Nouvelle Calédonie

Au pays des merveilles du bout du monde

Par
Publié le 26/03/2009
Article réservé aux abonnés
128707496847435_IMG_11649_HR.jpg

128707496847435_IMG_11649_HR.jpg

128707496847436_IMG_11650_HR.jpg

128707496847436_IMG_11650_HR.jpg

128707496947438_IMG_11652_HR.jpg

128707496947438_IMG_11652_HR.jpg

128707497047445_IMG_11654_HR.jpg

128707497047445_IMG_11654_HR.jpg

« CAILLOU ». Quel drôle de nom les zoreilles ont-ils donné à ces morceaux de terre française du bout du monde ! D’aucuns lui préfèrent le terme de Kanaky. Sur près de 24 000 km2 de lagon, entre l'Australie et les Fidji, pas moins de 1 600 km de récifs coralliens, classés par l’UNESCO en 2008, protègent Grande-Terre, l’île des Pins et les îles Bélep et Loyauté. Un jardin flottant aux paysages changeants sur lequel alternent chaînes de montagnes noires ou de latérite, savanes, forêts tropicales luxuriantes ou sèches, maquis miniers, îlots aux longues plages de sable bordées d’araucarias géants...

La curiosité s’aiguise dès qu'on aperçoit par le hublot les premiers récifs, les premières « patates », les premiers fonds de sable blanc dans un camaïeu de bleus des mers du Sud. Puis les toits rouges de Nouméa, au sud-ouest de Grande-Terre. La plus grande des îles de l'archipel. Ouverte sur la mer de Corail, la capitale a des allures de ville azuréenne par son décor et californienne par son mode de vie. Une incursion sur la place animée des Cocotiers fait vite oublier les quelque 22 heures de vol. Flanquée d'un joli kiosque à musique qui accueillait l'orchestre des bagnards, la longue place est le cœur du quartier historique. Et à l'ombre de ses flamboyants, le lieu privilégié du farniente.

Une visite des baies qui ceinturent la ville s'impose. La baie de la Moselle et ses marinas, celle de l'Orphelinat ou des Citrons, abritée des alizés, l'Anse Vata et la Pointe Magnin et leurs grands hôtels d'où l'on peut embarquer pour une foultitude d'îlots. Se retrouver sur les plages des îles satellites est le passe-temps dominical favori. Au pied, par exemple, du phare de l'îlot Amédée (247 marches), construit dans des ateliers des Buttes-Chaumont, à Paris, et qui surveille depuis le Second Empire l’entrée de la passe de Boulari. L'îlot est une réserve marine qui promet au plus blasé des plongeurs des rencontres inoubliables.

Les rues de Nouméa, en pente douce, dévoilent de jolies maisons coloniales qui se noient dans la végétation et côtoient avec harmonie des réalisations plus récentes. Depuis le XIXe siècle, la cathédrale Saint-Joseph protège la baie de la Moselle, et quelques pierres de l'ancien fort Constantine font corps aujourd'hui avec l'hôpital Gaston-Bourret. Sans aucun doute, le plus célèbre des bâtiments de la ville est-il le centre culturel Djibaou, construit par Renzo Piano, l’architecte du centre Georges-Pompidou, à Paris. Posées sur la presqu'île de Tina depuis l’année des accords de Nouméa (1998), dix hautes huttes profilées d'iroko et d'acier rendent hommage à la culture et aux traditions kanak.

Terre de paysages préservés et de coutumes.

Aux portes de Nouméa, la brousse se transforme sans crier gare en savane de niaoulis argentés, en bocage normand, en forêt primitive ou en montagne tombant à pic dans le lagon. À cheval ou en Pick-up, les « montures » préférées des broussards, on croise des stockmen solitaires surveillant leurs troupeaux de vaches limousines et de zébus tout en rêvant à un rodéo prochain. De Bourail à La Foa ou de Prony à Poum, les paysages variés se succèdent pour le plus grand plaisir des botanistes.

On ne quitte jamais un ranch caldoche sans partager un fameux bougna de poulet ou un ragoût de cerf, cuits au feu de bois. Des moments privilégiés que l'on connaît également en traversant des tribus kanak. Devant la grande case ronde surmontée d’une flèche faîtière, il est d’usage de « faire la coutume ». Offrir au chef un présent sous forme d'étoffe le plus souvent et recevoir en retour l'hospitalité de la tribu et l'assurance de découvrir sur le territoire culturel kanak quelques curiosités naturelles inoubliables. Le cœur de Voh, par exemple, que dessine la mangrove et que Yann Arthus-Bertrand a rendu mondialement célèbre. Ou au nord-est de Grande-Terre, magnifiquement découpée dans la roche noire et plantée au milieu de la mer, la Poule couveuse de Hienghène, l'une des figures emblématiques de l'archipel.

Au plus près du Paradis.

On ne quitte volontiers les paysages superbes de Grande-Terre et l'accueil de ses habitants que pour voler vers l'île des Pins, à quelques minutes au sud de Nouméa. De tout temps, l'île s'est appelée Kunié. En 1774, le capitaine Cook en décida autrement quand il aperçut depuis son bateau les côtes gardées par une escouade de pins colonnaires.

Difficile d’imaginer que ce coin de paradis fut longtemps un bagne pour des milliers de déportés de la Commune de Paris, de Berbères d'Algérie et de Kanaks. On pense à la plus célèbre d'entre eux, Louise Michel, qui y fut emprisonnée de 1873 et 1880. Surnommée la Vierge rouge, l’amie de Clémenceau tomba sous le charme de la culture kanak et publia à son retour en Métropole « Légendes et chants de gestes canaques ».

Les plages de l’île sont ourlées d'un sable blanc et fin. Comme celle de la piscine naturelle d’Oro, taillée dans le corail, ou de Kanuméra, à quelques pas de sentier des hôtels Ouré et Méridien bien dissimulés dans la végétation.

À bord d’une pirogue à balancier, on se laisse glisser dans la baie d’Upi, parsemée de champignons coralliens. Peut-être jusqu’aux îlots Nokanhui, tout juste surgis de l’eau. Le monde du silence est ici à porté de main, tapissé de gorgones multicolores et de coraux baroques, habité par des poissons-perroquets verts, des napoléons de bronze, des clowns ou des chirurgiens bleus au scalpel précis. Des couleurs chatoyantes qui rappellent les costumes traditionnels des danseurs de ballets incantatoires ou des robes missions que les femmes portent lorsqu’elles jouent à leur sport favori, le cricket, hérité des missionnaires anglais.

L’une des particularités de la Nouvelle-Calédonie, fragment du continent du Gondwana, est de présenter un endémisme floristique et faunistique parmi les plus élevés du monde. Alors avec un peu de chance, on tombera sous le charme de « la grand-mère » de toutes les fleurs de la planète, l'amborella, qui habite ces terres depuis plus de 150 millions d’années. En revanche, il en faudra beaucoup plus pour saisir le portrait de l’espiègle Cagou, un drôle d’oiseau, mi-poulet, mi-échassier, ne sachant pas voler mais courant à 1 000 km/h tout en aboyant par-dessus le marché. On le croise parfois au parc de la Rivière Bleue sur le chemin du Kaori géant et millénaire...

PASCAL THOMERET

Source : lequotidiendumedecin.fr