Indemnisation des victimes d’accidents médicaux

Un régime efficace mais à améliorer

Publié le 28/05/2009
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Crédit photo : S Toubon

La loi Kouchner du 4 mars 2002 relative aux droits des patients a instauré un régime d’indemnisation des victimes d’accidents médicaux. Parlementaires, institutionnels, associations se sont réunis autour du médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, pour débattre, sept ans après, sur l’efficacité de ce dispositif. Un dispositif qui devait entre autres proposer des procédures efficaces et « permettre un retour à la confiance », rappelle Didier-Roland Tabuteau, directeur de la Chaire Santé à l’Institut d’études politiques de Paris. « L’un des axes de la loi était, de repenser la qualité du système de santé. Il s’agissait également de garantir, dans la mesure du possible, l’égalité devant la loi. »

Accueil intimidant.

Alors oui, certains pays nous envient ce système d’indemnisation mais bien sûr il est perfectible. La première limite est celle des seuils d’invalidité. L’accès aux CRCI (Commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux) est restreint aux personnes pouvant justifier d’une IPP (invalidité permanente partielle) supérieure à 24 %. « Trop souvent, on résume la question du seuil à un seul problème de gestion, estime Dominique Martin, directeur de l’ONIAM (Office national d’indemnisation des accidents médicaux). Mais c’est un choix, fondamental, qu’on a fait, de mobiliser la solidarité nationale pour les personnes atteintes de dommages les plus graves. Je crois que l’iniquité apparaît surtout au niveau géographique. L’écart se creuse entre les régions qui ne sont pas toutes aussi dynamiques, urbanisées. »

« Trouvez-nous des experts médicaux, s’emporte pour sa part Françoise Avram, qui préside la CRCI d’Ile-de-France. Quand on tient un bon expert, on lui envoie tous les dossiers et il n’en peut plus. »

Claude Rambaud, présidente du Lien (association d’information et d’aide aux victimes d’infections nosocomiales et d’accidents médicaux) et qui au débat, représentait le CISS (Collectif interassociatif sur la santé), avance quant à elle des arguments très pratiques. « L’accessibilité du dispositif passe par l’information certes mais le problème est aussi financier. Nous, associations, faisons ce que nous pouvons mais les victimes manquent d’un accompagnement… gratuit. » Elle met en cause également la collégialité, pas toujours bien respectée au sein des commissions, ainsi que l’impartialité des experts. « Quand nous apprenons que l’un d’entre eux est ancien élève du chirurgien mis en cause, nous voudrions pouvoir émettre des doutes. » Elle regrette surtout un accueil « intimidant », quand la victime, parfois seule, parfois accompagnée, arrive dans la salle, où 23 personnes, déjà assises, l’attendent, sans se présenter…

« Il ne saurait y avoir de remise à plat de cette loi, mais elle doit faire l’objet d’une évaluation, externe. Je pense aussi que la diminution des dépenses passe par la diminution des victimes. Nous devons donc nous pencher sur la prévention des risques et introduire un peu plus de sécurité des soins pour les patients, dans la loi HPST par exemple. »

Conciliation, le parent pauvre.

« Notre pays a un retard culturel sur les modes de médiation », reconnaît Alain-Michel Ceretti, conseiller santé auprès du médiateur de la République. « Il faudrait instituer une commission de médiation régionale », suggère Olivier Jardé, député de la Somme. Les conciliations sont actuellement réservées aux faibles préjudices, et qui résultent exclusivement d’accidents médicaux fautifs. Par ailleurs, la loi Kouchner n’a pas prévu de procédure de conciliation en matière d’indemnisation de l’aléa thérapeutique.

« Je crois qu’il est nécessaire de penser le dispositif dans un cadre plus élargi, au-delà du sanitaire, c’est-à-dire dans le médico-social, pour une unité de la prise en charge », estime Didier Tabuteau, qui milite aussi pour la mise en place d’un dispositif effectif d’information sur notre système de santé, « qui reste une boîte noire pour bon nombre de nos concitoyens. Il faudrait poser le principe d’un droit à l’information collective. Cette mission pourrait trouver sa place dans les nouvelles ARS (Agences régionales de santé). »

AUDREY BUSSIÈRE

Source : lequotidiendumedecin.fr