprendre leur activité professionnelle (avec un document attestant des dates acceptées pour l’arrêt de travail), si le test est positif, l'arrêt est prolongé.

Exit donc la visite chez le médecin traitant pour les personnes symptomatiques – même si les cas contacts à risque pouvaient déjà demander un arrêt de travail de sept jours en ligne via un téléservice ameli, après avoir été identifiés comme cas contact (dans le cadre du « contact tracing »).

Mauvaise communication

L'arrêt de travail auto-prescrit en trois clics ? Cette innovation, censée simplifier les démarches, ne plaît guère aux médecins généralistes.

L’UFML-Syndicat l'a aussitôt « dénoncée ». « Un arrêt de travail n’est en rien une formalité administrative. C’est un acte médical et thérapeutique destiné à un patient dont l’état de santé le requiert. L’Assurance-maladie ne peut s’arroger le droit de faire ce qu’elle a interdit à arretmaladie.com », tempête l'UFML-S, qui craint un isolement des patients qui n'auraient plus besoin de voir leur médecin, et donc « des pertes de chance ». La Sécu « joue au docteur aux dépens des patients », persifle l'organisation du Dr Jérôme Marty. 

« C'est aberrant d'en arriver là et cela choque beaucoup de généralistes, abonde le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF. Cette problématique était déjà apparue avec les tests antigéniques. Souvent nous n'étions pas informés du résultat de ces tests, et le virus continuait à se propager !  »

Absentéisme ? 

MG France regrette « un problème de communication » autour de ce dispositif d'arrêt de travail en ligne. « Cela part d'une bonne intention, le fait qu'il n'y ait pas de délai de carence est intéressant car il permet au salarié de s'arrêter sans crainte de perdre de l'argent, reconnaît le Dr Jacques Battistoni, son président. Mais il n'a pas été souligné la nécessité de continuer à voir son médecin traitant, et c'est dommage. » Le syndicat a demandé à Thomas Fatôme de corriger le tir et espère une rectification prochaine.

De son côté, le patronat a fait part de ses vives craintes face à ces arrêts « sans aucun contrôle médical ni test préalable ». La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) redoute « une très forte augmentation des arrêts maladie » et un « absentéisme incontrôlé risquant de désorganiser les entreprises ».


Source : lequotidiendumedecin.fr