Accident : en dehors de l’AVAT de la CPAM, de quoi se prévaloir ?

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Publié le 16/09/2022
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Notre premier volet (Le Quotidien du 9 septembre) a montré que les extensions de garanties de cette assurance facultative (AVAT) — spécifique à l’AT/MP— ne portent de manière très marginale que sur l’invalidité et le décès, aucune IJ n’étant versée. Mais alors que faire en cas d'accident ?

En cas d'accident, la garantie corporelle conducteur est déjà prise en charge par votre assurance ou celle de l'autre

En cas d'accident, la garantie corporelle conducteur est déjà prise en charge par votre assurance ou celle de l'autre
Crédit photo : GARO/PHANIE

Les potentiels « accidents du travail » déjà couverts

Sur le versant des AT, les plus inquiets de nos lecteurs se souviendront que la majorité des prestations marginales fournies par l’AVAT (assurance volontaire accident du travail de la CPAM) sont déjà couvertes par d’autres recours quasi obligés.

Accident routier responsable : la garantie corporelle dite « du conducteur » de votre assurance automobile obligatoire couvre déjà l’indemnisation de votre préjudice corporel et moral.

Accident routier non responsable : l’indemnisation de votre préjudice corporel et moral est alors couverte par le conducteur adverse responsable.

Accident non routier (accident de la vie) - Exemple : vous faites une chute dans l’escalier de votre patient, à son domicile : l’indemnisation de votre préjudice corporel et moral est couverte par l’assurance en responsabilité civile (RC) dite familiale de son assurance habitation. Précisions : en cas de tiers responsable non assuré (accident routier ou non), c’est un fonds de garantie national qui prend le relais. Si bien que dans ces circonstances, ces recours sont applicables sans cette notion floue qu’est l’AT ou la MP du médecin libéral, rendant l’AVAT superflue.

L’exception actuelle de l’AES

L'AES (accident d'exposition au sang), qu'il concerne le VIH ou tout vecteur d’autres pathologies, est défini par le législateur comme un accident du travail du professionnel de santé (médecin, infirmier, etc.). Si la prise en charge est claire pour le professionnel salarié, il n'en va pas de même pour le libéral car, comme nous l’avons montré ici la semaine passée, l'accident du travail n'existe pas dans la législation concernant le libéral. Or, l'AES est par définition un risque inhérent à votre métier. C'est pourquoi une procédure spécifique de déclaration des AES avait été mise en place dans les années 1990 par le législateur pour tous les libéraux, afin que les frais médicaux afférents soient pris en charge par la sécurité sociale afin de ne pas provoquer d'inégalité de traitement sur une question aussi fondamentale entre le salarié et le libéral de santé. Or depuis l’année 2018, cette procédure spécifique a purement et simplement disparu. Et les CPAM indiquent désormais que :

● le professionnel libéral titulaire de l'AVAT, doit faire une déclaration d'AES en accident du travail comme tout salarié, faire établir un certificat initial, le tout afin d'obtenir la prise en charge par la sécurité sociale de ses frais médicaux et frais de médicaments ;

● toute déclaration d'accident du travail au titre d'un AES par un professionnel de santé non titulaire de l’AVAT pourra être refusée par la CPAM.

Notre conseil sur la couverture du risque AES par l’AVAT

Nous invitons nos lecteurs à individualiser leur risque réel selon spécialité. En effet, si vous ne pratiquez pas de soins de premier recours sur les accidentés graves (de la route, blessures sanglantes au cabinet, etc.) ni de prélèvements sanguins, vous n’êtes pas plus concerné que la population courante. A contrario, des spécialités comme l’anesthésie-réanimation ou la médecine vasculaire constituent des exceptions fortes, dont l’indication de cotiser en AVAT est alors réellement à discuter et à comparer aux solutions concurrentielles d’assurances du domaine privé.

Et les autres maladies professionnelles ?

Étant médecin, vous connaissez bien la liste des maladies professionnelles hors AES. Mais laquelle pourriez-vous sérieusement craindre et surtout, de quels arguments recevables par votre CPAM vous pourriez vous prévaloir pour faire accepter cette maladie comme professionnelle ? Réponse : aucuns. Alors pourquoi cotiser pour un risque inexistant ?

Notre avis pratique hors AES– Examinez en détail une feuille de soins : dans les « Conditions de prise en charge des soins » (par votre CPAM), en cas d’accident de toute cause survenant durant votre journée de travail, vous devez cocher ou faire cocher « maladie », sous case « accident causé par un tiers : oui/non/date ». Et cela, en lieu et place de cocher « AT/MP » car vous n’êtes tout simplement pas concerné par ce statut réservé aux salariés (Art. L.411-1 du Code de SS). Que ce soit en matière d’AT ou de MP (hors AES qui ressort d’une législation spécifique), vous comprenez alors que la quasi-totalité des « aventures et mésaventures » que vous racontent vos confrères en matière de couverture AVAT, ou qui se colportent sur les réseaux sociaux, repose sur l’ignorance de l’inexistence légale de la notion d’AT pour un libéral. Il est donc totalement inutile de vouloir s’en prévaloir et de surcroît, contrairement à ce que laisse entendre la promotion de l’AVAT par les CPAM, de vouloir s’en prémunir spécifiquement via cette AVAT.

Notre conseil global

Fuyez l’AVAT. Il existe sur le marché de votre prévoyance volontaire, hors AVAT, quantité de contrats complets garantissant les arrêts de travail sans exclure ceux issus des accidents. Ce conseil valant également pour votre éventuel conjoint collaborateur bénévole. Il y a mieux à faire que de vous fourvoyer dans une cotisation élevée (vis-à-vis des garanties offertes) qui n’assure, hormis l’AES, qu’un risque déjà assuré par ailleurs.

Une question ? Un avis ? = > pascal.lamperti@media-sante.com

Pascal Lamperti

Source : Le Quotidien du médecin