Le congrès des médecins allemands dominé par un conflit tarifaire

Outre-Rhin aussi, les praticiens réclament des revalorisations 

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Publié le 02/06/2016
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Médecins français et allemands, même combat ? Dans les deux pays en tout cas, la question tarifaire est devenue conflictuelle. 

Si 87 % des assurés sociaux allemands dépendent de l’assurance maladie publique, dans laquelle les honoraires sont sévèrement encadrés, les 13 % restant dépendent d’assurances privées qui garantissent aux médecins des revenus plus élevés (calculés selon d’autres règles).

Cette grille tarifaire privée fait l’objet, depuis plus de 5 ans, d'âpres négociations entre les médecins et ces caisses privées. Un compromis a été trouvé il y a quelques semaines prévoyant une rapide revalorisation de 5,8 % des « points » constituant ces honoraires – mais aussi le remboursement d’actes qui n’existaient pas lors de la dernière refonte de la nomenclature.

L'enjeu n'est pas anodin. Car s’il n’existe pas en Allemagne de « secteur » à honoraires libres, l'existence des assurances privées joue pour les médecins une fonction de soupape financière comparable. Outre les caisses privées, les organismes publics proposent aussi à leurs assurés – moyennant une cotisation complémentaire – d’être soignés comme les patients « privés ».

Rattrapage tarifaire de 30 %

Le président de l’Ordre des médecins, le Dr Frank Ulrich Montgomery, a supervisé ces négociations syndicats/caisses sur les tarifs privés. Mais il est confronté à la contestation très vive d'un nombre croissant de médecins qui ont même tenté, lors du congrès, de le démettre de ses fonctions en raison des résultats jugés insuffisants des tractations. Ces praticiens estiment que les honoraires privés devraient progresser, non pas de 6 %, mais de… 30 à 40 % d'un coup en raison du rattrapage tarifaire nécessaire. Le Dr Montgomery juge ces objectifs irréalistes et mise sur des augmentations progressives.

Les 250 médecins délégués du congrès ont ferraillé pendant près de deux jours sur la question de ces honoraires privés avant de mandater leur président pour tenter d'obtenir des revalorisations supérieures.

Division de la profession 

Ce conflit tarifaire tombe d’autant plus mal que l’Union des médecins conventionnés (KBV), principale structure de négociations avec les caisses, au cœur de l’organisation conventionnelle allemande, est secouée par plusieurs scandales.

Son ancien président, diplomatiquement mis à la retraite pour raisons de santé l’an dernier, a entraîné l’Union des médecins conventionnés dans des affaires immobilières aussi troubles qu’onéreuses, au point que le gouvernement envisage de placer un administrateur public à la tête de cette association. Cette mesure est catégoriquement rejetée par les médecins allemands qui luttent pour conserver leur indépendance de gestion.

La question des honoraires privés a révélé aussi les divisions au cœur de la profession médicale alemande, faisant passer au second plan les autres enjeux du congrès dont la question des prix des nouveaux médicaments, notamment en oncologie. Cela n'a pas empêché la profession d'appeler le gouvernement à durcir la procédure de fixation des prix de ces molécules onéreuses. 

 

 

 

De notre correspondant Denis Durand de Bousingen

Source : Le Quotidien du médecin: 9501