« Donner du temps médical en dehors de leur zone » : Buzyn s'interroge sur la régulation des spécialistes

Par
Publié le 26/06/2018
Vigier Buzyn

Vigier Buzyn
Crédit photo : Assemblée nationale

Lancée en mars, la commission d'enquête parlementaire sur l'égalité d'accès aux soins des Français – dont les conclusions sont attendues le 25 juillet – mène ses auditions à un rythme effréné. Ce mardi, Agnès Buzyn a été soumise aux questions d'une dizaine de députés et de Philippe Vigier (Eure-et-Loir, UDI), rapporteur de la commission et auteur de plusieurs propositions de loi visant à contraindre l'installation des médecins.

Dès le début de l'audition, la question de la régulation à l'installation des médecins libéraux est revenue sur le tapis. Guillaume Garot, député socialiste de la Mayenne, est passé à l'offensive. L'élu s'est dit « sceptique » quant aux mesures prévues dans le plan d'accès aux soins que la ministre de la Santé s'évertue à décliner devant la commission. « Vous proposez toujours de l'incitation ! Je ne suis pas sûr que cela puisse produire les effets escomptés. Vous n'avez pas utilisé le mot de régulation qui existe pour d'autres professions qui fonctionnent. Pourquoi s'interdit-on de parler de régulation à l'installation des médecins ? »

Face à cette interpellation, Agnès Buzyn s'est d'abord montrée pédagogue. « Je ne passe pas uniquement par les mesures incitatives financières, comme des bonus sur les consultations ou le cumul emploi retraite. Dans le plan d'accès aux soins, nous avons développé davantage de stages dans les territoires, en ouvrant les stages dans les maisons de santé par exemple. Les jeunes vont être obligés d'aller dans ces structures », a-t-elle plaidé.

Ne pas décourager les jeunes

Quant à la coercition à l'installation stricto sensu, elle n'y croit toujours pas. Et les raisons sont multiples : cela n'est possible que pour les professions surdotées comme les infirmières, ce qui n'est pas le cas des médecins, profession sous-dotée. Agnès Buzyn pointe surtout le risque de décourager les jeunes. « On doit inventer un autre système et on s'y emploie », assure-t-elle.

Mais pour montrer qu'elle n'est pas hermétique à toute « régulation », Agnès Buzyn a évoqué une mesure du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qu'elle a qualifié à deux reprises d'« intéressante » : réguler l'installation des spécialistes de secteur II dans les zones surdotées, en conditionnant leur conventionnement à la réalisation de consultations avancées régulières dans les zones sous-denses.

Dans ses propos, la ministre n'a nullement évoqué la fin de la liberté d'installation mais elle n'a pas fermé la porte à ce qui s'apparente à une forme de conventionnement sélectif. « Lier le conventionnement au fait que les gens accepteraient de donner du temps médical en dehors de leur zone est un mode de régulation intéressant, résume-t-elle pour la première fois. Cela veut dire qu'on va demander aux médecins de donner une journée par semaine dans un hôpital de proximité ou par exemple, dans une maison de santé pluriprofessionnelle, aller donner du temps de spécialiste… Pourquoi pas, c'est une forme de régulation », a-t-elle reconnu.

Philippe Vigier a enfin pressé la ministre de se positionner sur des mesures jugées urgentes, dont le financement des nouvelles communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ou la création d'un nouveau statut pour les remplaçants. Agnès Buzyn a rappelé que plusieurs mesures sont en cours – création d'un « statut » de médecin adjoint ou guichets uniques régionaux pour faciliter l'installation des jeunes médecins.

Interrogée par Jean-Michel Jacques, député LREM du Morbihan, sur les infirmiers en pratique avancée (IPA), Agnès Buzyn a reconnu que l'accord sur ces pratiques avancées était un « consensus mou ». « Mais nous y allons », s'est-elle défendue.


Source : lequotidiendumedecin.fr