Annoncée en décembre dans le cadre des négociations conventionnelles, la notion d'engagement territorial des médecins afin de réduire les difficultés d'accès aux soins - chère à Emmanuel Macron - commence à se concrétiser. La Cnam a mis sur la table, lors des rencontres bilatérales de la semaine dernière avec les syndicats, un « contrat d'engagement territorial » ouvert aux généralistes comme aux spécialistes avec quatre thématiques : « accès aux soins », « accès aux soins urgents », « accès financier » et « engagement populationnel ».
Selon le document que « Le Quotidien » a pu consulter, chaque praticien devrait s’engager, pour chacune des thématiques, sur un item de son choix. Dans l'item « accès aux soins », par exemple, le médecin généraliste, « installé et traitant », pourrait choisir entre l'atteinte d’un niveau minimal de file active (soit 1 290 patients médecins traitant), l'accueil de nouveaux patients MT adultes, notamment sur adressage des CPTS en lien avec CPAM/ARS, l'exercice ou la réalisation de consultations avancées en ZIP (zones d'intervention prioritaires) ou encore l'emploi d’un assistant médical dans le cadre du contrat avec l’Assurance-maladie.
L'adhésion à ce contrat « incitatif » permettrait aux médecins de toucher un « forfait annuel ». Par ailleurs, précise la Cnam, ce contrat est « indépendant » et s’ajoute à d'autres types de valorisations : majoration du FPMT (forfait patient médecin traitant) en zone d'intervention prioritaire (ZIP), aide à l’embauche d’un assistant médical, valorisation de l’effection des soins non programmés dans le cadre du SAS ainsi que de la régulation, de la fonction maître de stage ou encore de la prime OPTAM.
Rôle renforcé des CPTS et mise en place des équipes de soins spécialisées
À travers ce contrat, la Cnam souhaite aussi renforcer le rôle des CPTS dans plusieurs de ses missions : accès aux médecins traitants (opération « zéro ALD sans médecin traitant »), organisation de la permanence des soins ambulatoires, interface avec les SAS, l’hôpital et les collectivités territoriales ou encore déploiement des coopérations entre professionnels.
Le document acte aussi la mise en place des équipes de soins spécialisées (ESS) pour organiser l’accès aux soins de la spécialité sur le territoire, former et informer des médecins généralistes sur la prévention, le dépistage et les indications de recours aux soins spécialisés ou encore l’accès à la téléconsultation sur le territoire et déployer la téléexpertise et la télésurveillance.
Quatre niveaux de consultation
Concernant la nomenclature - un axe central de ces négociations conventionnelles - la Cnam avait promis de « simplifier au maximum » en réduisant le nombre de codes (en intégrant certaines majorations) et en regroupant des consultations d’un même niveau tarifaire avec une seule lettre clé. Ce travail devrait aboutir à quatre niveaux de consultations. « La composition des différents niveaux doit reposer sur des paramètres objectifs facilement appréhendables par les professionnels et les patients », poursuit la Cnam.
Quel serait le contenu de chacun de ces niveaux ? La Cnam propose que les actes de téléconsultation et les consultations de patients de généralistes hors médecin traitant relèveraient du niveau 0. Le niveau 1 regrouperait les consultations courantes, le niveau 2 les consultations des enfants (avec un critère d’âge), des patients en ALD avec un critère d’âge et de quantité, ou les premières consultations chez un nouveau médecin traitant (hors ALD) et les bilans de prévention. Enfin, le niveau 3 correspondrait aux examens obligatoires de l'enfant, aux visites longues ou encore aux consultations très complexes existant déjà.
Colère des syndicats
Des propositions qui ne passent pas auprès des syndicats de médecins libéraux. La FMF a dénoncé « le mépris envers les médecins libéraux ». « Seuls ceux qui auront un investissement populationnel seraient mieux rémunérés », tonne la Dr Corinne Le Sauder, présidente du syndicat. Réunie en comité directeur, la branche généralistes de la FMF, Union généraliste a refusé en bloc ce contrat. La colère est aussi palpable du côté de la CSMF. Joint par « le Quotidien », son président, le Dr Franck Devulder, rappelle que son organisation défend « un contrat d'engagement populationnel à condition qu'il soit atteignable, ce qui n'est pas proposé par la Cnam ».
Prenant l'exemple de l'item « engagement populationnel », « un médecin qui n'est pas dans une CPTS, ni dans une équipe de soins primaire ni n'est maître de stage, devra participer à une réserve libérale sur sollicitation de l'ARS pendant des périodes épidémiques ou les vacances scolaires. On va donc demander aux libéraux de faire le travail à la place des hospitaliers qui peuvent partir en vacances. C'est un rêve ? ».
Pour l'heure, la centrale polycatégorielle a décidé de lancer un appel à la grève de la permanence des soins à compter du 23 janvier 2023. « Ce mouvement ne pourra aller qu’en se durcissant si rien ne bouge », écrit la CSMF. Une réunion intersyndicale est prévue le 18 janvier pour décider de la suite à donner au mouvement de contestation.
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