Dépassements abusifs, refus de télétransmission, IJ... :  la conciliation s'invite dans les délicates relations médecins/caisses

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Publié le 16/12/2019

Crédit photo : S. Toubon

Lors de la dernière commission paritaire nationale (CPN), l'Assurance-maladie a dévoilé aux syndicats de médecins libéraux un bilan des nouvelles commissions de conciliation, une expérimentation lancée en avril 2018 dans 13 caisses primaires pour 20 mois. Ces instances doivent bénéficier aux praticiens convoqués en commission paritaire locale (CPL) – le principe étant de les auditionner en amont, dans le cadre d'un dialogue confraternel. 

Composées de praticiens conseils et de médecins syndiqués membres de la commission paritaire locale, ces commissions de conciliation invitent ainsi les médecins libéraux à s'expliquer sur diverses anomalies repérées dans leur activité ou leur prescription. « Il s'agit d'un dialogue confraternel qui permet aux médecins d'apporter des précisions sur des thématiques différentes comme les arrêts de travail, les prescriptions de transport ou les pratiques tarifaires… », explique le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.

127 dossiers en 20 mois

Après 20 mois d'expérimentation, le bilan montre que dix CPAM* sur treize ont réuni au moins une fois leur commission de conciliation. Et sur les 127 dossiers étudiés, 52 médecins libéraux se sont effectivement présentés en commission (41 %).

Les principaux manquements potentiels pour lesquels les médecins « hors des clous » ont été conviés à s'expliquer concernent le non-respect de manière systématique de l'obligation de transmission électronique (42 dossiers) et une pratique tarifaire excessive des médecins exerçant en secteur II ou titulaires du droit de dépassement permanent (31 dossiers). Les anomalies liées aux prescriptions d'indemnités journalières (IJ) sont relevées dans 14 dossiers. Seuls six cas sont liés au non respect du droit à la dispense d'avance des frais ou des tarifs opposables au profit des bénéficiaires de la CMU-C et de l'ACS.

À noter que certains médecins ont été invités pour plusieurs manquements et que certaines commissions ont préféré envoyer un avertissement que de convoquer les médecins

Seuls 22 dossiers ont eu des suites 

Quelles suites concrètes à cette conciliation ? Sur ces 127 dossiers analysés, les commissions de conciliation ont confirmé les manquements constatés dans 104 cas (82 %). Mais sur ces 104 situations, 82 n'ont pas donné lieu à des poursuites.

Pour les 22 dossiers restants, l'Assurance-maladie a engagé des actions de mise sous surveillance (1 médecin), un accompagnement confraternel (10), un rappel de la réglementation (4), une procédure de sanction conventionnelle (4) et une procédure de mise sous objectif/mise sous accord préalable (3).

Selon ce bilan, les points positifs de la conciliation concernent le climat plus « serein » grâce à la « mise en confiance des médecins par leurs pairs » mais aussi l'intérêt d'une procédure qui évite d'engager des procédures conventionnelles « plus lourdes ». « Les médecins invités sont satisfaits d'avoir la possibilité d'apporter des précisions », assure la CNAM.

Mais des points négatifs ont été aussi relevés : la « lourdeur » du dispositif, son caractère « chronophage » ou la peur de certains médecins de l'intitulé et de la solennité de la commission de conciliation « proche d'une juridiction ». « J'ai insisté auprès de l'Assurance-maladie sur le ton de la lettre pour inviter le médecin à venir en commission de conciliation, explique le Dr Ortiz. Le médecin ne doit pas se sentir d'emblée en accusation car cela peut faire des dégâts terribles. » Les commissions de conciliation devraient être généralisées en 2020.

* Hérault, Eure-et-Loir, Yonne, Alpes-Maritimes, Isère, Paris, Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne et Hauts de Seine. 


Source : lequotidiendumedecin.fr