Nicolas Revel (CNAM) : « Les médecins généralistes recevront une prime moyenne de 6 264 euros »

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Publié le 27/04/2015
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Crédit photo : S. Toubon

LE QUOTIDIEN : Pouvez-vous nous dire quelle sera la prime moyenne versée aux médecins et plus particulièrement celle des généralistes au titre de 2014 ?

NICOLAS REVEL : La ROSP va être versée aux 89 000 médecins qui en bénéficient dans les tout prochains jours. Les médecins généralistes recevront une prime moyenne de 6 264 euros, en hausse de 8,5 % par rapport au montant versé pour 2013. Ce sont des chiffres en progrès car les résultats sont en progrès. C’est donc une bonne nouvelle pour les médecins, mais aussi pour la santé publique. Cette prime sera versée cette année trois semaines plus tard que d’habitude afin d’intégrer les nouveaux médecins installés. Les années précédentes, ils recevaient leur prime plusieurs mois après. Notre souhait a été de verser la ROSP à tous les médecins en même temps.

 

La ROSP a-t-elle permis d’améliorer les pratiques médicales l’an dernier ?

L’année 2014 marque une nouvelle amélioration des résultats puisque 14 des 19 indicateurs cliniques sont en progression. Chez les généralistes, le taux d’atteinte global des objectifs a augmenté de 53 % en 2012 à 65,3 % en 2014. Au total, ce sont plus des deux tiers des médecins éligibles qui, cette année, ont amélioré le niveau d’atteinte de leurs objectifs. La ROSP s’installe comme un élément durable d’accompagnement des médecins et d’amélioration de leur pratique. Elle est aujourd’hui admise et comprise par les praticiens.

 
Sur quels indicateurs avez-vous enregistré les progrès les plus notables ?

Nous observons un net progrès dans le suivi des pathologies chroniques, tout particulièrement du diabète. La part des patients diabétiques qui ont eu des dosages réguliers de l’hémoglobine glyquée est en hausse de 7,5 points depuis 2011. Cela représente 235 000 patients supplémentaires. C’est un résultat important car on sait que ce type de pratiques est difficile à faire évoluer. De la même manière, les résultats ont progressé sur la prévention des risques liés à l’iatrogénie médicamenteuse chez les personnes âgées. Nous enregistrons une diminution du nombre de patients traités par benzodiazépines à demi-vie longue. La progression de la prescription en génériques est spectaculaire. Sur les antidépresseurs, les prescriptions dans le répertoire se sont accrues de 7,5 points entre 2013 et 2014. Les prescriptions d’IPP et d’anti-hypertenseurs ont largement dépassé l’objectif cible.
 

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La ROSP continue donc d’engranger des progressions même si elles sont moindres qu’au début. C’est normal pour un dispositif qui commence à arriver à maturité.

 

L’informatisation des cabinets est-elle selon vous un pari gagné grâce à la ROSP ?

C’est un pari en passe d’être gagné et qui doit aboutir à redonner du temps aux médecins pour faire de la médecine. La ROSP a permis de les accompagner dans leur équipement d’un logiciel métiers et d’aide à la prescription certifiés. La télétransmission des feuilles de soins chez les médecins généralistes dépasse maintenant les 90%. Seul un petit nombre de médecins, très souvent proches de la retraite, n’ont pas souhaité s’équiper. Il reste à améliorer la dématérialisation des arrêts de travail, dont seulement un quart est télétransmis.

 

 

Les médecins peinent à améliorer leurs résultats dans le dépistage du cancer du col et du sein ou la vaccination contre la grippe. Comment renforcer leur efficacité dans le champ de la prévention ?

Le taux de vaccination contre la grippe ou le taux de dépistage des cancers sont malheureusement en recul depuis quelques années. C’est préoccupant et nous devons agir. Cette réflexion dépasse le cadre de la ROSP. L’assurance-maladie devra intensifier, aux côtés des autres acteurs de santé publique, son soutien aux médecins afin de les doter d’outils plus efficaces. Nous travaillons aux moyens d’améliorer le dépistage de la rétinopathie compte tenu des difficultés d’accès aux ophtalmologistes. Nous avons développé un nouveau dispositif innovant fondé sur la télémédecine pour permettre que l’examen soit réalisé par des orthoptistes et encadré par des ophtalmologues, le tout étant pris en charge à 100 % par l’assurance-maladie. L’assurance-maladie déploie par ailleurs un nouveau dépistage immunologique du cancer colorectal. Cela ne fait pas partie des indicateurs de la ROSP mais c’est une avancée importante car il s’agit du 2e cancer le plus mortel dans notre pays.

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La ROSP a 3 ans. Quel bilan en tirez-vous ? Allez-vous faire évoluer certains indicateurs ?

La ROSP a l’immense mérite d’exister et elle produit de véritables effets. Nous ne changerons pas le dispositif à court terme car les médecins ont besoin de visibilité. Il continuera de s’appliquer tel qu’il est en 2015. La question de son évolution se posera dans la future convention médicale. Nous devons commencer à y réfléchir avec l’ensemble de la communauté médicale. Ma conviction est que la ROSP a vocation à demeurer un élément central et durable de la rémunération des médecins. J’observe que tous les grands pays européens voisins (Angleterre, Espagne) se sont dotés d’un dispositif proche.

La ROSP est une chose mais les syndicats de médecins réclament une revalorisation de la consultation généraliste à 25 euros. Prévoyez-vous toujours d’ouvrir les négociations début 2016 ?

Je suis même prêt à les ouvrir dès après les élections aux URPS qui se tiendront en octobre prochain. C’est donc un calendrier à la fois proche et raisonnable ce d’autant que le terme de la convention actuelle interviendra précisément à l’été 2016. Cela va arriver vite et nous devons préparer ce rendez-vous très important en engageant sans attendre des réflexions préparatoires avec tous les syndicats représentatifs qui le souhaiteront. J’y suis prêt.

 

 

Certains syndicats appellent les généralistes à coter le C à 25 euros. Cela a-t-il un impact sur les surcotations ?

Ce phénomène concerne moins de 0,4 % des feuilles de soins des généralistes. Le nombre des médecins qui cotent de manière épisodique le C à 25 euros se situe autour de 600. Cette pratique, si elle reste donc très limitée, n’en est pas moins inacceptable car elle fait peser un reste à charge injustifié sur les assurés. J’ai demandé aux caisses primaires de leur adresser un courrier pour les rappeler à leurs obligations conventionnelles. À l’issue de cette étape, s’il devait y avoir de nouvelles cotations à 25 euros, nous serions amenés à appliquer les sanctions prévues par les textes.

 

 

 

Propos recueillis par Christophe Gattuso

Source : Le Quotidien du Médecin: 9407