L’Espagne de l’ouest, près du chemin de Saint-Jacques

Asturies et Galice, escapade océane

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Publié le 16/06/2023
Longeant la côte Cantabrique avant de plonger dans les terres, le Camino del Norte dévoile le patrimoine et les paysages singuliers des Asturies et de la Galice. Mais nul besoin d’être pèlerin pour découvrir les charmes de ces deux régions atlantiques.
Gijón

Gijón
Crédit photo : PHOTOS PHILIPPE BOURGET

Le tourisme « compostellien » a beau être un moteur de l’économie régionale, les milliers de marcheurs arpentant les chemins de Saint-Jacques n’empêchent pas les autres voyageurs d’apprécier les deux régions les plus occidentales du pays. En voiture, il est possible de longer au plus près le Camino del Norte. Tout en profitant d’autres beautés en mettant une roue de côté.

Venant du Pays basque et de Cantabrie, le chemin suit les 350 km de côtes des Asturies, collé à l’océan ou ondulant près de lui. Rien à voir avec le littoral écrasé de soleil de la Costa Brava et d’Andalousie. Accidentée et verte, la côte dévoile des petits ports lovés au bord de rias, des maisons aux toits parfois couverts d’ardoises et une activité de pêche encore prospère. À l’écart de la mer, le paysage roule sa bosse en grosses collines verdoyantes, plantées de pins et de châtaigniers, parsemées de prairies à vaches et de fermes isolées. La météo est humide, fraîche et pluvieuse. L’été, le mercure dépasse rarement 27° C.

Au sud des Asturies, le relief est barré par les monts Cantabriques et les Picos de Europa, culminant à 2519 m. Ce fond de scène montagneux berce le parcours côtier. Ainsi à Llanes, célèbre port des Asturies. Joliment irrigué par une ria, le village médiéval déploie des immeubles à bow-windows et des casas de Indianos, maisons bourgeoises bâties dès la fin du XIXe par des Asturiens émigrés en Amérique du Sud, rentrés afficher leur fortune. Ce style se retrouve aussi en Galice.

Toute la côte est à l’image de Llanes. Ribadesella se déploie sur les rives du rio Sella, où s’abritent les grottes ornées de Tito Bustillo, classées à l’UNESCO. Llastres plonge en mer, tel un village des Cinqueterre. Luarca, avec ses « villas indiennes », se calfeutre autour de son port de pêche, dominé par un cimetière marin et une chapelle blanche. Viavelez cache ses maisons rustiques et ses bateaux autour de sa minuscule ria.

Dans cette Espagne aux airs bretons, le Camino del Norte offre des sections remarquables. Entre Póo et Celorio, la côte herbeuse et sauvage propose une échappée vivifiante autour de la conque sableuse de Portiellu. La balade dure une heure, avec retour à pied ou en taxi. Le chemin passe aussi par Gijón et Avilés. à Gijón, on profitera du splendide palais baroque de Revillagigedo (XVIIe) et du long paseo en bord de plage. On ne manquera pas aussi, près de la ville, le Laboral, ancienne université et folie architecturale des années 1940, devenue Cité de la culture. À Avilés, on se baladera dans les rues à soportalés (arcades) avant de pousser la porte d’une sidrería, pour déguster ce cidre asturien aigrelet en dégustant des fromages, dont le célèbre cabrales, le roquefort local.

Impossible de quitter les Asturies sans visiter Oviedo. A l’écart du Camino del Norte, on ralliera la plus belle vieille ville de la région, constituée de rues piétonnes animées et décorées de statues, de places aux édifices monumentaux (ayuntamiento, musée archéologique, monastère de San Pelayo…) et d’une cathédrale et d’un cloître, San Salvador, au style gotique flamboyant magistral.

Parvenu à Ribadeo, le chemin abandonne la côte et les Asturies pour entrer en Galice et piquer vers Saint-Jacques de Compostelle. Bienvenue au pays des marcheurs ! Ici se rejoignent plusieurs chemins qui font grossir le flot des pèlerins en route vers le tombeau de l’apôtre. Un lieu témoigne de cet engouement : l’auberge pèlerine de Ribadiso, à Arzúa. Au bord de l’Iso, des marcheurs de toutes nationalités posent le sac et se rafraîchissent dans l’eau de la rivière. Saint-Jacques n’est plus très loin ! Avant cela, les voyageurs auront consommé du patrimoine religieux… À Vilanova de Lourenzá, avec l’ancien monastère de San Salvador et son église baroque abritant un exceptionnel retable à personnages (sacristie) et un sarcophage paléochrétien. À Mondoñedo, avec le palais épiscopal et la massive cathédrale romano-gothique-baroque, dotée de fresques du XIVe. Au cimetière de Goiriz, avec ses tombes-calvaires dignes d’un enclos paroissial breton. Au monastère Sobrado dos Monxes, avec ses trois cloîtres, toujours occupé par des Trappistes.

L’arrivée à Saint-Jacques-de-Compostelle, maillée de couvents, de chapelles, d’églises et de congrégations religieuses, ne surprendra pas. Dans ce haut lieu du christianisme, animé d’une vraie vie commerciale et culturelle (voir les halles de granit et la mégalomane Cité de la culture), nul doute que l’on sacrifiera, marcheur ou non, au selfie devant la gigantesque cathédrale. Depuis le Moyen Âge, elle draine des cohortes de pèlerins, mi-croyants, mi-touristes, qui forgent la réputation de cet ouest espagnol atlantique.

Philippe Bourget

Source : lequotidiendumedecin.fr