Cinéma/« L’Autre Dumas », de Safy Nebbou

Avec panache

Publié le 16/02/2010
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Crédit photo : P. CHANTIER/FILMOBLIGE

L’AUTRE DUMAS, c’est donc Auguste Maquet, qui collabora pendant une dizaine d’années avec le maître et participa à l’écriture de 17 romans, dont les plus célèbres (« les Trois mousquetaires », « le Comte de Monte Cristo », « la Reine Margot », « Joseph Balsamo »...). Maquet fit un procès à Dumas, en 1858, et si le tribunal lui accorda 28 % des droits d’auteur, il lui refusa la cosignature des livres.

Le scénario, adaptation par Safy Nebbou et Gilles Taurand de la pièce « Signé Dumas », de Cyril Gély et Éric Rouquette, imagine que le nègre se fait passer pour l’Auteur auprès d’une charmante jeune fille venue implorer une intervention en faveur de son père emprisonné pour opposition au roi. Cette première liberté avec l’histoire réelle en autorisera bien d’autres, ce qui évite la pesante reconstitution et permet quelques fantaisies.

Décors et costumes ne sont pas pour autant négligés et les moyens n’ont pas manqué, par exemple, pour le très coloré bal costumé. Le plus savoureux reste cependant les dialogues entre les deux hommes, l’extraverti et le frileux, le créateur et le besogneux, l’excentrique et le trop sérieux. Il est agréable, et pas si fréquent actuellement, d’entendre des répliques ciselées et écrites dans un beau français – sans que celui-ci apparaisse daté. Gérard Depardieu, qui a compris, avec l’aide du réalisateur, qu’il ne fallait pas faire du Depardieu, est un Dumas tel qu’on l’imaginait*. Benoît Poelvoorde place son personnage là où il faut, touchant, juste à la limite du ridicule. Et il y a encore de la place pour l’irrésistible Dominique Blanc, dont on apprécie qu’elle ne soit pas, pour une fois, dans un rôle tout en souffrance, pour Catherine Mouchet et bien sûr pour la lumineuse Mélanie Thierry. Après « le Cou de la girafe » et l’angoissant « Empreinte de l’ange », Safy Nebbou ne déçoit pas.

* Du moins avant de se rappeler, ou de se faire rappeler par le CRAN (Conseil représentatif des associations noires de France), que le romancier était né d’un père métis, fils d’une esclave haïtienne. Et de se demander s’il aurait fallu qu’il soit incarné par un acteur de couleur ou si un blanc de l’envergure de Depardieu pouvait faire l’affaire...

RENÉE CARTON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8710