Un Tour de France des CPTS pour identifier les « facteurs de succès » mais aussi les « irritants » et les « craintes » des libéraux

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Publié le 09/03/2023
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Crédit photo : PHANIE

Promesse d’Agnès Firmin Le Bodo fin janvier, lors de ses vœux communs avec François Braun, le « Tour de France » des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) est sur les rails depuis lundi. Une mission de trois mois qui vise à proposer une série de mesures « opérationnelles » dans l'optique de généraliser ces communautés de libéraux de santé à l'ensemble du territoire d’ici à fin 2023. 

Pour mener à bien ce panorama, la ministre des Professions de santé a saisi trois personnalités : la Dr Marie-Hélène Certain, médecin généraliste aux Mureaux, Albert Lautman, directeur général de la CPAM de l’Essonne, et Hugo Gilardi, directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) Hauts-de-France.

« Nous allons visiter 18 CPTS, une par région, et échanger avec les professionnels de santé qui adhérent à ces structures, mais aussi ceux qui n’y sont, pas pour comprendre leurs réticences, leurs craintes », raconte Albert Lautman. Ces échanges de terrain devraient être nourris par un court questionnaire envoyé à l'ensemble des CPTS de France. Les URPS, les Ordres mais aussi les fédérations seront appelés à contribution.

Déploiement variable

« Aujourd’hui, le déploiement des CPTS reste variable d’un territoire à l’autre », rappelle Agnès Firmin Le Bodo dans sa lettre de mission remise le 6 mars aux trois copilotes. Dans les faits, sur les 781 CPTS répertoriées, 391 structures ont signé un contrat ACI-CPTS. Ces dernières couvrent « 48,5 % de la population », indique la ministre déléguée aux Professions de santé. Et seules la région Centre-Val de Loire, la Martinique et la Réunion disposent d’assez de pools de libéraux pour couvrir 100 % de leur population.

Sur le terrain, le Tour de France cherchera à « identifier les freins, les attentes des professionnels de santé mais aussi les irritants qu’il peut y avoir dans certaines zones pas encore couvertes par les CPTS », précise Albert Lautman. Des échanges qui permettront de « mesurer l’apport de ces communautés sur le territoire et identifier les facteurs clé de leur succès », fait savoir le ministère de la Santé.

Moins de quatre ans après leur lancement par Agnès Buzyn, « la dynamique des CPTS reste bonne », pour Albert Lautman, notamment car la visibilité de ces structures a été dopée par les centres de vaccination Covid « qui ont donné envie aux professionnels de santé de travailler ensemble et de se connaître ». « C’est assez extraordinaire de voir le nombre de CPTS qui se sont montées dans un temps court, alors qu’elles touchent pourtant à la culture même des professionnels de santé », abonde la Dr Marie-Hélène Certain.

Sortir de l'isolement

Généraliste en MSP et membre « très impliquée » de la CPTS Val de Seine, la Dr Marie-Hélène Certain voit dans ces communautés un levier pour « apporter du collectif aux professionnels de santé, au service de la qualité des soins mais aussi du confort de travail personnel ». La généraliste se dit « très frappée par l’isolement de certains soignants ». « Aujourd’hui comment voulez-vous être seul pour faire face aux problématiques de santé ? », s’interroge-t-elle, alors que l’échelle de la CPTS permet à tous les médecins, « même ceux qui exercent seuls ou à deux, de se trouver pour des temps d’échanges, des projets ».

Toutefois, attention à ne pas démotiver les soignants, prévient la généraliste des Yvelines. « La question du temps [de construction] est centrale, il ne faut pas chercher à aller trop vite », met en garde la Dr Certain. À défaut, le risque « serait de couvrir le territoire de coquilles vides », pense-t-elle. La généraliste invite donc à laisser aux équipes des CPTS le temps de monter des projets concrets, tout en outillant et formant correctement les coordinateurs et les professionnels de santé.

Autre écueil qui peut freiner certains médecins libéraux dans l’adhésion à une CPTS, « lorsque la CPTS devient l’objet qui sert à tout, avec des injonctions descendantes », souligne Marie-Hélène Certain. Elle rappelle que ces communautés libérales doivent avant tout partir des besoins de la population.

Prévention, permanence des soins, accès aux soins

À travers une série de mesures, la mission devrait dresser des possibilités d’évolution des CPTS « pour mieux lutter contre les inégalités d’accès à la santé », autour de la prévention mais aussi de « l’organisation de la permanence des soins », peut-on lire dans la lettre de mission. « Pour l’heure, nous n’avons pas d’idées préconçues », souligne Albert Lautman, qui rappelle qu’il existe une grande hétérogénéité au sein des CPTS. « Certaines organisent des dépistages du cancer de manière très active, d’autres se mobilisent pour trouver des médecins traitants à des patients fragiles, c’est une approche territoire par territoire », explique-t-il. À titre personnel, le directeur de Cpam espère que ce Tour de France pourra « faire émerger des bonnes pratiques, des recettes qui fonctionnent bien ».

« Nous serons ouverts », confirme la Dr Certain. Le rapport est attendu pour le 15 juin. Les recommandations seront ensuite mises en œuvre sur le second semestre 2023.


Source : lequotidiendumedecin.fr